Un remède pire que la maladie : un médicament contre le Covid largement utilisé dans le monde à l’origine de mutations potentiellement dangereuses

On dit que l’enfer est pavé de bonnes intentions : en cherchant à guérir des milliers, voire des millions de patients malades du coronavirus, la multinationale américaine Merck pourrait avoir jeté de l’huile sur le feu, tout en se remplissant généreusement les poches.

Dans l’actu : Le traitement molnupiravir développé par Merck favorise les mutations du coronavirus, selon une étude publiée dans la très sérieuse revue Nature.

  • Le molnupiravir est un médicament antiviral qui fonctionne en provoquant des changements dans l’ADN du virus lorsque celui-ci se multiplie. Beaucoup de ces changements nuisent au virus ou le tuent. Le molnupiravir diminue donc la quantité de virus dans le corps et aide à combattre le Covid-19.
  • Ça, c’est pour la théorie. En pratique, si le médicament ne parvient pas à éliminer complètement le virus chez certains patients, ces derniers pourraient propager une version mutée du virus.
    • Leurs recherches montrent que depuis l’usage élargi du molnupiravir en 2022, on observe une augmentation de certaines mutations spécifiques du virus. En particulier dans les régions où le médicament est largement utilisé.
    • Ils ont également identifié un modèle de ces mutations chez les patients traités par le molnupiravir. Un modèle similaire aux mutations observées dans les nouvelles versions du virus.
    • En examinant les dossiers médicaux, ils ont alors confirmé le lien entre ces mutations spécifiques et l’utilisation du molnupiravir.

Résultat : « Le traitement au molnupiravir a laissé une trace visible dans les bases de données mondiales de séquençage. »

  • Pour le moment, l’étude n’avance aucune preuve que le molnupiravir ait engendré des variants du Covid plus transmissibles ou plus dangereux.
    • Mais dès l’arrivée du traitement sur le marché en 2021, des chercheurs avaient prévenu que son fonctionnement pouvait encourager la survenue de variants et leur transmission d’une personne à l’autre.
    • Et ces découvertes ont désormais un impact significatif pour l’évolution de la pandémie. En effet, tout processus qui amplifie les mutations du virus peut, à long terme, engendrer des variants soit plus graves (comme Omicron) soit plus contagieux.
  • Étrange coïncidence, cette étude intervient au moment où le Covid connaît une recrudescence dans plusieurs pays, notamment aux États-Unis. À cause de l’émergence de nouveaux variants.
  • De son côté, l’entreprise se défend en affirmant que les chercheurs ont fait des suppositions sur les mutations sans preuve concrète. Elle indique qu’ils ont tiré leurs conclusions en se basant sur des « associations circonstancielles ». Elle précise aussi que les mutations en question sont rares et liées à des cas isolés.

Plus de 5 milliards de dollars de ventes

En marge : Pendant ce temps, Merck a engendré d’opulents bénéfices grâce à ce médicament.

  • Les ventes de molnupiravir dans le monde ont atteint 5,68 milliards de dollars en 2022.
  • Cette année, l’entreprise prévoit toutefois une forte baisse à 1 milliard de dollars pour ce traitement. Cela signifie donc que les gouvernements s’appuient bien moins sur lui pour combattre le virus, et que celui-ci est moins présent. Une bonne nouvelle en soi.
    • Les ventes du médicament ont déjà chuté à 200 millions de dollars lors du troisième trimestre, en chute de 83% par rapport à plus d’un milliard l’an dernier lors de cette période.

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