La classe moyenne s’érode, et c’est une menace pour nos pays

Dans son nouveau rapport, l’OCDE sonne l’alarme : les classes moyennes des pays développés sont en déclin. Au cours de la dernière décennie, les actifs à revenu moyen ont vu leur niveau de vie stagner. Leur pouvoir d’achat commence même à baisser. En outre, leur emploi est de plus en plus précaire. Cette érosion menace d’être une source d’instabilité politique, prévient l’organisation. 

Elle définit la classe moyenne comme le groupe de la population avec un revenu compris dans une fourchette allant de 75 % à 200 % du revenu médian (50 % des personnes gagnent moins que ce revenu, et les autres 50 % gagnent plus) d’un pays. Cette population est largement majoritaire dans les pays de l’OCDE, mais elle a commencé à se réduire. En 2015, on y retrouvait 61 % de la population des pays de l’OCDE , mais en 1985, cette proportion était de 64 %.

La stagnation des revenus

Les Etats-Unis sont l’un des pays les plus touchés par ce déclin. De nos jours, la classe moyenne n’y représente plus que 51 % de la population. En l’espace de 30 ans, elle s’est érodée de 5 points de pourcentage.

L’explication est simple : les salaires ont quasiment stagné au cours de la dernière décennie. D’un autre côté, les coûts du logement et de l’éducation ont augmenté. Le logement représente désormais un tiers du revenu disponible de ces ménages, contre un quart dans les années nonante. Et dans certains pays, comme aux Etats-Unis, les dépenses de soins de santé ont explosé.

Le pouvoir d’achat a donc décliné, et il devient de plus en plus difficile de maintenir le niveau de vie traditionnellement associé à la classe moyenne. Avoir une qualification professionnelle moyenne ne garantit plus de faire partie de cette classe. Et de nos jours, pour qu’un foyer bénéficie de ce statut, les deux parents doivent travailler, ce qui n’était pas il y a une trentaine d’années.

Un emploi de plus en plus précaire

De plus, 1 travailleur sur 6 de la classe moyenne est menacé de perdre son emploi, en raison de l’automatisation croissante. Dans la classe des hauts revenus, seuls 10 % des travailleurs sont exposés à ce risque.

En outre, le niveau de vie de la classe moyenne est de plus en plus difficile à maintenir. Il est douteux que les enfants de cette génération pourront tous conserver le style de vie de leurs parents, alors même qu’ils sont plus éduqués qu’eux. 60 % des parents de la classe moyenne pensent que leurs enfants auront un niveau de vie inférieur au leur.

En effet, le marché du travail « s’est polarisé : les emplois intermédiaires menacés par la robotisation déclinent, tandis que la part des postes exigeant des compétences élevées augmente », explique Stefano Scarpetta, spécialiste de l’emploi à l’OCDE.

Un risque politique que les gouvernements devront prendre en compte

Cette dégradation risque d’alimenter les frustrations et de nourrir la défiance croissante à l’égard des institutions que l’on constate déjà. « La classe moyenne est le centre de gravité de nos démocraties comme de nos économies », précise M. Scarpetta. Elle est nécessaire pour la stabilité de la société, la croissance, et le bien-être collectif. Une érosion de cette catégorie pourrait déclencher une hausse de la pauvreté, de la criminalité, et d’un rejet plus massif du système.

Selon lui, il est nécessaire de modifier la fiscalité pour transférer une plus grande part du fardeau fiscal vers le capital, afin de favoriser les emplois, et d’aider les personnes les plus vulnérables à s’adapter aux mutations technologiques. De même, les gouvernements devront intervenir pour augmenter l’offre de logements dans les grandes villes.

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