Le rêve de Macron de créer une armée autonome des États-Unis n’est plus du tout à l’ordre du jour

Il n’y a pas si longtemps, les pays d’Europe – et en particulier d’Europe occidentale – voulaient se lancer dans une dynamique d’autonomie accrue par rapport aux États-Unis en matière de défense. Mais depuis l’invasion russe en Ukraine, cette idée ne semble plus à l’ordre du jour.

L’une des grandes conséquences de la guerre russo-ukrainienne n’est absolument pas une victoire pour Moscou : l’OTAN bénéficie très clairement d’un second souffle et d’un nouvel accent sur les politiques de défense parmi nombre de ses membres européens. Ce qui condamne très probablement toute initiative d’en développer une alternative européenne, estime le nouveau président tchèque, Petr Pavel, élu le 28 janvier dernier.

  • Celui-ci, ancien militaire, s’est confié lors d’une conférence en comité restreint à laquelle a pu assister Euractiv. Il a rappelé que l’idée reposait essentiellement sur la volonté du président français Emmanuel Macron.

« La défense européenne – j’en ai parlé à Munich avec le président Macron – ne consiste pas à déclarer que nous avons une armée européenne ou une armée de l’UE. Il y a déjà eu un grand changement de la part du président Macron – de l’armée européenne, dont il parlait il y a des années, sur fond de mort cérébrale de l’OTAN, pour dire maintenant que nous devons construire une défense européenne basée sur le pilier européen de l’OTAN, ce que j’applaudis. C’est un changement raisonnable. »

Petr Pavel, président de la République tchèque (élu, mais pas encore en fonctions)

Retour en 2021 : la France se retrouve dans un froid prolongé avec les États-Unis, l’Australie, et la Grande-Bretagne. Elle a vu son accord pour la construction de sous-marins annulé par Canberra du jour au lendemain, au profit d’un nouvel accord AUKUS exclusivement entre nationalités anglo-saxonnes.

  • C’était la goutte d’eau qui a bien failli faire déborder la vase, tout en mettant en évidence que, pour Washington, la priorité en matière de défense était le Pacifique, face à la Chine, et non l’Europe.
  • De quoi nourrir cette impression que l’OTAN devenait obsolète, et que l’UE avait tout intérêt à faire cavalier seul en matières militaires. Une idée qui était déjà dans l’air depuis quelques années : on estimait qu’une armée européenne inclusive pouvait aisément devenir la deuxième au monde.
  • Mais l’idée n’a jamais fait l’unanimité. Elle était soutenue à bout de bras par la France, plus timidement par l’Allemagne, et considérée comme très mauvaise en Europe de l’Est, comme d’ailleurs à Washington.

« L’Europe dispose du minimum de ces capacités »

Et puis, une guerre ouverte est réapparue en Europe. L’invasion de l’Ukraine, coincée entre la Russie et l’OTAN, a ravivé la flamme de l’Alliance, qui démontrait qu’une dissuasion efficace restait nécessaire, autant si ce n’est plus qu’à l’époque de la guerre froide. Pourquoi développer un nouveau réseau d’alliances en ne partant de – presque – rien alors qu’un système est en place ?

  • Pourtant, même le président tchèque considère que l’Europe pourrait gagner en autonomie, mais au sein de la structure OTAN. Il cite la logistique, la communication stratégique, y compris les satellites, ou le renseignement stratégique : « L’Europe dispose du minimum de ces capacités », estime Pavel, lui-même ancien président du comité militaire de l’OTAN.
  • Plutpot qu’une armée transnationale européenne, il serait donc selon lui plus réaliste que l’OTAN ne se résume pas à la puissance militaire et logistique de l’Oncle Sam, avec quelques auxiliaires européens. Car il est vrai que la défense de l’Europe dépend des priorités que fixe le président en place à Washington.
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