Débat enflammé sur la crypto en Belgique: « C’est un système de Ponzi, profitez-en tant que vous le pouvez »

L’économiste Geert Noels a débattu avec un groupe de pionniers européens de la cryptomonnaie mercredi. L’affrontement a bien symbolisé les divisions au sein du grand public autour du sujet.

Mercredi soir, l’agence de conseil en communication Duval Academy Union a organisé la « 5e conférence« , un événement sectoriel dédié au Web3, à la blockchain et aux cryptomonnaies. Selon elle, cette activité avait pour but d’initier le « dialogue indispensable » sur cette « innovation évolutive et perturbatrice ».

La Duval Academy a sans aucun doute atteint son objectif. Au cours d’une table ronde sur le thème « Le Web3 est-il le nouvel argent ? », les orateurs invités se sont livrés à un débat animé. Les pionniers de la cryptomonnaie Pieter Aerts (Arkadiko Finance), Michiel Lescrauwaet (Tioga Capital Partners) et Christophe Reynaert (Moonbag Capital) ont discuté avec la députée européenne Assita Kanko. Cette dernière est l’une des architectes d’un nouveau projet de loi européen sur les cryptomonnaies qui vise à étendre la règle du travel rule à pratiquement toutes les transactions de devises numériques.

L’économiste Geert Noels était également présent par appel vidéo, et sa vision ne pourrait pas être plus en désaccord avec celle des pionniers de la crypto qui ont débattu avec lui. Seule l’eurodéputée Assita Kanko a réussi à trouver un équilibre entre ces deux visions contradictoires avec son plaidoyer pour une meilleure régulation du secteur.

La crypto, comme une communauté religieuse qui doute

« J’ai parfois l’impression de me trouver devant une communauté religieuse lorsque je parle à des fanatiques de la crypto », commence M. Noels. « Des personnes qui prennent leur foi très au sérieux pour justifier leurs objectifs, mais qui n’en sont pas encore sûres et qui ont donc en fait peur d’engager la discussion avec des non-croyants. La crypto a aussi un énorme problème d’énergie et il faut le reconnaître. »

M. Noels a ensuite asséné un nouveau coup de massue au public déconcerté qui était venu à l’événement en pensant apprendre quelque chose sur la technologie décentralisée. « La crypto est en fait un grand système de Ponzi. Profitez en tant que vous le pouvez », a conclu M. Noels devant le groupe de cryptoentrepreneurs.

L’économiste anversois avait également quelque chose à dire sur le Web3, l’évolution décentralisée de l’internet. Il estime que « cette technologie est effectivement innovante, mais n’a pas encore produit la percée promise depuis longtemps« .

« Vous n’avez pas fait assez de recherches sur la technologie »

Certains des cryptoentrepreneurs ont ensuite tenté de réfuter la thèse de Noels, à la demande expresse du public présent.

Michiel Lescrauwaet a déclaré que les crypto sont en effet souvent comparées à des systèmes de Ponzi et des bulles célèbres, comme la « tulipomanie » aux Pays-Bas, au XVIIe siècle. Toutefois, ces systèmes de Ponzi n’auraient jamais réussi à transférer de grandes quantités de valeur et à effectuer d’énormes transactions, comme l’ont clairement fait les cryptomonnaies. Noels a opposé à cela l’affirmation selon laquelle, pendant l’engouement démesuré pour les tulipes, d’énormes capitaux pouvaient effectivement être déplacés. L’argument de l’entrepreneur en cryptomonnaie a donc été efficacement aplati.

Lescrauwaet a alors adopté une approche différente. L’idée que les crypto ne valent rien et constituent une forme de fraude n’est pas défendable, car presque rien n’a de valeur intrinsèque. L’argent ne tirerait sa valeur que de la valeur que les gens lui donnent collectivement. « C’est exact, mais pour cette première déclaration, vous auriez dû prendre un meilleur exemple », a répondu Noels.

Le web3-entrepreneur Pieter Aerts, alors quelque peu irrité, a également répondu : « Cela fait 5 à 6 ans que j’entends ce genre de déclarations. Si vous pensez que la crypto est un système de Ponzi, vous penserez naturellement que toute l’énergie utilisée par la crypto est un gaspillage. Si vous êtes vraiment convaincu que la crypto est une fraude, c’est que vous n’avez pas suffisamment étudié la technologie. »

« Bitcoin ne fait aucune promesse »

Enfin, la députée européenne Assita Kanko a pris la parole. Elle a habilement cherché le juste milieu dans ce débat enflammé et a ainsi pu formuler un argument raisonnable en faveur de son projet de nouvelle législation sur les cryptomonnaies. « Pourquoi les fraudes à la Ponzi se produisent-elles réellement ? Parce qu’il n’y a pas de bonne législation dans un certain secteur financier. Avec des règles claires pour les crypto, nous ferons en sorte que les fraudes à la Ponzi disparaissent et il sera plus sûr pour tout le monde de se lancer et de développer cette technologie », a déclaré Mme Kanko.

Jean-Luc Verhelst, auteur du livre Bitcoin, the Blockchain and Beyond, a ensuite donné une autre conférence sur les stablecoins, ou les cryptomonnaies qui tentent de suivre le cours d’une devise fiduciaire. Au cours de sa présentation, il est revenu sur ce débat. « Les fraudes à la Ponzi, d’ailleurs, sont un type de fraude où il faut constamment trouver de nouveaux investisseurs pour pouvoir rembourser les investissements des premiers investisseurs. Ce n’est certainement pas le cas avec la crypto et le bitcoin. Le bitcoin ne vous promet rien. Les investisseurs l’achètent et sont convaincus par le fonctionnement du système que le prix va augmenter. »

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