Pourquoi des postes de police chinois s’installent-ils partout en Europe ?

Il y aurait au moins 26 postes de police chinois en Europe qui tentent de persuader les Chinois émigrés de rentrer au pays… pour y être jugés.

C’est l’Irish Times qui a consacré un article entier, dimanche dernier, à la question suivante : pourquoi y a-t-il un poste de police chinois dans la rue branchée de Capel à Dublin ? Le bureau, niché entre deux restaurants asiatiques, s’appelle le Fuzhou Overseas Police Service Station, ou poste de police d’outre-mer de Fuzhou.

Fuzhou est la capitale de la province chinoise du Fujian, une région que traditionnellement beaucoup de personnes quittent pour émigrer à l’étranger. Un peu moins de 8 millions de personnes vivent dans la métropole. Le poste de police en Irlande a été initialement ouvert par les forces de sécurité de Fuzhou pour aider les Chinois de l’étranger à régler toutes sortes de questions administratives, comme le renouvellement des permis de conduire, a pu découvrir le journal irlandais.

Selon la police de Fuzhou, 30 postes de police étrangers ont depuis été ouverts dans 21 pays, principalement occidentaux. L’Europe en compterait au moins 26. En Belgique, aucun poste de police chinois n’a été trouvé pour l’instant. Or, selon un rapport de Safeguard Defenders, 54 postes de ce type existeraient déjà dans au moins 30 pays et sur cinq continents. Outre Fuzhou, le district de Qintian conserverait également des succursales et au moins 10 provinces chinoises auraient reçu l’autorisation de Pékin d’ouvrir leurs propres postes.

Faire pression sur les suspects par l’intermédiaire de la famille et des amis en Chine

Toutefois, les militants des droits de l’homme craignent que ces postes de police ne soient utilisés pour influencer et contrôler les communautés chinoises à l’étranger, depuis la Chine. Selon le rapport de Safeguard Defenders, ces bureaux servent un « objectif sinistre et totalement illégal ». Il semblerait que la police chinoise utilise ces bureaux pour convaincre les Chinois émigrés de rentrer dans leur pays.

Les Chinois coupables de délits tels que la fraude sur Internet seraient approchés par des volontaires des postes de police étrangers. Ils passaient ensuite parfois des semaines à les « persuader » de retourner en Chine pour y être poursuivis.

La Chine préfère ne pas engager de procédures d’extradition pour les criminels dans les pays occidentaux, car le processus serait trop complexe. Par conséquent, la police préfère utiliser les amis pour contacter et convaincre les gens. Dans le processus, selon Safeguard Defenders, les membres de la famille et les amis seraient régulièrement soumis à un chantage en Chine pour faire pression sur la personne en question. Par exemple, les membres de la famille auront plus de mal à trouver un emploi ou une école pour leurs enfants en Chine si le suspect ne veut pas coopérer.

La question est donc de savoir si la police chinoise utilisera ces tactiques pour faire pression sur les ressortissants chinois qui se trouvent à l’étranger et qui sont critiques envers le régime, afin qu’ils se rendent en Chine et comparaissent devant un tribunal. La loi sur la sécurité nationale de Hong Kong, conçue pour limiter la liberté d’expression dans la métropole, ne s’appliquerait ainsi pas seulement sur le territoire chinois mais à toute personne dans le monde.

« Pas de policiers chinois, seulement des volontaires »

Les services de sécurité irlandais sont conscients de la présence du poste de police de Dublin. Cependant, la police irlandaise ne sait pas exactement comment gérer la situation et si le bureau est illégal ou non. « C’est un peu nouveau pour être honnête. Après tout, il n’y a pas de policiers chinois dans la station, seulement des volontaires », a déclaré une source anonyme au sein des services de sécurité irlandais au Irish Times.

Au total, depuis avril 2021, les forces de police chinoises auraient réussi à « convaincre » à distance 230.000 personnes de rentrer en Chine. La plupart d’entre eux auraient pris part à des formes de fraude ciblant des Chinois. Quelque 54.000 d’entre eux auraient résidé au Myanmar.

(CP)

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