Un Black Friday record, mais un arbre qui cache la forêt pour l’économie américaine

Le Black Friday 2022 est synonyme de recettes record pour les entreprises américaines. Mais il y a un mais : il s’agit d’un nombre absolu, qui n’est pas ajusté à l’inflation. Cela montre que les volumes des ventes n’ont pas augmenté dans la même proportion. Un signe que la demande est en baisse.

Pourquoi est-ce important ?

Les consommateurs sont l'épine dorsale de l'économie. Si leur demande pour des biens est en baisse, surtout lors des périodes de dépenses importantes, on peut parler d'un indicateur de récession.

Dans l’actu : Le temps du bilan pour le Black Friday, traditionnel rendez-vous de fortes réductions et d’importants achats.

  • Selon un rapport d’Adobe Analytics, cité par CNN Business, les ventes en ligne dans le cadre du Black Friday ont rapporté 9,12 milliards de dollars aux Etats-Unis. Il s’agit d’un record. C’est 2,3% de plus qu’en 2021.
  • Selon Adobe, la plus forte part de la hausse vient des appareils électroniques, des appareils pour une maison « intelligente », des jouets et des équipements sportifs.

Le détail : un nombre « absolu ».

  • La hausse de 2021 à 2022 n’est pas ajustée à l’inflation. Il s’agit ici du montant total récolté.
  • La hausse du chiffre d’affaires total est donc surtout à imputer à la hausse des prix. Entre octobre 2021 et 2022 par exemple, les prix ont augmenté, en général, de 7,7% aux Etats-Unis. Or, comme les recettes totales n’ont augmenté que de 2,3%, on peut en conclure que le nombre de produits vendus n’a lui pas augmenté dans les mêmes proportions, voire qu’il est en baisse.

L’essentiel : une baisse de la demande = un indicateur de récession.

  • Le Black Friday est un bon exemple pour prendre la température pour les fêtes de fin d’année. De nombreuses personnes en profitent pour faire leurs achats pour Noël, qui est aussi un important moment de shopping. Un Black Friday mitigé n’augure ainsi rien de bon pour les ventes de toute la fin de l’année.
  • Surtout que le rapport montre aussi que les consommateurs sont revenus au schéma classique des années d’avant la pandémie, c’est-à-dire acheter aux dates clé de la période des fêtes. En 2020 et 2022, ils avançaient les achats et les grands distributeurs avançaient les promotions, à cause des nombreux retards sur la chaine d’approvisionnement.
  • Amazon, géant de l’e-commerce, avait d’ailleurs senti le sang : pile avant le Black Friday et les fêtes de fin d’année, le groupe a annoncé se séparer de 10.000 personnes, signe qu’il craignait une chute de la demande.

Zoom avant : épargne et crédit rongés.

  • Il y a le symptôme d’une autre maladie qui peut se lire dans les dépenses pour ce Black Friday.
  • « Nous voyons beaucoup de gens s’appuyer sur l’épargne et l’endettement pour se permettre un grand nombre de ces achats. Plus encore que les cartes de crédit, nous voyons beaucoup de gens se tourner vers les services « Achetez maintenant, payez plus tard » (BNPL), qui est une sorte de nouvelle forme de dette que les consommateurs américains adoptent vraiment. » C’est ce qu’explique Claire Tassin, analyste pour Morning Consult, à CNN.
  • Les paiements par BNPL ont augmenté de 80%, par rapport à la semaine d’avant. Or, cette méthode de paiement a déjà souvent été pointée du doigt pour son manque de clarté et de contrôle : il pourrait s’agir d’un château de cartes selon des observateurs, à l’image des subprimes.
  • Les consommateurs doivent de plus en plus taper dans leurs épargnes (qui ont fortement augmenté durant la pandémie mais sont retombées depuis) : voilà le signe d’un appauvrissement de la population, ce qui n’est pas un bon signe pour l’économie non plus. Mais une bonne pour l’inflation.
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