Plusieurs indicateurs pointent vers des difficultés financières du côté de Crédit Suisse. La banque est-elle devant un moment « Lehman Brothers »?
Jusque maintenant, le parallèle entre 2022 et 2008 se faisait plutôt avec le secteur de l’énergie. Avec les prix élevés du gaz, certains fournisseurs risquent la faillite. L’Etat allemand a par exemple racheté Uniper pour le sauver in extremis, et d’autres pays ont dû débloquer des fonds.
Mais des échos d’un moment à la Lehman Brothers, qui a fait faillite le 29 septembre 2008, entraînant le secteur financier entier dans sa chute. Credit Suisse serait dans une situation critique, montrent plusieurs indicateurs.
- Contrats de défauts de crédit
Les contrats de défauts de crédit, ou default credit swaps (CDS) en anglais, sont une sorte d’assurance sur les défauts de crédit, qui fonctionnent avec des effets de levier. Lorsqu’un défaut de paiement devient plus probable, la prime de risque de l’actif augmente (alors que son prix baisse car de nombreux investisseurs s’en débarrassent), et ces assurances augmentent aussi.
Pour Crédit Suisse, les CDS ont augmenté de près de 1.300% depuis le début de l’année, soit le même pourcentage qu’ont vu les CDS de Lehman Brothers une semaine avant l’annonce de faillite, indique l’analyste Daryl Jones de la société de recherche en investissement et finances Hedgeye sur Twitter.
- Actions
Le cours des actions de la banque suisse est en chute libre. Depuis le début de l’année, elles ont perdu 56%. Depuis février 2021, elles ont même perdu plus de 70%. Là aussi, il s’agirait de chutes plus observées depuis 2008, pour des actions bancaires dans tous les cas.
« Moment critique »
La banque est devant une refonte, définie par le PDG Ulrich Koerner comme un « moment critique », dans un document interne consulté par Bloomberg. Pendant un mois, un audit sera mené. Le PDG indique qu’il veut redorer le blason de la banque, l’amener vers la rentabilité à nouveau et l’éloigner des récents scandales.
Une annonce qui, dans le contexte énoncé plus haut, ne rassure pas forcément les marchés. Koerner lui-même parle « d’incertitudes et de spéculations internes et externes » dans son mémo.
Mais il se veut également rassurant, et souligne que la banque détient « une base de capital et une position de liquidité solides » et demande à ses employés de ne pas confondre les cours de l’action avec cette base solide. Un discours qui ne rassure pas vraiment non plus. En 2008, les mêmes mots étaient prononcés par les représentants de Lehman Brothers.
Reste à voir comment la situation évolue dans les jours et les semaines à venir. L’exposition qu’ont les autres banques, européenne ou autres, à Crédit Suisse, et comment une faillite les impacterait, est encore une inconnue. Dans tous les cas, une crise financière arriverait à un très mauvais moment pour l’Europe, qui connaît déjà une crise énergétique sans précédent et un avenir économique sombre.