Avons-nous vraiment besoin de deux doses du vaccin contre le coronavirus ?

Dans plusieurs pays d’Europe occidentale, les gens commencent à s’interroger sur la lenteur du processus de vaccination. C’est aussi le cas en Belgique. Les politiciens ont de plus en plus de mal à expliquer à la population pourquoi, par rapport à l’Allemagne, au Royaume-Uni, aux États-Unis et surtout à Israël, nous ne parvenons pas à mettre la campagne sur les bons rails.

Après le fiasco des masques buccaux (d’abord inutiles, puis indispensables) et des tests (3 à 4 jours d’attente pour obtenir un résultat), Christie Morreale (PS), l’un de nos 9 ministres de la santé, a dû convaincre les Belges, lundi matin sur LN24, que ‘nous ne sommes pas lents’. ‘C’est un faux procès’, a-t-elle répondu à la question d’un téléspectateur. Selon elle, en accord avec les maisons de repos et de soin, il a été convenu d’accorder une semaine de répit à un personnel surchargé depuis des mois. Tout cela, avant le début de la campagne de vaccination, le 5 janvier.

Selon la ministre, la Belgique pourra vacciner 40.000 personnes par semaine à partir du mardi 5 janvier sur la base des 87.000 doses mises à disposition par Pfizer. Avec, donc, deux doses par personne.

Les deux doses sont-elles bien nécessaires ?

Mis sous pression par la situation, plusieurs pays se demandent s’il ne serait pas préférable de vacciner une fois une grande partie de la population plutôt qu’une petite partie deux fois. En d’autres termes, n’est-il pas plus intéressant de vacciner 80% de la population une fois que 40% de la population deux fois ? Les Américains envisagent même de ne donner qu’une demi-dose deux fois aux personnes âgées de 18 à 55 ans. Selon le responsable de l’opération Warp Speed, cela donnerait un résultat presque identique.

À la mi-décembre, l’épidémiologiste Michael Mina et le socilologue Zeynep Tufekci avaient déjà soulevé la question dans un article d’opinion du New York Times.

Le vaccin de Moderna aurait une efficacité de 92% avec une dose, contre 94% avec deux doses. Celui de Pfizer-BioNTech permettrait de maintenir une efficacité de plus de 80% avec une seule inocculation. Le vaccin d’AstraZeneca prend la même voie. Ceux qui sont vaccinés une fois seraient protégés à 70% pendant 12 semaines. Un pourcentage similaire à celui de l’administration en deux doses.

La deuxième injection prolonge l’immunité

Toutefois, les pourcentages ci-dessus ne donnent pas une image complète du problème. Dans le journal français Le Monde, l’immunologiste Jean-Daniel Lelièvre affirme que la deuxième vaccination vise à prolonger cette immunité. Pour l’instant, selon lui, rien n’indique qu’une seule dose offre la même durée de protection. Or, il s’agit d’un facteur crucial pour atteindre l’immunité de groupe, qui fait partie des objectifs à long terme.

On a donc le choix. Soit nous vaccinons un plus grand nombre de personnes, qui resteront alors immunisées pendant une période plus courte. Soit nous vaccinons moins de personnes, qui resteront immunisées plus longtemps.

Aucun des trois vaccins mentionnés ci-dessus n’a été conçu sur base d’une seule vaccination, précisément parce que la deuxième dose fait toute la différence. Les autres vaccins, qui sont toujours en cours de développement, pourraient éventuellement produire un effet identique avec une seule dose. Mais ce n’est pas encore le cas.

L’urgence va-t-elle nous faire enfreindre la réglementation ?

Maintenant que plusieurs pays resserrent l’étau en instaurant un nouveau lockdown, il y a un risque que la réglementation finisse par être enfreinte. Si un pays ne parvient pas à stopper l’augmentation des hospitalisations, il sera obligé d’opter pour une vaccination unique. Ce n’est pas une solution optimale, mais une solution d’urgence.

Entre-temps, Michael Mina et Zeynep Tufekci se proposent d’étudier le taux d’infection des personnes qui ont participé à l’essai clinique, mais qui ont abandonné prématurément – après une première vaccination. Si elles ne sont pas infectées, cela ne constitue pas une garantie. Mais si elles sont infectées, nous saurons alors qu’une seule vaccination n’est pas une solution.

Pfizer et BioNTech ont, elles, déjà pris les devants. Lundi soir, les firmes ont indiqué que leur vaccin nécessitait bel et bien l’administration de deux doses afin d’assurer une protection maximale. ‘La protection et l’efficacité du vaccin n’ont pas été évaluées sur différents schémas posologiques, étant donné que la majorité des participants au test ont reçu la deuxième dose comme spécifié dans la conception de l’étude’, ont-elles averti. ‘On ne dispose pas de données démontrant que la protection après la première dose perdure après 21 jours’

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