Des perspectives économiques sombres

Avec une confiance des consommateurs européens au plus bas, une industrie allemande en chute libre et des prix du gaz en forte hausse, les perspectives économiques pour les mois à venir sont remarquablement sombres. Et dans l’arène politique aussi, les choses se compliquent.

Des nouvelles inquiétantes concernant l’économie européenne…

Au deuxième trimestre, l’économie européenne a enregistré une croissance étonnamment forte (+0,7 % par rapport au premier trimestre), principalement grâce aux bonnes performances de l’Espagne, de l’Italie, de la France et de la Suède. Mais ce n’est pas une raison pour être euphorique, les perspectives pour les mois à venir restent sombres.

La confiance des consommateurs européens est tombée en juillet à son plus bas niveau depuis la création de l’indicateur au milieu des années 1980. De nombreux prix des matières premières baissent en réponse à la montée des risques de récession, mais le prix du gaz européen est aujourd’hui plus de deux fois plus élevé que sa moyenne du deuxième trimestre.

Les perspectives de l’économie allemande, de loin la plus importante en Europe, sont particulièrement inquiétantes. En juillet, les attentes des entrepreneurs allemands sont retombées au niveau le plus bas depuis la fin de l’année 2008. Depuis, le prix du gaz a encore augmenté et le faible niveau des eaux du Rhin a posé des problèmes supplémentaires à l’industrie allemande. Une forte baisse de l’activité dans l’industrie allemande semble inévitable dans les mois à venir.

Perspectives sombres pour l’économie allemande : les estimations des entrepreneurs sont au plus bas

… ne sont pas de bon augure pour l’économie belge

Dans ce contexte, les perspectives de l’économie belge ne sont pas non plus très réjouissantes. Les problèmes en Allemagne impliquent aussi des problèmes chez nous. Les indicateurs avancés de l’économie belge indiquent un affaiblissement de l’activité économique. Par exemple, la confiance des entreprises s’érode (et les chiffres allemands suggèrent que d’autres mauvaises nouvelles dans ce domaine sont à venir) et le travail intérimaire est également en baisse.

Les perspectives de la demande dans le secteur de la construction sont déjà retombées à des niveaux de récession. Le premier semestre de l’année a connu le plus grand nombre de faillites depuis 2014. Il s’agit probablement en partie d’un mouvement de rattrapage après la pause des faillites pendant la pandémie, mais le mouvement s’accélère clairement et pourrait facilement se transformer en quelque chose de pire. D’autant plus que les entreprises sont confrontées à des hausses de salaires spectaculaires. Par exemple, selon les dernières estimations, pour les entreprises qui indexent en janvier, la hausse des salaires sera d’au moins 8%. Dans un climat économique dégradé, cela représentera une lourde charge pour de nombreuses entreprises.

La confiance des entrepreneurs belges comparée aux estimations des entrepreneurs allemands.

Et puis, bien sûr, il y a différents risques qui sont difficiles à évaluer aujourd’hui, mais qui ne seront probablement pas positifs. Y aura-t-il de nouvelles vagues du coronavirus à l’automne, avec de nouvelles perturbations des chaines d’approvisionnement internationales ? L’approvisionnement énergétique de l’Europe sera-t-il maintenu pendant les mois d’hiver, et à quels prix ? Dans quelle direction vont les tensions géopolitiques ? Quelle sera l’ampleur de l’impact du revirement de la politique monétaire ? Les trimestres à venir seront difficiles en termes économiques.

Automne chaud

Alors que l’économie sera soumise à une pression croissante au cours des prochains mois, les syndicats ont fait campagne pour des augmentations salariales encore plus importantes. Des actions ont déjà été annoncées pour l’automne, notamment une grève nationale. Ils vont probablement accentuer encore la pression dans les mois à venir, même si cela risque de mettre de nombreuses entreprises encore plus en difficulté. Finalement, le dossier des salaires finira plus que probablement sur la table du gouvernement fédéral au printemps prochain.

Il y a aussi d’autres dossiers sur la table. La pression va assurément augmenter pour des mesures supplémentaires en matière de pouvoir d’achat. Mais celles-ci devront être conciliées avec l’état dramatique de nos finances publiques. Après les très maigres mesures de l’accord sur le travail et de l’accord sur les pensions, des réformes audacieuses du marché du travail et des pensions sont encore nécessaires, même s’il semble très improbable que des mesures sérieuses soient prises dans ce domaine. Il en va sans doute de même pour la réforme fiscale annoncée. Les mois à venir ne seront donc pas seulement difficiles sur le plan économique, mais aussi sur le plan politique.


L’auteur Bart Van Craeynest est économiste en chef chez Voka et auteur du livre Terug naar de feiten (Le retour aux faits).

(CP)

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