Cette semaine, la Californie a ordonné à Nestlé de ‘cesser immédiatement tous les détournements d’eau non autorisés’. La compagnie pompe chaque jour de l’eau dans la forêt de San Bernardino pour ses bouteilles d’Arrowhead. Mais la région, en proie à une mégasécheresse, veut protéger ses réserves.
La sécheresse en Californie est une question de plus en plus tendue. L’année passée, la région a connu d’immenses feux de forêt. Et depuis, il n’a toujours pas plu assez pour réhydrater les sols. Plus des trois quarts de l’État sont touchés par une mégasécheresse. Il devient difficile de trouver de l’eau pour les habitants, pour les exploitations agricoles et même pour maintenir les forêts en vie.
Mais pendant ce temps-là, Nestlé pompe chaque jour 400.000 litres d’eau dans les réserves de la forêt de San Bernadino, au sud de l’État. Cette eau est ensuite mise en bouteille et vendue aux habitants de la région. Nestlé a le droit de puiser dans la forêt. L’entreprise a acquis les droits de puisage de la Arrowhead Drinking Water Co. en 1992, lorsqu’elle a racheté Perrier. L’accord datait de 1865, explique le site Korii.
Une question de wagons
L’Etat de Californie ne peut rien faire contre ce droit. Toutefois, le Conseil de contrôle des ressources en eau a peut-être trouvé une manière de limiter le puisage. Selon l’accord, la société peut puiser 7 wagons d’eau par semaine. Nestlé affirme que ces wagons pouvaient contenir à l’époque jusqu’à 15.000 gallons d’eau, ce qui représente environ 57.000 litres d’eau par semaine. L’entreprise dépasse déjà largement ses quotas. En 2020, Nestlé a puisé 58 millions de gallons, selon The Guardian. Cela représente plus d’un million de gallons par semaine.
Mais en outre, l’entreprise aurait surévalué le contenu de ces wagons. Selon Amanda Frye, une militante locale, qui a fouillé les archives, les wagons ne pouvaient en réalité contenir que 6.500 gallons, soit moins de la moitié que ce qu’affirme Nestlé.
Si l’ordonnance de l’Office national des eaux est approuvée, Nestlé pourrait être contraint de ne puiser que 2.366.000 gallons d’eau par an, soit 24 fois moins que l’année passée. Et si l’entreprise ne respecte pas ce niveau, elle devra payer 1.000 dollars par jour, ou 10.000 en cas de sécheresse, ce qui est actuellement le cas.
Aider les habitants et la forêt
Les réserves de San Bernadino sont une source d’eau pour les habitants du comté d’Orange. Le puisage excessif peut donc limiter l’accès à l’eau des habitants. L’avis de Nestlé sur l’eau a toujours été très complexe. Une citation est régulièrement attribuée à l’ancien CEO de la firme est : ‘L’accès à l’eau devrait être privatisé’. Une phrase qui a choqué l’opinion publique. Toutefois, il a dit en réalité : ‘Il est préférable, selon moi, de donner une valeur à une denrée afin que nous soyons tous conscients qu’elle a un coût’. Et d’ajouter ensuite : ‘il faut prendre des mesures spécifiques pour la partie de la population qui n’a pas accès à cette eau’. Depuis cette explication datant de 2005, la direction de l’entreprise a changé. Il est donc difficile de dire comment Nestlé réagira à l’ordonnance.
Mais la Californie ne s’inquiète pas uniquement pour ses habitants. Elle craint aussi pour sa forêt. Les sécheresses rendent les réserves naturelles plus vulnérables aux incendies. Selon le Département des forêts et de la protection contre les incendies de Californie, 1,7 million d’hectares de forêt ont brulé l’année passée.
Avec un puisage trop conséquent, les racines des arbres de cette forêt, en zone protégée, ne pourront plus accéder à l’eau et seront encore plus en danger. Cette bataille a aussi lieu pour éviter la destruction des forêts et la multiplication des incendies en Californie qui sont liées au manque d’eau.
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