La peste : un fléau bien plus ancien qu’on ne le pensait (et qui montre comment une maladie peut évoluer)

Une étude dévoile que le corps d’un homme préhistorique était porteur de la bactérie responsable de la peste. Une maladie déjà mortelle, mais fort différente de celle que l’ont connait aujourd’hui. Un exemple de comment, en mutant, une maladie peut devenir bien plus contagieuse et bien plus virulente.

Actuelle Lettonie, il y a 5.000 ans. Quelques êtres humains enterrent l’un des leurs, un jeune homme d’une vingtaine d’années. La cause de sa mort doit leur sembler bien étrange : leur compagnon a été touché par une étrange maladie, et a fini par y succomber. Cette maladie, c’était la peste bubonique, la terrible Peste noire qui a dépeuplé l’Europe au Moyen-Age.

C’est une découverte totalement inattendue que dévoile dans une étude une équipe de généticiens. Ils analysaient le génome de quatre corps humains datant de la fin de néolithique et découverts dans la même tombe à Riņņukalns, en Lettonie, pour déterminer si ces individus étaient apparentés. Mais dans les restes d’un adulte d’une vingtaine d’année, ils ont déniché pas moins que yersinia pestis, la bactérie responsable de la peste bubonique ! C’est la plus ancienne trace de cette maladie mortelle découverte chez l’humain : l’infortuné préhistorique a été enterré il y a 5.000 à 5.300 ans, alors qu’il était un des derniers chasseurs-cueilleurs d’Europe pendant que le reste de continent adoptait massivement l’agriculture. Avant cette découverte, la plus ancienne preuve de peste était plus récente d’au moins plusieurs siècles.

Une mort lente

Cette découverte permet aussi d’en savoir plus sur les mutations qui ont contribué à faire de cette maladie infectieuse des rongeurs un véritable fléau capable de dépeupler un continent. Car l’ADN de ce pauvre chasseur-cueilleur était saturé de la bactérie, comme si elle l’avait tué très lentement. La peste de l’époque était bien moins virulente que celle que l’on connait. Et bien moins contagieuse : cette souche de la maladie n’avait pas encore la mutation génétique qui lui permet de passer des animaux aux humains par l’intermédiaire d’une piqure de puce. Pour tomber malade, il fallait donc un contact direct avec un rongeur, un rat par exemple, atteint par la maladie. Comme une morsure. L’homme de Riņņukalns n’a décidément pas eu de chance. Et son décès a dû paraître bien étrange, pour ses contemporains. Mais il n’a visiblement pas été à l’origine d’une épidémie: les trois autres corps présents dans la sépulture, un autre homme adulte, une adolescente, et un nouveau-né, n’étaient pas porteurs de la peste.

La peste actuelle se présente sous trois formes, plus ou moins dangereuses et contagieuses. La peste bubonique, rapide et douloureuse, qui a tué jusqu’à la moitié des Européens au XIVe siècle. La peste pneumonique, qui infecte le système respiratoire et qui est presque toujours mortelle. Et puis la peste septicémique, quand la bactérie finit par infecter le système sanguin, jusqu’à tuer son porteur, mais sans risque de contagion tant qu’il n’y a pas de contact avec son sang. C’est sans doute ainsi que la peste a tué il y a plus de 5.000 ans : comme une longue maladie chronique.

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