Les constructeurs automobiles allemands fourbissent leurs armes pour combattre leur concurrent américain Tesla, avec pour enjeu la domination du marché des voitures électriques. Et selon les analystes, cette confrontation pourrait avoir des conséquences extrêmement importantes pour les deux parties.
‘Il y a un an, Porsche a lancé son nouveau modèle électrique Taycan’, écrit le journal américain New York Times. ‘Mercedes-Benz et Audi sont sur le point de suivre le mouvement. Tout comme Porsche avec la Taycan, ces deux constructeurs ont choisi de mettre sur le marché un modèle électrique totalement nouveau au lieu d’une version modifiée qui figurait déjà dans leurs catalogues.’
Jardin
‘Avec cette stratégie, les constructeurs allemands entendent défendre leur domination sur le marché mondial du luxe’, poursuit le New York Times. ‘Ces nouveaux modèles détermineront en effet si les constructeurs automobiles allemands sont capables de maintenir leur hégémonie dans les segments supérieurs du marché face à la concurrence de leur rival américain Tesla, qui construit littéralement une Giga Factory dans leur jardin – dans les forêts autour de Berlin – pour distribuer ses voitures sur le marché européen.’
‘Dans cette confrontation, une partie importante de l’économie allemande est également en jeu. Toutefois, cela vaut également pour Tesla, qui ne peut défendre sa valeur boursière de 658 milliards de dollars que si les investisseurs estiment que l’entreprise connaîtra un jour une croissance supérieure à celle des constructeurs automobiles traditionnels.’
‘Notre voiture électrique se devait d’être une véritable Porsche’, explique Stefan Weckbach, responsable du projet Taycan. Selon le New York Times, cette vision représente également l’approche des autres constructeurs allemands de voitures de luxe, qui passent aux modèles électriques après un démarrage tardif. Markus Duesmann, à la tête d’Audi, a déclaré qu’il était convaincu que la marque connaîtrait également le succès dans ce secteur grâce à ses qualités traditionnelles.
La pandémie de coronavirus a mis encore plus de pression sur les constructeurs automobiles traditionnels pour qu’ils se concentrent sur le développement des véhicules électriques. En effet, depuis le début de la crise, la demande pour des voitures à carburant fossile a fortement chuté.
D’autre part, les ventes de voitures électriques ont plus que doublé, en grande partie grâce aux incitations mises en place par les gouvernements. ‘En novembre, les voitures électriques représentaient une voiture neuve sur onze vendues en Europe occidentale’, souligne l’analyste Matthias Schmidt. ‘C’est un record.’
En Belgique, 12.256 voitures électriques ont été enregistrées entre janvier et novembre 2020, ce qui représente une hausse de 63,4% dans un marché global pourtant en chute de plus de 20% par rapport à 2019. Chez nos voisins français, l’augmentation a même encore plus marquée avec un bond de près de 160%, à plus de 110.000 véhicules électriques vendus l’an dernier.
Gouffre
Les Allemands possèdent des dizaines d’années d’expérience dans la fabrication de voitures haut de gamme. Tesla, fondée il y a 18 ans, a dû faire face à un certain nombre de problèmes en matière de fabrication et de qualité, même si le constructeur américain a su apprendre rapidement.
Pourtant, en ce qui concerne les voitures électriques, les constructeurs allemands sont clairement à la traîne par rapport à Tesla. La Model S de Tesla dispose d’une autonomie plus longue que la Taycan. De plus, cette dernière ne dispose pas de logiciels de conduite autonome. Or, de telles caractéristiques pourraient se révélées plus importantes que les performances pures pour de nombreux acheteurs de voitures.
‘Les constructeurs automobiles allemands essaient de combler ce gouffre technologique et espèrent rattraper Tesla avant qu’il ne soit trop tard’, écrit encore le New York Times. ‘Les premiers résultats de ces efforts feront bientôt leur apparition dans les showrooms.’
Le journal américain constate par ailleurs que BMW ne suit pas pour l’instant l’exemple de ses collègues allemands. Le constructeur ne prévoit de lancer une plateforme exclusivement électrique que pour la moitié de la décennie en cours. Pour l’instant, la firme se concentre sur des versions électrifiées de ses modèles conventionnels. BMW s’attend en effet à ce que les ventes de voitures électriques n’atteignent leur vitesse de croisière que d’ici quelques années.
Points faibles
Toutefois, le New York Times souligne que Tesla présente également certains points faibles. ‘Les ventes de la Model 3 sont restées relativement stables en Europe au cours des derniers mois’, explique le journal. ‘L’année précédente, la Model 3 avait encore pu enregistrer des ventes nettement supérieures à celles des constructeurs automobiles européens.’ Au cours des dix premiers mois de l’année dernière, la Model 3 a été dépassée par la Renault Zoé en tant que voiture électrique la plus populaire sur le marché européen.
Volkswagen tente de damer le pion à Tesla en matière de technologie des batteries. Avec pour objectif d’obtenir des coûts plus bas, des temps de chargement plus courts et une plus grande autonomie.
‘Si le constructeur allemand parvient à mettre cette technologie sur le marché avant Tesla, Elon Musk aura un problème’, estime Ferdinand Dudenhöffer, directeur du Centre Automotive Research à Duisburg.
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