En cas d’indépendance de l’Ecosse, le Royaume-Uni songe à déplacer ses sous-marins nucléaires… en France

Le Royaume-Uni a élaboré des plans d’urgence secrets pour déplacer ses sous-marins nucléaires armés de missiles Trident en cas d’indépendance de l’Écosse. Les sous-marins opèrent actuellement depuis une base navale située sur la côte ouest de l’Écosse. Les sous-marins pourraient être transférés aux États-Unis ou même en France, rapporte le Financial Times.

Pourquoi est-ce important ?

Le gouvernement britannique est fermement opposé à l'indépendance de l'Écosse ; en effet, la perspective d'un éventuel éclatement de l'Union met Downing Street sur la défensive. Par exemple, le Scottish National Party (SNP), qui est revenu au pouvoir en mai, a promis d'interdire toutes les armes nucléaires dans une Écosse indépendante. Y compris celles de la Grande-Bretagne.

Plusieurs hauts fonctionnaires ont déclaré au Financial Times que la relocalisation des sous-marins n’est qu’un des choix difficiles que les ministres britanniques devront faire après une éventuelle sécession de l’Écosse.

L' »exercice de réflexion nucléaire » aurait eu lieu récemment. Il a conclu que le programme Trident aurait trois options après la formation d’un État écossais indépendant antinucléaire.

Trois options

Première option : loger les sous-marins ailleurs dans les îles britanniques. La base de Devonport de la Royal Navy est citée comme le lieu le plus probable pour remplacer Faslane, l’emplacement actuel sur la côte ouest de l’Écosse.
La deuxième option consiste à déplacer les bases nucléaires du Royaume-Uni vers un allié, tel que les États-Unis. Dans cette feuille de route, un expert en défense mentionne Kings Bay, dans l’État américain de Géorgie, qui est déjà le lieu de repli de la flotte atlantique de sous-marins Trident de la marine américaine. Des représentants du gouvernement enquêteraient également sur la « piste française » : l’Île Longue en Bretagne comme base d’opérations pour les sous-marins nucléaires britanniques. Une partie importante de la défense britannique serait ainsi hébergée par l’ennemi historique…

La troisième option envisagée consiste pour le Royaume-Uni à louer à long terme les bases nucléaires de la Royal Navy sur leurs sites actuels de Faslane et de Coulport. Cela créerait un territoire britannique de facto à l’intérieur des frontières d’une Écosse nouvellement indépendante, selon des initiés. Un nouveau territoire britannique d’outre-mer devrait donc être négocié au sein d’un État écossais indépendant, surnommé « Gibraltar nucléaire » par un initié.

Coût : 3 à 4 milliards de livres

Une analyse du think tank Royal United Services Institute, rédigée juste avant le référendum de 2014 sur l’indépendance de l’Écosse, estime le coût d’une telle démarche entre 3 et 4 milliards de livres.

Un transfert des bases vers les États-Unis est l’option préférée du Trésor britannique, car il ne nécessiterait qu’un investissement en capital minimal. Mais garder les missiles Trident hors de Grande-Bretagne pourrait être politiquement difficile, car cela serait probablement considéré comme une menace pour la souveraineté de la défense.

L’option « Gibraltar nucléaire », selon laquelle les bases resteraient dans une Écosse indépendante mais seraient louées par le Royaume-Uni, est considérée par certains responsables gouvernementaux comme la plus réaliste. En effet, le programme Trident ne devrait pas être modifié immédiatement après l’indépendance de l’Écosse.

Le ministère britannique de la Défense a refusé de commenter officiellement les plans d’urgence en cas de sécession de l’Écosse.

Fortement opposé aux armes nucléaires

Interrogé sur les plans d’urgence du Royaume-Uni, le gouvernement écossais a déclaré qu’il était fermement opposé à la possession, la menace et l’utilisation d’armes nucléaires et qu’il s’engageait à retirer complètement et en toute sécurité les missiles Trident d’Écosse.

Les négociations visant à conserver les bases pour une période plus longue après l’indépendance risquent de se heurter à une forte opposition du SNP, qui a fait du désarmement nucléaire l’un de ses principaux combats – sans jeu de mots – depuis des décennies.

Par exemple, avant le référendum de 2014, le SNP a déclaré qu’une Écosse indépendante donnerait la priorité au retrait sûr des armes nucléaires dès que possible. « Ce serait en vue du retrait des Trident (les missiles, ndlr) au cours du premier mandat du Parlement écossais après l’indépendance », avait-on alors entendu.

Les experts ont suggéré que ce calendrier pourrait être assoupli si les pourparlers entre une Écosse indépendante et le Royaume-Uni se poursuivent effectivement sur des questions telles que les dispositions monétaires, la responsabilité de la dette nationale et la gestion de la nouvelle frontière entre l’Angleterre et l’Écosse.

Toutefois, un compromis à long terme ou extraterritorial sur la base de missiles nucléaires irait à l’encontre des convictions les plus profondes de la Première ministre écossaise Nicola Sturgeon. Elle a rejoint la Campagne pour le désarmement nucléaire alors qu’elle était adolescente avant de rejoindre le SNP. « Comme beaucoup d’autres Écossais, j’ai toujours été consternée que l’arsenal nucléaire de la Grande-Bretagne soit logé dans mon arrière-cour », a écrit Sturgeon en 2019.

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