Ce qui reste de Jack Ma est complètement détruit par les médias d’État chinois

Un documentaire sur les scandales qui secouent le monde des affaires chinois met à nouveau la pression sur les vestiges de l’empire du milliardaire de la technologie Jack Ma.

Un documentaire de la télévision d’État chinoise CCTV révèle un énorme scandale de corruption dans la ville de Hangzhou, dans la province orientale de Zhejiang. C’est le cinquième volet d’une série intitulée « Tolérance zéro », qui dépeint les conséquences de la campagne anticorruption du président chinois Xi.

CCTV estime que certaines entreprises privées de Hangzhou se sont rendues coupables de corruption d’un (ancien) chef de la branche locale du Parti communiste. Cela aurait permis aux entreprises de bénéficier d’avantages dans l’achat de biens immobiliers, écrit le Financial Times.

Bien qu’Alibaba et Ant Group, deux sociétés fondées par le célèbre entrepreneur chinois et milliardaire de la technologie Jack Ma, ne soient pas nommément mentionnées dans le documentaire, cette dernière est clairement la principale partie impliquée dans le scandale. Ant Group aurait acheté deux biens immobiliers à Hangzhou en 2019 avec des rabais importants. En outre, la société aurait également investi dans des sociétés de paiement appartenant au frère du responsable du Parti cité dans le rapport.

De nouveau sous le microscope de Pékin

Que ces allégations soient fondées ou non n’est pas ce qui importe. Le documentaire braque à nouveau les projecteurs chinois sur Ant Group, filiale d’Alibaba, et sur Jack Ma lui-même. La fintech a été plusieurs fois placée sous le microscope du gouvernement chinois ces dernières années.

Fin 2020, Ant Group a été contrainte de mettre fin à une introduction en bourse prévue à Hong Kong et à Shanghai pour un montant de 34 milliards de dollars américains. Il s’agissait d’un signal indiquant qu’aucune entreprise privée en Chine ne devait avoir de trop grandes ambitions sans l’autorisation explicite du gouvernement central de Pékin.

En avril 2021, Ant Group a de nouveau été contrainte de subir une restructuration majeure par le gouvernement. L’entreprise avait été invitée à être plus transparente vis-à-vis du gouvernement et à suivre des règles strictes en matière de capital. Le même mois, la société mère, Alibaba, a été giflée par Pékin avec une amende record de 2,3 milliards d’euros.

Dans les semaines qui ont suivi, Jack Ma s’est discrètement retiré de la vie publique. Dans le même temps, Ant Group a décidé de coopérer avec le gouvernement chinois en transférant en masse les données des citoyens. Elles seront utilisées pour s’attaquer au célèbre système chinois de notation du crédit, dans le cadre duquel les infractions à la loi privent les gens de l’accès aux prêts et autres facilités financières.

Le dernier coup porté à Ant Group, pour l’instant, date de la semaine dernière. Sans explication, un gestionnaire d’actifs appartenant à l’État s’est retiré d’un accord visant à injecter des actifs dans la branche de prêt de la fintech, rapporte le Financial Times.

Écraser le symbole de l’esprit d’entreprise en Chine

Alors que le documentaire circule en Chine, Jack Ma s’efforce de continuer à faire profil bas. Ant Group et Alibaba se préparent discrètement à la bataille juridique qui ne tardera sans doute pas à éclater à propos de ce scandale. La grande ambition de Xi Jinping pour l’avenir de la Chine est d’installer une « prospérité commune » où tout lien entre le capital et le pouvoir politique doit disparaître.

Jack Ma, entrepreneur dans l’âme, est un symbole des innovations technologiques gigantesques que la Chine a pu réaliser au cours des dernières décennies. Mais il est aussi un symbole du côté entrepreneurial de la société chinoise, qui, par ailleurs, est à l’aise avec les marchés libres du monde occidental. C’est un symbole que Xi devra diminuer s’il veut réaliser ses ambitions pour la Chine.

« L’ascension et la chute de Ant Group incarnent la relation inégale entre les entreprises et la politique en Chine », a déclaré Nie Huihua, professeur à l’université Renmin de Pékin, au Financial Times. « Elle devra maintenant en payer le prix ».

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