Biden veut sauver sa peau : il puise dans les réserves de pétrole comme aucun président avant lui

Les États-Unis puisent massivement dans leurs réserves stratégiques de pétrole, dans le but de contrer les prix élevés. Une stratégie qui a ses effets, aussi sur la politique américaine.

Pourquoi est-ce important ?

Une puissante arme en temps de guerre ou de tempête (saison des ouragans), lorsque l'approvisionnement en pétrole est menacé, mais aussi une arme contre l'inflation. Les États-Unis ont des réserves stratégiques de pétrole (SPR) immenses, qui peuvent contenir plus de 720 millions de barils. Ce sont les plus importantes du monde.

Biden n’hésite pas à taper dans ces réserves. Après l’invasion de l’Ukraine par la Russie, dans un contexte de peurs de pénurie sur le marché, le président des États-Unis a décrété que 180 millions de barils seraient progressivement libérés. Ce mercredi, le mise sur le marché de 15 millions de barils devrait être annoncée, rapporte CNN Business. Depuis qu’il est entré en fonction, les réserves ont baissé de 36%. Au dernier recensement officiel disponible, effectué le 7 octobre, elles affichaient un niveau de 408 millions de barils. Soit le niveau le plus bas depuis 1984, et la chute la plus rapide jamais observée.

Et Biden n’est pas près de s’arrêter. D’abord, parce que cette libération de 180 millions de barils n’est pas encore arrivée à son terme (même s’il était prévu que cela se ferait en six mois, initialement). Ensuite, parce que Biden a déjà assuré qu’il serait disposé à relâcher encore plus de pétrole si cela était nécessaire. Or la réduction de la production de l’OPEP+, qui n’a pas plu aux Etats-Unis, donne encore des raisons à Biden d’utiliser ses réserves. Il avait immédiatement demandé de relâcher 10 millions de barils dans la foulée de la décision du cartel pétrolier.

Pour quels effets ?

Ces libérations de la production américaines auraient un impact sur le prix du pétrole, et donc, par prolongement, sur l’inflation. Le WTI, prix de référence du marché américain, est d’ailleurs redescendu à son niveau qui précédait l’annonce de l’OPEP, affichant 82,87 dollars. Le Brent, autre indice de référence, suit la même voie, mais n’a pas encore dépassé ce seuil. Il se tient à près de 90 dollars. Cela pourrait augurer d’autres baisses de la production, car l’OPEP viserait le baril à 100 dollars et joue ainsi avec l’offre.

La libération des réserves n’est toutefois pas le seul facteur qui peut expliquer la baisse des prix. Le marché s’attend surtout à une baisse de la demande à échelle mondiale qui s’explique par la peur d’une récession et d’un ralentissement de l’économie chinoise.

Mais pour Michael Tran, expert de l’énergie pour RBC Capital, Biden y serait bien pour quelque chose dans cette baisse des prix: « Ils ont fait un travail formidable pour atteindre leur objectif de faire baisser les prix de l’énergie », s’exprime-t-il, cité par CNN.

Même son de cloche chez Tom Kloza du Oil Price Information Service. Il explique que le prix n’a pas dépassé les sommets historiques, qui avaient été atteints en 2008. Peu après l’invasion de l’Ukraine, le prix du Brent avait atteint près de 130 dollars le baril. « Il faut en attribuer le mérite au SPR. L’administration est focalisée au laser sur l’essence », analyse-t-il.

L’essence, cruciale pour gagner les midterms

Le prix élevé de l’essence est un poison pour les consommateurs et l’économie américaine. Ils en attribuent la responsabilité à Biden, ce qui creuse davantage son impopularité.

Ces puisements dans les réserves sont aussi un moyen de rassurer les Américains et de tenter de ne pas perdre la face lors des élections de mi-mandat. Ces élections se tiennent début novembre et pourraient chambouler l’échiquier politique, si les démocrates venaient à perdre une des deux Chambres, voire les deux.

Une arme puissante, mais qui n’est pas éternelle

Les puisements dans les réserves peuvent avoir un effet sur les prix de l’essence, à court-terme, mais ils ne peuvent pas être utilisés éternellement. Une réserve qui n’est pas assez remplie limite les capacités d’un Etat à faire face à d’éventuels chocs futurs. Cela pourrait même davantage stresser le marché.

Le gouvernement envisage d’ailleurs de remplir les réserves à nouveau. Mais pas tout de suite : le prix du WTI doit d’abord atteindre entre 67 et 72 dollars, soit perdre encore 10 voire 15 dollars. Biden devrait l’annoncer dans son annonce de ce mercredi. Il s’agirait également d’un moyen de stabiliser les prix, lorsqu’ils baissent. Un argument qui se veut rassurant pour les compagnies pétrolières.

Avec un marché qui reste tendu, la question est de savoir si ces prix planchers seront atteints. Le président pourrait bien être contraint de puiser longtemps avant d’y arriver.

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