« Nous aurons un sérieux problème en 2024 » : Vers un baril de pétrole à plus de 100 dollars ?

Pour l’instant, l’offre de pétrole dépasse la demande. Mais tout pourrait basculer en mai. D’ici à l’année prochaine, les capacités de production restantes seraient toutes utilisées. Ce qui fait que le prix de l’or noir devrait partir en flèche, selon Goldman Sachs.

Pourquoi est-ce important ?

Redémarrage de l'économie en Chine, sanctions contre le pétrole russe, capacités de production sous-financées... Le marché du pétrole devrait connaître quelques turbulences cette année. De quoi faire s'envoler les prix (et relancer l'inflation) ?

Dans l’actu : les perspectives pour le marché du pétrole de l’analyste en chef pour les matières premières de Goldman Sachs, Jeff Currie.

  • Il s’attend à ce que le prix du baril remonte et dépasse les 100 dollars, a-t-il confié, en marge d’une conférence en Arabie Saoudite dimanche passé, à Bloomberg.
    • Le baril de Brent se négocie actuellement à 85 dollars le baril et le WTI à 78 dollars. Tous deux sont en hausse de plus de 6% depuis le début de la semaine.

Hausse des prix du pétrole

L’essentiel : les raisons qui devraient pousser le pétrole vers le haut.

  • D’abord, il y a les diverses sanctions (embargos et plafonds de prix) sur le pétrole russe, qui devraient affecter les exportations (et la production).
  • Puis, il y a le réveil de la Chine, où la demande pour l’or noir devrait retourner à la normale.
  • Mais au-delà de ces deux éléments, il y a surtout un manque d’investissement au sein du secteur, dans les capacités de production (un constat aussi dressé par le ministre saoudien de l’Énergie, le prince Abdoulaziz Ben Salmane, lors de cette même conférence). Les capacités ne pourraient ainsi pas répondre à la demande, à terme. Cette situation deviendra un « sérieux problème » en 2024, explique Currie.
    • Mais c’est dès le mois de mai de cette année que la demande devrait dépasser l’offre, précise-t-il. Les capacités de production qui sont actuellement inutilisées n’offriraient pas de grande résistance. Elles auraient toutes été mises à contribution d’ici à l’année prochaine.

OPEP+ : statu quo ou augmentation de la production ?

A l’avenir : vers une hausse des quotas de production de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole et de ses alliés (OPEP+) ?

  • L’organisation, qui représente 40% de la production mondiale de pétrole, pourrait faire éviter le pire au marché avec une hausse des quotas de production (coupés de 2 millions de barils par jour en octobre dernier, après être revenus à la normale un peu plus tôt, suite à d’importantes réductions lors de la pandémie).
  • Pour Currie, cela pourrait être le cas plus tard cette année. Fatih Birol, président de l’Agence internationale de l’énergie (AIE), espère aussi que l’OPEP+ augmentera la production, en réponse de la hausse de la demande en Chine.
  • Reste à voir ce que décidera l’organisation. Elle essaye désespérément de faire repartir les prix à la hausse, ce qu’elle ne parvient plus à faire depuis des mois, même avec sa réduction de production.
  • Reste aussi à voir la réelle capacité des pays membres à augmenter leur production. Lors de la hausse de la production post-Covid, nombre d’entre eux n’arrivaient pas à suivre la cadence – la hausse réelle de la production était plus lente que la hausse des quotas.
  • De son côté, la production russe est une inconnue, à l’heure où la demande mondiale n’est pas au plus fort à cause du ralentissement économique. Pourrait-elle écouler tout son pétrole sur d’autres marchés, maintenant que le pétrole russe est presque entièrement interdit en Europe, son ancienne destination principale ?

Des prévisions « pessimistes » pas sans intérêt

Le détail : des prévisions qui ne sont pas dépourvues d’intérêts.

  • La hausse des prix du pétrole est une bonne nouvelle pour certains investisseurs, mais une mauvaise nouvelle pour les consommateurs, les entreprises et l’économie dans son ensemble, car les coûts augmentent. C’est pour cela qu’une prévision sur la hausse du prix du pétrole peut être vue comme « pessimiste ».
  • Bref, de telles prévisions ne sont pas dépourvues d’intérêts. Spéculer sur une distorsion entre l’offre et la demande (et créer de la peur) peut rapporter gros aux investisseurs, banquiers (comme Currie, qui revient régulièrement à la charge avec des estimations de prix élevés, qui ne se sont pas toutes réalisées) et traders, tout comme aux producteurs de pétrole. C’est ainsi qu’on peut aussi lire la récente mise en garde du patron d’Aramco par rapport à des pénuries.
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