La DeFi: promesses et dangers de la « finance blockchainisée »

Le prestigieux hebdomadaire britannique The Economist se penche sur le phénomène de la finance décentralisée (DeFI). Certains observateurs y voient un signe de démocratisation des technologies émergentes nées avec le bitcoin.

Pourquoi est-ce important ?

Des développeurs informatiques s’ingénient à décentraliser tout ce que l'on fait en ligne. Un nombre croissant d'entre eux cherchent à reconstruire à la fois le système financier et l'économie d’Internet en utilisant des blockchains. L'objectif ultime est de remplacer les intermédiaires tels que les banques mondiales et les plateformes technologiques par des logiciels construits au sommet de réseaux qui renvoient la valeur qu'ils génèrent aux utilisateurs qui les possèdent et les gèrent.

Quasiment jour pour jour. Une couverture qui fera date. Six ans après avoir exploré la blockchain, ou comment « la technologie derrière le bitcoin allait changer le monde », The Economist invite le public à s’intéresser à l’essor d’un écosystème de services financiers connu sous le nom de finance décentralisée ou DeFi. « À l’heure où les gens vivent de plus en plus leur vie en ligne, la révolution crypto pourrait remodeler l’architecture de l’économie numérique », affirme le magazine britannique.

En voici les principaux éléments :

  • DeFi est l’une des trois tendances technologiques qui viennent perturber la finance, aux côtés des monnaies numériques des banques centrales (MNBC) et des autres grandes technologies qui s’immiscent dans les banques et les systèmes de paiement.
  • La DeFi a connu une croissance exponentielle et la valeur des instruments numériques y étant utilisés comme garantie est passée de presque zéro en 2018 à 90 milliards de dollars à ce jour.
  • La valeur des transactions réglées sur Ethereum, blockchain sur laquelle la plupart des applications DeFi sont construites, s’élevait au deuxième trimestre dernier à 2500 milliards de dollars. Un montant comparable aux opérations du géant des paiements Visa sur la même période.
  • Les applications DeFi se sont étendues pour inclure les cotations boursières, les plateformes de prêt et d’emprunt, les paiements, les produits dérivés, les assurances ; le tout en utilisant généralement des smart contracts (les contrats automatisés sur la blockchain).
  • De véritables innovations prennent forme au sein de la DeFi notamment dans le domaine des plateformes d’échange décentralisées, des stablecoins ou encore des protocoles de prêt.
  • La promesse d’un système financier à faible friction ne serait qu’un début. DeFi s’étend à des terrains plus ambitieux tels que les applications décentralisées (dapps) pour les jetons non fongibles (NFT) et le métavers décentralisé. Un métavers, ce concept de réalité alternative créée par ordinateur et hébergeant sa propre humanité, qui est construit ici sur des blockchains et des applications décentralisées permettrait aux gens d’utiliser leurs avatars numériques pour des services financiers, de divertissements ou commerciaux.

La DeFi comporte aussi de nombreux… défis

Certains des défis associés à la DeFi devront être relevés avant que l’adoption massive ne puisse décoller, notamment la réduction des frais d’utilisation, la diminution de la consommation énergétique des blockchains, la protection contre le blanchiment d’argent ou le financement du terrorisme, la responsabilité, la gouvernance, etc.

Sans oublier que malgré les revendications de décentralisation, certains développeurs et propriétaires d’applications possèdent une influence disproportionnée sur les systèmes DeFi. Et le magazine ne l’évoque pas, mais la cybersécurité reste un danger inhérent à ces protocoles non audités (encore ce dimanche un protocole de financement décentralisé inter-chaînes, pNetwork, a annoncé le vol de plus de 12 millions de dollars en jetons numériques).

Pour réussir, comme le président de la SEC, Gary Gensler, l’a récemment souligné, DeFi doit s’intégrer au système financier et juridique conventionnel.

La finance entre dans une nouvelle ère dans laquelle les plateformes technologiques, les grands gouvernements et la DeFi vont se concurrencer et interagir.

« Chacun présente une architecture technique et une idéologie sur la façon dont l’économie devrait être gérée. Comme avec Internet dans les années 1990, personne ne sait où s’arrêtera la révolution. Mais elle risque de transformer le fonctionnement de l’argent et, ce faisant, l’ensemble du monde numérique », ponctue The Economist.

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