Le leader des Proud Boys, Enrique Tarrio, a été un informateur du FBI

Enrique Tarrio, figure de proue du mouvement d’extrême droite pro-Trump des Proud Boys, a été un ‘prolifique informateur’ du FBI. Une surprenante information dévoilée par Reuters sur base de documents judiciaires. Le principal intéressé déclare qu’il ‘ne se rappelle de rien’.

Avant de devenir le leader des Proud Boys, Enrique Tarrio a eu un passé de délinquant. En 2012, il avait été arrêté pour une affaire de fraude liée au vol, au réétiquetage et à la revente de tests de diabète. L’homme avait été condamné à une peine de 30 mois de prison. Finalement, il n’avait passé que 16 mois derrière les barreaux.

Reuters, qui a mis la main sur des documents de l’époque, affirme que Tarrio a bénéficié d’une réduction de peine grâce à sa coopération avec les forces de l’ordre. D’après une transcription d’une procédure judiciaire fédérale de 2014, l’actuel leader des Proud Boys a permis, via un travail d’infiltration, de poursuivre treize personnes impliquées dans diverses affaires de trafic de drogues et de trafic d’êtres humains.

La procureur confirme

Interrogée par Reuters, la procureur qui avait été chargée du dossier à l’époque a confirmé que Tarrio avait coopéré avec la justice. Non seulement dans le cadre de son affaire personnelle, mais également pour démasquer d’autres criminels.

‘Il a coopéré avec les forces de l’ordre locales et fédérales, pour aider à la poursuite de ceux qui dirigeaient d’autres entreprises criminelles, allant de la gestion de maisons de culture de marijuana à Miami à l’exploitation de systèmes de fraude pharmaceutique’, a affirmé Vanessa Singh Johannes à Reuters.

Dans la transcription de la procédure judiciaire, il apparaît qu’un agent du FBI avait qualifié Tarrio ‘d’élément clé’ dans les enquêtes de la police locale au sujet de trafics de stupéfiants.

Son avocat s’en souvient vaguement, Tarrio pas du tout

Contacté, le principal intéressé a nié avoir coopéré avec les autorités en 2014. ‘Je ne sais rien de tout cela. Je ne me rappelle pas de tout cela’, a-t-il répondu. Quant à sa réduction de peine, il a assuré l’avoir obtenue car il avait collaboré avec les enquêteurs dans le cadre de l’affaire qui le concernait. Mais pas, selon lui, parce qu’il avait aidé à poursuivre d’autres personnes, dans le cadre d’autres dossiers. Et encore moins parce qu’il aurait servi à infiltrer les milieux criminels.

Pourtant, d’après la transcription, à l’époque, son avocat avait mis en valeur la coopération de son client avec les enquêteurs, louant son travail sous couverture. Jeffrey Feiler avait qualifié Tarrio de coopérateur ‘prolifique’. Ce dernier aurait même ‘pris des risques’ en rencontrant lui-même les membres d’un réseau de trafic d’être humains, permettant aux enquêteurs à les arrêter. Ce qui lui aurait permis de voir sa peine réduite de moitié.

Sept ans plus tard, l’avocat s’est montré moins avare. ‘Les informations que j’ai données au tribunal étaient basées sur des informations qui m’ont été fournies par les forces de l’ordre et le procureur’, s’est contenté de répondre Feiler, indiquant qu’il ne se souvenait plus des détails de l’affaire.

Comme Trump, Tarrio et les Proud Boys étaient (et sont toujours) opposés au Dr Anthony Fauci et aux restrictions sanitaires mises en place pour lutter contre le coronavirus – Isopix

Un revirement inattendu

Ces révélations ne signifient évidemment pas que Tarrio a continué de collaborer avec les forces de l’ordre par la suite. Ni qu’il a pris la tête des Proud Boys en vue d’aider le FBI à contenir ce groupuscule connu pour ses dérives violentes.

L’an dernier, le leader des Proud Boys avait toutefois reconnu qu’il informait les services de police des villes dans lesquelles les Proud Boys se réunissaient. Il avait ensuite déclaré mettre fin à cette coopération en décembre dernier, après que les forces de l’ordre de Washington avaient réprimé une manifestation violente du groupe. Des dizaines de Proud Boys avaient été arrêtés.

Des membres de ce groupuscule suprémaciste blanc ont participé à l’assaut du Capitole du 6 janvier dernier. Ultime et sanglante étape des démarches des Pro-Trump en vue de ralentir la procédure l’entrée au pouvoir de Joe Biden. Tarrio, pour le coup, n’y avait été pour rien. Et pour cause: il avait été arrêté deux jours plus tôt lors de son arrivée dans la capitale pour détention illégale de deux armes à feu à haute capacité.

Vanessa Singh Johannes, la procureure qui avait poursuivi Tarrio dans l’affaire de trafic de tests de diabète, s’est dite surprise de la trajectoire prise par l’individu.

‘Je savais que c’était un fraudeur – mais je n’avais aucune raison de croire que c’était aussi un terroriste domestique’, a-t-elle confié à Reuters.

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