Le Pérou a annoncé ce week-end que le nombre de décès survenus à cause du Covid-19 a plus que doublé. Pourtant le pays ne semble pas plus particulièrement touché que ses voisins. Alors, comment expliquer que le nombre des décès ait doublé d’un seul coup?
Pour avoir une image plus complète de la pandémie, le Pérou a revu totalement les chiffres de mortalité du coronavirus. Jusqu’ici, seuls les cas confirmés étaient comptés et non les cas suspects. De ce fait, le Pérou ne totalisait ce week-end que 69.342 morts pour 33 millions d’habitants, soit 2,1 morts par 1.000 habitants.
Mais le gouvernement péruvien a décidé de revoir ce chiffre en se basant sur les décès excédentaires depuis le début de la pandémie. Pour cela, les chiffres de la mortalité pour cette période, toutes causes confondues, ont été comparés avec les chiffres habituels. Tous les morts qui dépassaient le niveau normal ont été rattachés à la pandémie.
Et cela a fait énormément grimper le compteur, induisant que de nombreux décès liés au Covid-19 n’avaient pas été enregistrés. Aujourd’hui, le Pérou compte plus de 180.000 morts à cause du coronavirus, soit 5,4 morts par 1.000 habitants. Loin devant la Hongrie, qui détenait jusque là le record de mortalité avec 3 morts par 1.000 habitants.
Que se passe-t-il au Pérou?
Le Pérou commence à voir la fin de sa troisième vague de coronavirus. Selon les chiffres officiels, le pays compte moins de contaminations que ses voisins, la Colombie, le Chili ou encore le Brésil. Au plus fort de la troisième vague, un peu plus de 10.000 cas quotidiens étaient enregistrés. Même un pays comme la Belgique a observé des contaminations quotidiennes plus importantes à l’automne 2020.
Alors, comment expliquer qu’il y ait eu autant de morts dans le pays? Plusieurs raisons peuvent être évoquées:
- Des services de santé débordés, qui n’ont pas su prendre en charge tous les malades qui avaient besoin de soins particuliers.
- Un manque d’oxygène, pourtant indispensable pour aider les personnes les plus touchées par la maladie.
- Les contaminations non comptées: les Péruviens n’ont pas d’autre solution que de se rendre au marché plusieurs fois par semaine pour acheter leur nourriture, explique la BBC. En outre, les logements sont également surpeuplés. Le virus avait tous les éléments pour circuler dans la population. Il y a clairement eu plus de contaminations que ce que les autorités sanitaires étaient capables d’enregistrer.
Toutefois, ces raisons sont très semblables dans le reste de l’Amérique du Sud. Cela n’explique pas entièrement cette mortalité bien plus haute que dans le reste de la région et du monde.
La méthode de calcul
Il est possible qu’en réalité, le Pérou ne compte pas vraiment plus de morts liés au Covid-19 que ces voisins. Tout réside dans la méthode de calcul. La preuve : quand le Pérou a changé la sienne, le nombre de décès a bondi d’un coup. Les pays voisins sous-estiment peut-être le nombre des décès.
Selon l’OMS, la surmortalité dans le monde en 2020 est deux fois plus importante que les décès enregistrés sous le label Covid. L’année dernière, 1,8 million de morts liés au coronavirus ont été annoncés, mais l’Organisation mondiale de la Santé compte 3 millions de décès de plus que le niveau mondial normal.
Le Pérou a décidé de changer sa méthode de calcul. Aujourd’hui, le pays compte également les décès des personnes ayant des symptômes du Covid-19, mais qui n’ont pas été testées, et les décès des personnes ayant eu un contact rapproché avec une personne testée positive.
Cela se rapproche de la méthode utilisée en Belgique. Rappelez-vous: au début de la pandémie, quand il n’y avait pas de tests pour tout le monde, de nombreux décès ont été labélisés ‘Covid-19’ sans avoir été prouvés par un test. Et cela poussait la mortalité belge bien au-dessus de celle de nos voisins. Et au final, les chiffres ont montré que la surmortalité belge n’était pas très différente de celle des Pays-Bas, de l’Espagne ou de l’Italie.
Pour aller plus loin:
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