Sortie du nucléaire en vue: un accord très vivaldien est tombé

Après deux réunions au sein du kern lundi soir et mercredi soir, le gouvernement fédéral est enfin parvenu à un accord sur la sortie du nucléaire. Le Premier ministre Alexander De Croo (Open VLD) et la ministre de l’Énergie Tinne Van Der Straeten (Groen) ont donné une conférence de presse ce matin à 11 heures.

Comme on s’en doutait, c’est le plan A qui a été retenu: une sortie complète du nucléaire dès 2025, avec une compensation énergétique par le renouvelable et le gaz. Il a toutefois été apporté deux nuances. La première est que le Mécanisme de Rémunération de Capacité (CRM) va être réactivé. Avec les problèmes qui s’annoncent pour obtenir le permis d’exploitation de la centrale au gaz de Vilvorde de la Région flamande, des alternatives seront mises à l’étude. Les sites de Seraing et de Manage sont évoqués depuis quelques jours.

En outre, 100 millions d’euros seront investis dans la recherche sur le nucléaire du futur, notamment la possibilité de développer des centrales SMR. Une nouvelle loi énergétique est prévue à cet effet, dont l’objectif reste la neutralité en 2050, rapporte Belga.

Les Verts crient victoire, le MR n’abandonne pas

Le MR n’aura donc pas pu faire passer son plan B qui était la prolongation de deux réacteurs nucléaires pour sécuriser l’approvisionnement. La maigre compensation est cette possibilité dans un avenir très incertain de construire ces réacteurs nucléaires de nouvelle génération. Les libéraux francophones pourront toutefois dire qu’ils se sont battus jusqu’au bout.

Georges-Louis Bouchez continue d’ailleurs de le faire, annonçant qu’un rapport de l’Agence fédérale de contrôle nucléaire (AFCN) est attendu pour le 17 janvier. Si la 2e enchère du CRM venait à échouer, une prolongation de deux réacteurs – le plan B – ne serait pas exclue comme filet de sécurité, ce que l’AFCN doit étudier. « La décision de sortie du nucléaire est attendue pour mars 2022 », a annoncé le président du MR à DH Radio. Et c’est bien ce que stipule aussi l’accord de gouvernement. Un ultime rapport d’Elia doit venir confirmer que la sécurité d’approvisionnement est garantie. Il fait toutefois peu de doutes que la Vivaldi et la ministre de l’Énergie mettront tout en œuvre pour trouver des alternatives, d’autres acteurs comme Luminus s’étant montrés très intéressés dès la première enchère.

Chacun tourne l’accord en sa faveur, comme le montre cet échange entre la ministre de l’Énergie Tinne Van Der Straeten et Georges-Louis Bouchez. Une fois encore, cet accord sur le nucléaire est un accord très vivaldien. Il s’agit d’ailleurs peu ou prou de l’accord de gouvernement décidé en 2020 déjà. Les Verts ont accepté d’entrer au gouvernement notamment contre cette sortie du nucléaire. De Croo avait accepté pour se placer comme Premier ministre. Il s’agit d’un énième report de la décision, mais la direction reste la même: on se dirige vers une sortie.

Dans la pratique, les Verts peuvent déjà exulter, ils devraient parvenir à mettre fin au nucléaire après 20 ans de combat. On aurait aussi pu penser à une victoire politique à court terme pour De Croo qui avait ouvertement soutenu sa ministre et qui voulait qu’un accord tombe avant la fin de l’année. Mais la confusion qui règne suite à l’accord suscite bien des interrogations, et l’opposition s’en donne à coeur joie.

« Pas de décision sur la sortie du nucléaire. La Vivaldi n’est-elle pas elle-même un cadavre que les gens continuent de vouloir réanimer ? », a réagi Bart De Wever, le président de la N-VA. Il fait bien sûr référence au président de l’Open VLD, Egbert Lachaert, qui estimait encore il y a peu que la prolongation du nucléaire était un cadavre qu’on ne pouvait réanimer.

Les explications du Premier ministre

« Nous nous dirigeons vers une sortie du nucléaire, mais la sécurité d’approvisionnement doit absolument être garantie. C’est ce que nous garantissons en relançant une nouvelle enchère(…). Bien sûr, nous avons mis en place une série d’évaluations pour voir si nous sommes sur la bonne voie. C’était indispensable. »

« Dans un second temps, nous lançons une nouvelle loi en accord avec les objectifs de Paris et la réduction totale de nos émissions en 2050 ». Dans le cadre de cette loi, il y a bien sûr le renouvelable, mais le Premier ministre parle également « de nouvelles technologies », prenant en exemple les nouveaux réacteurs nucléaires de type SMR, « plus petits et plus sûrs ». Un choix qu’ont aussi fait les Pays-Bas et la France, avec qui le Premier ministre espère une collaboration.

« Notre regard se portera sur les innovations pour développer dans notre pays de l’expertise et du savoir-faire, comme nous l’avons fait pour les éoliennes offshores. » Alexander De Croo mentionne aussi l’hydrogène parmi ces nouvelles technologies et les investissements qui vont ou ont pu être déjà faits.

Pourquoi ne pas acter dès à présent la sortie du nucléaire ? « Il serait stupide de ne pas mettre en place un filet de sécurité », soutient le Premier ministre, en cas de problème d’approvisionnement ou d’explosion des prix. « Le plan B est une possibilité parmi d’autres de se retourner ».

On sent toutefois à travers la conférence de presse et les questions-réponses que le plan A reste la direction et la priorité de la Vivaldi. Le reste des décisions, c’est surtout de l’enrobage, elles sont là pour « renforcer » le plan A ou pour le couvrir en cas de pépin.

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