La République centrafricaine prête à accueillir 10.000 soldats russes

Le régime centrafricain est globalement sous le contrôle des mercenaires et des « conseillers » venus de Russie, qui noyautent l’armée et exploitent les ressources. Un vrai néo-colonialisme, bien plus prédateur que tout ce que Poutine ou les gouvernements locaux pourraient mettre sur le dos des Occidentaux au XXIe siècle. Mais Bangui veut encore plus de présence russe.

Pourquoi est-ce important ?

La fameuse "opération spéciale" de Vladimir Poutine est un échec cuisant que l'armée russe ne peut plus gagner, même si la guerre est loin de s'achever. Mais la stratégie russe en Afrique, elle, a porté ses fruits, et le Kremlin a su bâtir une présence sur le contient qui pourrait devenir durable.

5 à 10.000 soldats russes

Dans l’actualité : la présence militaire russe dans certains pays d’Afrique tenait du secret de polichinelle, même si elle passait encore largement par des « conseillers en sécurité » et des mercenaires, les troupes de Wagner en tête.

Mais elle pourrait devenir bien plus officielle. Dans un entretien publié le 29 mai par le quotidien russe Izvestia, ambassadeur centrafricain en Russie Léon Dodonu-Punagaza a appelé de ses voeux l’implantation d’une base militaire russe dans son pays.

« Notre pays a été le premier du continent africain à résister aux Français. Mais aujourd’hui, nous avons besoin d’une base militaire russe, où des militaires russes seraient présents à hauteur de 5.000 à 10.000 hommes. D’ailleurs, en cas de besoin, ils pourraient être déployés dans d’autres pays. […] Certains pays ne sont pas satisfaits de cette évolution. Nous l’avons vu avec l’exemple de la France, qui a été extrêmement indignée par les récentes livraisons de 6 avions militaires par la Russie. Mais c’est leur affaire, car notre coopération avec les Russes se poursuivra. »

Léon Dodonu-Punagaza

Ça n’est bien sûr là qu’une déclaration d’intention maquillée en invitation. Mais ça serait une suite logique de l’implication russe en Afrique. Selon le média spécialisé Opex360, la question pourrait être examinée au second sommet Russie-Afrique, qui sera organisé à Saint-Pétersbourg en juillet prochain. Bien qu’on puisse se demander où Poutine va trouver des milliers de soldats réguliers à mettre en garnison en Afrique alors que le front réclame du sang frais en Ukraine.

La nouvelle puissance prédatrice et coloniale

  • Jusqu’ici, la présence russe sur le sol africain se faisait surtout via les mercenaires de Wagner : en République centrafricaine, ceux-ci assurent la sécurité rapprochée de l’État et sécurisent – parfois dans un déchainement de violence – l’exploitation et l’acheminement des ressources naturelles, comme l’or et le diamant. Une stratégie que les mercenaires aimeraient étendre, comme une véritable start-up de l’usage de la brutalité.
  • Moscou livre aussi des armes, comme six avions de combat légers Aero L-39 à la Centrafrique, mais aussi des milliers d’armes légères et des systèmes antiaériens, accompagnés de formateurs russes qui ont une certaine tendance à rester sur place.
  • Selon le Service européen de l’action extérieure, le service diplomatique de l’UE, les forces armées de la République centrafricaine sont peu ou prou sous commandement russe.
  • On n’en est pas encore là, mais c’est la même tendance que l’on observe dans d’autres pays d’Afrique tels que l’Angola, la Guinée, et plus récemment le Mali, où la nouvelle junte militaire au pouvoir a mis fin à toute collaboration militaire avec la France pour accueillir Wagner à bras ouverts.
  • La Russie en profite pour ressusciter les positions anti-impérialistes qu’adoptait à l’époque l’URSS en Afrique. Et il y aurait certes beaucoup à écrire sur les relations entre les anciennes puissances coloniales et les pays africains, mais en plaçant sous son joug des armées entières tout en exploitant directement les ressources locales, le tout en faisant preuve de la plus grande violence, la Russie se comporte en fait comme la nouvelle puissance coloniale du XXIe siècle.
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