Un effort budgétaire de 50 milliards d’euros est nécessaire

Alors que le FMI a lancé la semaine dernière un avertissement clair sur l’état dramatique de nos finances publiques, le gouvernement fédéral a approuvé le budget 2023 avec un déficit de quelque 34 milliards d’euros. Un énorme défi nous attend dans les années à venir pour remettre nos finances publiques sur les rails. Aujourd’hui, il n’y a même pas l’amorce d’un plan sérieux.

La démission de la secrétaire d’État au budget Eva De Bleeker remonte à un peu plus d’un mois. Un mois d’agitation sur les whatsapps et les emails, avec une attention particulière pour le budget, mais surtout pour une question accessoire : le déficit budgétaire atteindrait-il 5,8 % ou 6,1 % du PIB en 2023 ? Ce budget a finalement été adopté juste avant les vacances de Noël, mais sans aucune indication crédible de l’existence d’un plan sérieux pour remettre nos finances publiques sur les rails. Dans l’ensemble, l’attention portée à l’état de nos finances publiques est restée relativement limitée, c’est beaucoup plus préoccupant.

Des finances publiques dramatiques

L’état de nos finances publiques est sans doute le mieux illustré par le solde budgétaire hors charges d’intérêts, impact du cycle économique et interventions ponctuelles. Et cet indicateur de nos finances publiques ne semble pas bon aujourd’hui. Qui plus est, selon cet indicateur, nos finances publiques sont aussi mauvaises aujourd’hui qu’elles l’étaient au début des années 1980. Pressé d’abord par les marchés financiers et ensuite par la nécessité d’entrer dans l’euro, un effort de consolidation de près de 20 ans a alors été lancé. Ainsi, à la fin des années 1990, nous avions constitué un tampon fiscal qui nous préparait aux défis futurs. Mais ce tampon a été rapidement épuisé par les premiers gouvernements des années 2000. Ensuite, de 2010 à 2018, peu de changements structurels sont intervenus dans les finances publiques. 2019 et 2020 ont par la suite apporté une détérioration structurelle dramatique (ce qui, au passage, réfute l’idée qu’un gouvernement en affaires courantes assure par définition la stabilité de nos finances publiques).

Solde budgétaire primaire. Source : BNB.

Désormais, nous nous retrouvons avec un déficit d’un niveau insoutenable et sans marge de manœuvre pour relever les défis budgétaires à venir, tels que le vieillissement de la population ou les investissements nécessaires à une transition durable. Contrairement à ce qui s’est passé au début des années 1980, aucun effort de consolidation approfondi n’a encore été lancé, et il ne semble pas que ce soit pour bientôt. Aujourd’hui, il n’y a pratiquement aucune pression des marchés financiers et les avertissements de l’Europe n’impressionnent plus notre gouvernement. Les tentatives minimes pour maîtriser quelque peu l’augmentation des dépenses des pensions à venir sont immédiatement repoussées. Il est très douteux que ce gouvernement puisse prendre des mesures structurelles.

Avertissement du FMI

Dans son examen annuel de l’économie belge, le FMI a également mis l’accent la semaine dernière sur l’état précaire de nos finances publiques. Le FMI a demandé un effort budgétaire de 0,8 % du PIB, soit 4,6 milliards d’euros, d’ici 2023. Et un effort similaire les années suivantes jusqu’à ce que l’équilibre structurel soit rétabli. Cet effort, il doit porter principalement sur les dépenses. Cela implique six ans d’un effort d’économie supplémentaire annuel de 4,6 milliards. En approuvant le budget 2023, le gouvernement actuel a déjà clairement indiqué ce qu’il pense de la recommandation du FMI. Il a aussi exclu un effort fiscal sérieux pour l’année électorale 2024. La recommandation du FMI ne sera peut-être pas prise au sérieux sur le plan politique, mais elle donne une idée de l’énorme défi fiscal auquel nous sommes confrontés. À long terme, ce défi est encore plus grand que ce que le FMI a suggéré la semaine dernière.

La douloureuse réalité est que pour redresser nos finances publiques, faire face au vieillissement de la population et réaliser le rattrapage nécessaire en matière d’investissement public, il faut un effort budgétaire de quelque 50 milliards d’euros dès aujourd’hui. Et c’est sans compter tous les ballons de dépenses supplémentaires ou de réductions d’impôts qui seront bientôt lancés à l’approche des élections. Qui a aujourd’hui un plan sérieux pour lancer cet effort nécessaire ?


L’auteur Bart Van Craeynest est économiste en chef au Voka et auteur du livre « Terug naar de feitent »

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