Depuis son apparition en Afrique du Sud, la mutation E484K du SARS-CoV-2 inquiète les communautés scientifiques. Leurs craintes semblent se confirmer. D’après une toute nouvelle étude, les vaccins de Pfizer et de Moderna sont bien moins efficaces contre ce variant sud-africain.
Des scientifiques de l’université de Columbia se sont penchés sur l’efficacité des vaccins contre le Covid-19 développés par Pfizer et Moderna face aux variants britannique (B.1.1.7) et (B.1.351) et sud-africain du virus.
Plus concrètement, les chercheurs ont analysé la résistance offerte par les anticorps induits par les vaccins face à ces deux variants. Leur conclusion est peu réjouissante. Le pourcentage d’anticorps protecteurs qui ont neutralisé le variant sudafricain était 10,3 fois plus faible pour le vaccin de Pfizer. Et 12,4 fois plus faible pour le produit de Moderna. Des données qui sont ici mises en parallèle avec l’efficacité des vaccins face à au virus non-muté.
Le variant brésilien (B.1.1.28) n’a pas été testé. Etant donné qu’il contient 3 mutations semblables au variant sud-africain – dont la E484K – les chercheurs craignent que l’efficacité des vaccins soit également bien moins importante pour ce variant.
Méthodologie
Pour avancer ces conclusions, les scientifiques américains se sont basées sur des échantillons issus du monde réel:
- 10 échantillons de sang de personnes ayant reçu deux doses du vaccin Pfizer, prélevés 28 jours après l’injection de la seconde dose.
- 12 échantillons de sang de personnes ayant reçu deux doses du vaccin Moderna, prélevés 43 jours après l’injection de la seconde dose.
Ils ont ensuite comparé la manière dont les anticorps présents dans les échantillons de sang neutralisaient le coronavirus original, par rapport aux variants britannique et sud-africain.
Pfizer et Moderna avaient déjà eux-mêmes concédé le fait que leur vaccin était moins efficace contre le variant sud-africain du virus. Toutefois, les deux firmes avaient utilisé des virus fabriqués en laboratoire, qui ne ressemblaient pas à 100% aux variants de la vie réelle.
Dans ce cas-ci, les chercheurs ont fabriqué des virus totalement conformes aux variants circulant dans le monde réel. Et leurs résultats montrent, d’après eux, que la baisse d’efficacité observée pour le variant sud-africain est encore plus importante que ce que les firmes avaient avancé.
‘Les conclusions générales sont inquiétantes, en particulier à la lumière des récents rapports selon lesquels les deux vaccins Novavax et Johnson & Johnson ont montré une baisse substantielle de leur efficacité en Afrique du Sud’, indiquent également les auteurs de l’étude.
- Les anticorps du variant sud-africain pourraient offrir une protection contre tous les autres variants
- Avec leur vaccin, Pfizer et Moderna toucheront le jackpot. Scandale? Pas si vite…
Quelques lueurs d’espoir
Pour ne pas tomber dans le pessimisme le plus complet, il convient d’apporter quelques nuances à des inquiétantes conclusions.
D’abord, avec une petite vingtaine d’échantillons analysés, cette étude n’est pas encore suffisante pour conclure que les vaccins actuels sont réellement inefficaces contre le variant sud-africain. Rappelons aussi que Pfizer et Moderna travaillent chacun sur une nouvelle version de leur vaccin, afin de le rendre réellement efficace contre ce variant.
Notons également que – même si cela avait déjà été démontré plus tôt – les chercheurs de l’université de Columbia ont confirmé que les deux vaccins offraient une protection quasiment aussi robuste face au variant britannique que face à la forme du virus pour laquelle les vaccins ont été développés.
Les scientifiques concluent leur étude en indiquant espérer que leur travail servira d’avertissement. ‘Si la propagation rampante du virus continue et que des mutations plus critiques s’accumulent, nous pourrions être condamnés à poursuivre continuellement l’évolution du SRAS-CoV-2, comme nous l’avons fait depuis longtemps pour le virus de la grippe. De telles considérations exigent que nous stoppions la transmission du virus aussi vite que possible, en redoublant nos mesures d’atténuation et en accélérant le déploiement du vaccin’, écrivent-ils.
Evaluée par des pairs, l’étude a été acceptée par la revue Science. Le papier n’a pas encore été publié officiellement, mais Science en a déjà divulgué une première version, disponible ici.