Jeff Bezos accusé de sacrifier la sécurité de ses employés pour sa course à l’espace

Des employés et ex-employés de Blue Origin révèlent l’ambiance délétère qui règne au sein de Blue Origin. L’entreprise ne ferait rien pour punir le harcèlement sexuel, et les employés seraient poussés au burn-out. Pire encore, la conquête spatiale selon Jezz Bezos se ferait au mépris total de la sécurité élémentaire.

Nouveau coup dur pour Jeff Bezos : alors qu’Elon Musk vient de le dépasser au classement des plus riches du monde et que les deux milliardaires s’enfoncent dans une très gênante surenchère dans la rivalité, voici que le prochain revers vient de Blue Origin. Le grand patron est accusé de sacrifier la sécurité de ses employés sur l’autel du succès. Et pire encore : il instituerait une ambiance de travail aussi toxique que sexiste.

Ce sont 21 employés et ex-employés de Blue Origin qui ont décidé de briser l’omerta sur les pratiques de l’entreprise en publiant une lettre ouverte sur la plate-forme de storytelling Lioness. Celle-ci est signée par Alexandra Abrams, ancienne directrice de la communication interne chez Blue Origin, au nom de l’ensemble du collectif, et elle brosse un portrait sans concession de l’entreprise: « Nous pensons que l’exploration des possibilités de civilisation humaine au-delà de la Terre est une nécessité. Mais si la culture et l’environnement de travail de cette entreprise sont un modèle pour le futur envisagé par Jeff Bezos, nous nous dirigeons dans une direction qui reflète le pire du monde dans lequel nous vivons actuellement, et qui a cruellement besoin de changer. »

Sexisme généralisé et harcèlement vite oublié

Les participants à cette action de prise de conscience décrivent un univers de travail très difficile, et surtout très masculin, dans lequel les femmes sont systématiquement dénigrées sur leurs compétences, quand elles ne subissent pas remarques sexistes, voire harcèlement sexuel. « Un autre ancien cadre traitait fréquemment les femmes de manière condescendante et dégradante, les appelant « baby girl », « baby doll » ou « sweetheart » et les questionnant sur leur vie amoureuse » illustre le texte, entre autres récits choquants. « Son comportement inapproprié était si connu que certaines femmes de l’entreprise ont commencé à avertir les nouvelles recrues de ne pas s’approcher de lui, alors qu’il était chargé du recrutement des employés. Beaucoup d’entre nous ont eu l’impression qu’il était protégé par sa relation personnelle étroite avec Bezos – il a fallu qu’il agrippe physiquement une subordonnée pour qu’il soit finalement renvoyé. »

Harcèlement et pression permanente

Mais les femmes ne sont pas les seules à subir l’ambiance de travail délétère qui semble régner dans l’entreprise dédiée à la conquête spatiale: « Des notes de service de la direction révèlent un désir de pousser les membres du personnel à leurs limites, affirmant que l’entreprise doit ‘tirer davantage de ses employés’ et que ceux-ci doivent considérer comme un « privilège de faire partie de l’histoire ». Une directive citait SpaceX comme modèle, dans la mesure où « l’épuisement professionnel faisait partie de leur stratégie de travail ». Les employés actuels et anciens ont vécu des expériences qu’ils ne peuvent décrire que comme déshumanisantes, et sont terrifiés par les conséquences potentielles de s’exprimer contre l’homme le plus riche de la planète. »

Réduction des coûts plutôt que sécurité

Ce mépris de l’humain et cette surpression permanente sur le personnel auraient des conséquences sur la sécurité au sein de l’entreprise qui, rappelons-le, envoie des fusées dans l’espace. Selon un ingénieur signataire de ce cri d’alarme, Jeff Bezos serait très chanceux qu’aucun accident grave ne se soit encore produit avec un de ses vaisseaux. « Nous avons constaté un schéma de prise de décision qui privilégie souvent la vitesse d’exécution et la réduction des coûts au détriment d’un financement approprié pour garantir la qualité. En 2018, lorsqu’un chef d’équipe a pris le relai, l’équipe avait documenté plus de 1 000 rapports de problèmes liés aux moteurs qui alimentent les fusées de Blue Origin, qui n’avaient jamais été traités » illustre encore le texte.

Toutes ces révélations écornent gravement l’image d’une firme qui se présente comme un marchepied vers un avenir humaniste, écologique, et interplanétaire. Mais elles rappelleront aussi les alarmants récits que d’employés ou ex-employés distillaient parfois sur Amazon, l’autre grande firme fondée par Jeff Bezos.

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