Le président d’Engie : « Sans les importations de gaz russe, l’Europe sera à court de 50% de gaz, quoi qu’il arrive »

Jean-Pierre Clamadieu, président du géant de l’énergie Engie, confirme ce que l’on entend notamment en Allemagne : un boycott du gaz russe par l’UE aurait des conséquences considérables pour les citoyens et les entreprises européens.

Peu de personnes ont une meilleure compréhension des besoins en gaz de l’Europe que M. Clamadieu, car Engie est un importateur majeur de gaz russe, acheminé par les gazoducs de Gazprom. Si l’Europe devait imposer un embargo sur le gaz russe en guise de sanction pour la guerre russe en Ukraine, cela aurait de graves conséquences économiques pour l’UE, a-t-il averti dans une interview accordée à Radio Classique.

Pénurie de gaz

« Ce que nous devons mettre en balance aujourd’hui, ce sont toutes les raisons morales et politiques qui militent en faveur de nouvelles sanctions contre la Russie, par rapport à l’impact massif qu’aurait un arrêt des importations de gaz russe sur l’économie européenne », a déclaré M. Clamadieu, ajoutant que le monde politique est bien conscient du dilemme.

Le président d’Engie la chiffre : « Si les importations de gaz russe étaient arrêtées, nous pourrions probablement en remplacer environ la moitié, mais le reste devrait être obtenu à très court terme, ou compensé par une réduction de la consommation, et notamment dans les secteurs industriels. »

Une telle pénurie d’énergie entraînera donc très certainement des plans d’extinction, les entreprises se voyant imposer des restrictions de volume, ce qui aura bien sûr un impact sévère sur leur production. Le gouvernement allemand se prépare déjà à un éventuel rationnement du gaz.

L’impact social est si important qu’un embargo sur le gaz ne sera jamais une décision technique, mais toujours une décision politique, a souligné M. Clamadieu, qui espère que l’UE continuera à parler d’une seule voix, même si la situation énergétique diffère d’un pays à l’autre, « car ensemble nous avons plus de poids ».

Hiver

Les installations de stockage de gaz naturel en France sont actuellement remplies à 20 %, ce qui, selon M. Clamadieu, est un pourcentage normal pour cette période de l’année. Avec un temps plus doux dans les jours et semaines à venir, il y aura un surplus de gaz, qui pourra être utilisé pour reconstituer les stocks pour l’hiver prochain. Il s’attend également à ce que des cargaisons record de gaz naturel liquéfié (GNL) arrivent en Europe ce mois-ci.

Les préparatifs pour l’automne, lorsque l’Europe voudra être moins dépendante de la Russie pour son gaz naturel, peuvent donc commencer. Clamadieu : « Ce qui compte désormais, c’est de reconstituer les stocks de gaz pour l’hiver prochain. » Et la France a commencé avec le GNL américain. Le gaz de schiste tant décrié.

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