Trois semaines avant l’état de l’Union, le Premier ministre travaille d’arrache-pied à son discours et surtout, à mettre en place un nouvel élan sur base d’une nouvelle méthode de travail. Nous avons déjà reçu un aperçu de la note préparatoire.
Un « plan de redémarrage et de transition », c’est ce que le Premier ministre Alexander De Croo (Open Vld) veut annoncer lors de son discours de l’état de l’Union, l’ouverture de l’année politique, le deuxième mardi d’octobre. Outre le budget, De Croo veut montrer que son gouvernement est en marche et formule des ambitions. Cinq groupes de travail ont été mis en place, chacun d’entre eux devant présenter cette semaine une série de propositions concrètes : cohésion sociale, numérisation, croissance, durabilité et investissements. « Il n’y a pas grand-chose de nouveau pour le moment, il s’agit principalement de plats réchauffés », nous explique une source proche du dossier.
Dans l’actualité : Le gouvernement fédéral se met en ordre de marche pour préparer sa rentrée.
Les détails : Le Premier ministre place la barre très haut pour son discours de rentrée cette année.
- Trouver un nouveau souffle, oxygéner l’équipe : on comprend bien ce que le Premier ministre De Croo a en tête lorsqu’il doit donner le coup d’envoi de la nouvelle année parlementaire début octobre.
- Le discours sur l’état de l’Union est un moment très approprié pour cela : dans le passé, les prédécesseurs de De Croo ont également utilisé ce discours pour fixer le cap, et pour dépoussiérer la dynamique de la coalition ou lui donner un nouveau souffle.
- Pour la coalition Vivaldi, en outre, plusieurs éléments se conjuguent : l’examen du budget n’a pas eu lieu cet été, comme c’était traditionnellement le cas pour les Premiers ministres Charles Michel (MR) et Elio Di Rupo (PS), entre autres. Cela signifie que d’intenses discussions y sont encore attendues afin de fixer le cadre budgétaire pour 2022.
- Mais un accord sur les chiffres ne suffira pas à faire démarrer le moteur Vivaldi. C’est pourquoi, début septembre, le Premier ministre a commencé à travailler sur un nouveau plan : un « plan de redémarrage et de transition », pour développer les réformes nécessaires, en plus de mesures supplémentaires pour rendre la reprise économique aussi forte que possible.
- Cela devrait fournir un récit fort pour l’automne, afin que le gouvernement De Croo I puisse se débarrasser une fois pour toutes de la crise corona, mais aussi, après les tensions internes, « montrer qu’il fonctionne ».
Concrètement: Cinq groupes de travail doivent présenter des propositions concrètes cette semaine.
- De Croo a divisé son gouvernement en quatre groupes de travail thématiques, chacun étant coprésidé par ses soins et un autre membre du gouvernement.
- o « Une société inclusive et participative, faisant preuve d’une forte cohésion sociale », est dirigée par le vice-premier ministre PS Pierre-Yves Dermagne, qui a le Travail et les Affaires sociales dans son portefeuille.
o « Une société plus numérique, en mettant l’accent sur la simplification administrative », sous la houlette de Mathieu Michel (MR), secrétaire d’État chargé du numérique.
o « Une dynamique forte qui stimule la croissance, l’esprit d’entreprise et la création d’emplois », menée par le vice-premier ministre du CD&V, Vincent Van Peteghem.
o « Un pays durable, en transition vers la neutralité climatique en 2050 », sous la présidence de Zakia Khattabi, ministre écolo du climat. - Les groupes de travail doivent à la fois énumérer les propositions et mesures existantes qui figurent déjà dans l’accord de coalition et ajouter de nouvelles propositions, « qui s’inscrivent clairement dans le cadre de la relance et de la transition ».
- « Bien entendu, la philosophie de l’accord de coalition doit être respectée dans le processus », indique la note.
- L’équipe fédérale a commencé à travailler sur les propositions la semaine du 6 septembre, et devrait terminer cette semaine avec une liste de propositions concrètes. L’élaboration technique et juridique des propositions est prévue après l’état de l’Union, par la voie classique de la délibération du gouvernement et du Conseil des ministres.
- Un « cinquième axe » est également mentionné dans le document : « Une économie modernisée fondée sur des investissements supplémentaires ». Le groupe de travail sur ce sujet est dirigé par Thomas Dermine, secrétaire d’État PS à la Relance. Il n’a pas encore formulé de liste d' »investissements supplémentaires ».
En substance : pour chacun de ces cinq axes, il y a déjà beaucoup d’idées. Mais doit-on s’attendre à quelque chose de neuf ou à du réchauffé ?
- Le premier à s’exprimer clairement sur « son » axe est Dermine. Hier, dans Le Soir, il a mis les pieds dans le plat avec la demande du PS de voir le niveau fédéral débloquer 600 millions d’euros pour la reconstruction après les inondations de l’été dernier. S’y ajouteraient 600 millions d’euros en provenance de la région. Bien qu’il reste à déterminer dans quelle enveloppe les 600 millions d’euros aboutiront.
- En outre, le cadre de 5,925 milliards d’euros d’investissements est réitéré, dans la perspective du plan de relance, dont 50 % pour le « durable » et 27 % pour la numérisation. Ce faisant, le Premier ministre souligne « que le retour économique » doit être clair et « que le secteur privé doit être impliqué dans les projets », souhaitant voir « une réelle innovation et transition ».
- Le document évoque les mots à la mode dans lesquels cette transition doit s’opérer : « biopharma, offshore et hydrogène (y compris les trains à hydrogène), le déclassement du nucléaire, 5G et 6G, une économie circulaire et un transfert modal ».
- Pour le premier critère, la « cohésion sociale » de Dermagne, le document rappelle qu’à politique inchangée, la Belgique atteindra un taux d’emploi de 71,9 % en 2026. « Pour atteindre un taux d’emploi de 80 %, nous devons créer 500 000 emplois supplémentaires », indique le document.
- En outre, toute une série de mesures telles que « la prévention et la réinsertion des demandeurs d’emploi de longue durée », « l’allongement et l’encouragement des carrières », « la recherche et l’offre d’un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie privée » sont à nouveau énumérées, mais sans être concrétisées. Il en va de même pour la « lutte contre la pauvreté ».
- Pour la partie numérique, on parle d’un « portail numérique unique », comme priorité principale : le principe selon lequel tout se passe numériquement avec ce gouvernement. Cela devrait permettre de réduire les coûts de 30 %. Dans le même temps, il faut garantir une accessibilité à tous, y compris aux usagers « faibles » du numérique.
- La croissance dynamique, la section pilotée par Van Peteghem, contient pour l’instant principalement des références aux objectifs qui sont déjà inclus dans l’accord de coalition.
- Enfin, en ce qui concerne la « transition durable vers la neutralité climatique d’ici 2050 », le gouvernement réitère les ambitions des accords de Paris sur le climat et, plus récemment, du Green Deal européen. La première tâche, qui consiste à réduire les émissions de 55 % d’ici à 2030, est déjà très ambitieuse. La question est de savoir si Khattabi et De Croo peuvent la rendre un peu plus concrète que les vagues intentions qui figurent actuellement dans le texte.
- « C’est un peu symptomatique de cet exercice. Il n’y a que des grands mots, mais à part ça, c’est du réchauffé. Nous n’avons rien vu de vraiment nouveau pour l’instant », déclare un initié, commentant le document.
Et maintenant ? De Croo veut faire de son discours un moment décisif.
- « Chaque membre du gouvernement a la possibilité, dans la limite de ses compétences, de soumettre des dossiers au gouvernement. Mais un feu vert du Kern est nécessaire », conclut le document. En d’autres termes, chacun peut avoir son mot à dire, mais dans le cadre de son domaine.
- Cette semaine, tout doit devenir un peu plus concret : chaque ministre doit maintenant aboutir au sein des groupes de travail pour que les propositions puissent remonter au Seize. Ils se mettront ensuite au travail pour rédiger le plan et, au bout du compte, le discours du Premier ministre.
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