Pourquoi l’expulsion de Chine des mines de bitcoins a rendu le secteur des cryptomonnaies encore plus polluant

Expulsés de Chine, les mineurs de cryptomonnaies sont allés là où l’énergie était la moins chère. Et bien souvent, c’est aussi là qu’elle est la moins propre. En outre, le secteur semble entretenir le flou sur sa consommation réelle d’énergie comme sur la part de renouvelable dans son approvisionnement. Une nouvelle étude s’alarme : la crypto serait en fait de plus en plus sale.

L’année passée, quand le gouvernement chinois a décidé de bannir de son territoire les activités de minage de cryptomonnaies, forçant les acteurs de cette industrie à l’exil, on aurait pu penser que cela aurait eu un impact positif sur les émissions de gaz à effet de serre. Les mines à cryptomonnaies consomment d’effarantes quantités d’énergie, et l’Empire du Milieu reste le premier consommateur de charbon, principalement dans ses centrales électriques. Mais c’est tout l’inverse qui s’est passé, selon une analyse publiée dans la revue Joule et partagée par The Verge.

Transhumance cryptographique

Les mineurs chinois pratiquaient en fait une certaine forme de transhumance : pendant les saisons humides, les mineurs pouvaient profiter de l’excès d’hydroélectricité dans les provinces du Sichuan et du Yunnan. Pendant la saison sèche, ils se déplaçaient généralement vers le Xinjiang et la Mongolie intérieure – où ils dépendaient principalement de l’électricité produite par les centrales au charbon. Quand la Chine a banni cette activité, en 2021, elle accueillait 70% de l’industrie mondiale des monnaies numériques. Mais les mineurs se sont exilés vers les sources d’énergie les moins chères – et les moins écologiques – disponibles.

Comme au Kazakhstan, un pays qui accueille 18% de l’activité cryptographique mondiale, un pays qui dépend aussi très fortement du charbon, mais qui en plus s’appuie principalement sur la houille, qui dégage encore plus de CO2 nuisible à la planète que les autres types de charbon. En outre, le pays abrite des centrales électriques moins efficaces, ce qui pourrait également avoir contribué à l’augmentation des émissions.

Presque deux fois moins d’énergie renouvelable en 2021

Les USA ont aussi accueilli une large part de l’industrie des cryptomonnaies après son bannissement de Chine, et ils représentent maintenant environ un tiers de l’activité mondiale du minage. Et si le gaz y est plus utilisé que le charbon, ce grand déménagement a quand même eu pour conséquence de réduire la part de l’énergie issue de sources renouvelables dans la quantité d’électricité consommée par les mines informatiques. Celle-ci est passée de 42% en 2020 à seulement 25% en août 2021, selon l’étude. Quant à la part de gaz naturel, elle a augmenté de 15 à 30% sur la même période.

La part des énergies « propres » ou renouvelables dans ce que consomment les mines à cryptomonnaies n’est guère facile à estimer, des études passées la situant tant à 40% qu’à 70%, en partie parce que les mineurs se déplaçaient de saison en saison, à la recherche des sources d’énergie les plus abordables. Le secteur lui-même semble parfois entretenir la confusion sur son impact réel sur les émissions de gaz à effet de serre.

Écran de fumée

Mais l’étude souligne les dangers qui se dessinent derrière ce flou, et en particulier celui que de vieilles centrales au gaz ou au charbon, obsolètes et très polluantes, soient maintenues en activité pour le seul usage des mineurs de crypto. Une industrie qui, aussi dématérialisé que soit son produit fini, n’en garde pas moins un réel impact sur le monde tangible. Cette tendance a également troublé certains membres du Congrès américain, qui ont demandé aux sociétés minières de divulguer leur consommation d’énergie et leurs émissions.

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