Les banques centrales du monde entier sont en train de relever les taux d’intérêt afin d’endiguer l’inflation galopante. Toutefois, tout le monde n’est pas convaincu qu’il s’agit de la bonne façon de lutter contre la hausse des prix.
Ce mois-ci, la Banque centrale européenne va relever ses taux d’intérêt pour la première fois en onze ans. Ce faisant, la BCE rejoint une soixantaine d’autres banques centrales qui ont déjà pris des mesures similaires. La Réserve fédérale, par exemple, a augmenté les taux d’intérêt de 75 points de base le mois dernier.
Distorsions du côté de l’offre
Par de telles interventions, les banques centrales tentent de lutter contre la hausse de l’inflation. Dans la zone euro, la vie est devenue 8,6 % plus chère en juin. En augmentant les taux d’intérêt, il devient moins intéressant pour les ménages et les entreprises d’emprunter de l’argent, ce qui réduit le flux de capitaux vers l’économie. L’objectif est donc de mieux équilibrer la demande sur une offre limitée.
Paul Gambles, associé directeur de la société de conseil MBMG Group, note dans une interview accordée au site d’information américain CNBC que les hausses de taux d’intérêt ne serviront pas à grand-chose: « Les banques centrales tentent de freiner la demande, alors que l’inflation est principalement le résultat de distorsions du côté de l’offre », précise-t-il. « Cela rend plus difficile pour eux de contrôler durablement la dépréciation monétaire ».
Il critique, entre autres, la Réserve fédérale: « La Fed elle-même a reconnu que l’inflation élevée est le résultat de problèmes liés à l’offre. Pourtant, elle a décidé de relever les taux d’intérêt », dit-il. « L’ajustement de la politique monétaire est dans tous les cas une mauvaise solution à ce problème. »
Des chocs différents
D’autres « économistes non conventionnels » – que Gambles cite dans l’interview – tels que Stephen King, conseiller économique chez HSBC, ont également proposé des analyses qui suggèrent que l’inflation n’est pas due à un choc de demande ou d’offre uniquement, mais à une combinaison de ces chocs.
Selon des économistes tels que M. King, la pandémie, les perturbations des chaînes d’approvisionnement et la guerre entre la Russie et l’Ukraine, ainsi que les mesures de relance prises par les gouvernements et les politiques monétaires laxistes, ont tous contribué à la hausse de l’inflation.
Récession européenne et américaine
Enfin, plusieurs experts s’inquiètent de l’impact des hausses de taux d’intérêt sur la croissance économique. On craint une récession si les banques centrales tirent trop fort le frein à main. Aux États-Unis, par exemple, l’économie s’est déjà contractée au premier trimestre. En Europe aussi, certains experts craignent qu’une récession ne se profile à l’horizon dès cette année.
« L’Europe est aux prises avec des conditions qui sont très mondiales (hausse des prix de l’énergie et de l’inflation, augmentation des risques et de l’incertitude géopolitiques), ce qui nous amène à penser que les économies européennes subiront le même sort – une récession – que les États-Unis », a récemment déclaré George Buckley, chef économiste européen chez Nomura.
(BL)