Bientôt le grand retour du pétrole vénézuélien ?

Pour pousser le président vénézuélien et l’opposition à reprendre les pourparlers, les Etats-Unis brandissent une levée de quelques sanctions, dont l’exploitation et la vente du pétrole. Si les deux parties discutent, l’américain Chevron, l’une des principales compagnies pétrolières privées au Venezuela, pourrait recommencer à produire du pétrole au Vénézuéla. Des barils en plus sur le marché, mais qui, à eux seuls, ne feront pas une grande différence.

Pourquoi est-ce important ?

Le marché du pétrole fait face à plusieurs incertitudes. Tout d'abord, l'embargo européen sur le pétrole russe qui fait que le continent devra se fournir ailleurs. Ensuite, le plafond des prix du G7 : on ne sait pas encore comment et quand il sera appliqué. Enfin, la réduction de production de l'OPEP : y en aura-t-il une autre ? Ajoutez à cela la baisse de la demande mondiale, dans un contexte de crainte de récession, qui fait chuter les prix de l'or noir, pour l'instant. Des barils en plus sur le marché pourraient ajouter un peu plus de certitude.

Dans l’actu : les Etats-Unis sont prêts à donner une autorisation à Chevron pour exploiter et vendre le pétrole vénézuélien à nouveau.

  • Il s’agit d’une carotte pour la classe politique du pays d’Amérique latine, pour que le président Nicolás Maduro et l’opposition se mettent à discuter, expliquent des sources à Reuters. Ils ont prévu de se réunir ce weekend à Mexico City, une première fois depuis 2021.
  • S’ils se mettent autour de la table, les Etats-Unis se disent prêts à lever quelques sanctions (et ainsi donner cette autorisation à Chevron) et à libérer quelques prisonniers vénézuéliens. Les autorisations pour Chevron pourraient tomber lundi ou mardi.

Contexte : déclin de l’industrie pétrolière du Vénézuéla.

  • Depuis 2018 et les premières sanctions sur le pétrole vénézuélien, suite à l’élection – contestée par l’Occident – de Maduro, l’industrie pétrolière est en déclin. De nombreux groupes ont quitté des exploitations communes avec PDVSA, l’entreprise pétrolière publique. Chevron serait ainsi le seul grand acteur encore présent, qui pourrait relancer la machine rapidement.
  • En chiffres : le pays produit 650.000 barils par jour. C’est loin des deux millions de l’objectif officiel. Avant que les sanctions ne tombent, Chevron produisait 200.000 barils par jour.
    • Cela ne couvrirait pas les importations de brut russe en Europe (95.000 bpj à Rotterdam en octobre, 300.000 en Italie, entre autres), à titre de comparaison, mais ce serait un début. Reste à voir si la production générale de pétrole au Vénézuéla augmente aussi.

Le détail : les Etats-Unis ont besoin de pétrole.

  • Les sources indiquent à Reuters que le fait de donner cette autorisation à Chevron serait dans l’optique de « restaurer la démocratie dans le pays », et de s’attaquer aux ventes « illicites » de pétrole vénézuélien, « à des pays comme la Chine » (via la Malaisie, où le pétrole sanctionné est ré-étiqueté), pour mettre en place des ventes officielles « transparentes ». Et pas à cause de la crise des prix de l’énergie.
  • Mais à côté de ce discours, il est un fait établi que les Etats-Unis ont avant tout besoin de pétrole. Début octobre, l’OPEP a réduit les quotas de production – ce que Biden a voulu empêcher. Une fois la décision tombée, Biden a réagi au quart de tour, menaçant l’organisation de procès, et tapant dans les réserves américaines de pétrole pour contrebalancer une hausse du prix. Or : ces réserves sont maintenant à leur plus bas niveau en plus de quarante ans.
  • Aussi : selon cette autorisation qui doit être donnée à Chevron, PDVSA, partenaire de Chevron au Vénézuéla à travers différentes coentreprises, ne devrait pas toucher de recettes de la reprise des activités et des ventes. Difficile d’imaginer que Maduro accepte de telles conditions. L’exploitation du pétrole est un long sujet de discorde entre les deux pays, déjà au temps de Hugo Chávez.
  • Reste à voir ce que Chevron compte faire de ce pétrole. Le revendre à d’autres pays, comme l’Europe, ou l’acheminer tout droit vers les Etats-Unis ?

Conclusion : Même si l’Europe ne peut pas directement profiter du pétrole vénézuélien pour remplacer le brut russe, l’arrivée de plus de barils sur le marché ferait baisser les prix. Or, les quantités sont encore assez limitées. Si la Chine devait arrêter sa politique zéro-covid, ces 200.000 barils par jour ne feraient pas la différence, et les prix repartiraient à la hausse. Si la production vénézuélienne devait fortement augmenter et atteindre la cible (ce qui nécessiterait d’importants investissements), cela pourrait peut-être changer la donne.

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