Depuis 2016, la désinformation sur Facebook a explosé : pourquoi ça continue de cartonner

Alors que les élections présidentielles américaines se profilent à grands pas, les fake news semblent ne jamais avoir séduit autant la population. Sur Facebook, en tout cas, le taux d’engagement à des sites de désinformation est toujours grandissant.

La toute dernière étude de la branche numérique du German Marshall Fund (GMF) a de quoi inquiéter. Il en ressort que l’engagement des utilisateurs de Facebook à des sites web qualifiés de ‘trompeurs’ a augmenté de 246% entre le troisième trimestre de 2016 et le troisième trimestre de 2020.

D’après le rapport de ce groupe de réflexion sur les politiques publiques basé à Washington DC, dix médias en ligne concentrent à eux seuls deux tiers de ces interactions (likes, partages, commentaires, etc.).

Parmi les sites populaires, le GMF pointe notamment les médias qui répandent allègrement de fausses informations, tels que The Federalist. Le groupe met aussi (et surtout) en garde contre les sites qui ‘partagent des allégations non fondées ou qui déforment l’information dans le but d’appuyer un point de vue’. Ces derniers sont qualifiés de ‘sites manipulateurs’.

Ces ‘sites manipulateurs’, qui semblent duper plus aisément les utilisateurs, ont d’ailleurs vu leur popularité exploser, avec des chiffres d’engagement qui ont progressé de 293% depuis le troisième trimestre de 2016.

Pourquoi la désinformation continue de fonctionner

À trois semaines du scrutin des présidentielles américaines, cette nouvelle étude sur l’adhésion des internautes aux sites de désinformation met en lumière l’ampleur du problème.

‘La désinformation affecte notre discours démocratique à des taux qui menacent la santé à long terme de notre démocratie’, a déclaré Karen Kornbluh, économiste et directrice de la branche digitale du GMF.

Si le phénomène n’est évidemment pas neuf, le rapport du GMF permet surtout de comprendre comment la désinformation continue à gagner du terrain alors que les plateformes (dont Facebook) tenter de l’enrayer (on voit surtout que leurs dernières mesures affectent tous types de contenus).

Contrairement aux producteurs de faux contenu déjà identifiés auparavant, il apparaît que les ‘sites manipulateurs’ font en sorte de ne pas se faire passer pour des médias d’information. Et c’est ainsi qu’ils passent entre les mailles du filet.

Facebook se défend

Karen Kornbluh demande aux médias sociaux de redoubler d’efforts pour lutter contre la prolifération de la désinformation sur leurs plateformes. La solution ne doit pas venir de leurs utilisateurs, mais bien des réseaux sociaux en question. Voire de plus haut.

‘Il y a un réel besoin d’actions permettant de changer les motivations des plateformes’, a-t-elle lancé, avant de dresser un audacieux parallèle. ‘C’est comme les constructeurs automobiles qui, au début, n’avaient pas d’intérêt à installer des ceintures de sécurité dans leurs véhicules. Ce n’était pas aux conducteurs de l’installer eux-mêmes !’

Pas convaincu par l’étude du GMF, Facebook a préféré mettre en avant les progrès réalisés depuis quelques années en matière de lutte contre la désinformation. L’engagement ne serait pas représentatif de ce que les gens consultent effectivement sur le réseau social.

‘Utiliser l’engagement pour tirer des conclusions sur les progrès que nous avons réalisés depuis 2016 pour limiter la désinformation et promouvoir des sources d’information faisant autorité est trompeur’, a réagi un porte-parole de Facebook auprès d’ABC News. ‘Au cours des quatre dernières années, nous avons construit le plus grand réseau de fact-checking de toutes les plateformes réunies, nous avons investi dans la mise en évidence de contenu informatif vérifié, et nous avons modifié nos produits pour nous assurer que moins de gens voient de fausses informations et en soient informés lorsqu’ils le font.’

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