L’enseignement de l’arabe comme rempart contre la radicalisation ?

Proposer des cours d’arabe à l’école pour freiner la radicalisation islamiste chez les jeunes : c’est ce que préconise Hakim El Karoui, expert sur l’islam et le monde arabe, dans son nouveau rapport publié sous l’égide du groupe de réflexion français Institut Montaigne. 

Dans ce document, il explique que les jeunes musulmans désireux d’apprendre l’arabe sont obligés de se tourner vers les mosquées pour suivre des cours de langue, où l’apprentissage est alors inévitablement lié à la question religieuse avec un risque de radicalisation plus élevé qu’il ne le serait dans une école publique laïque.

Pour réduire ce risque, il recommande de populariser les cours d’arabe à l’école – et du côté du gouvernement, il semblerait qu’on soit d’accord. Le ministre de l’éducation français Jean-Michel Blanquer a commenté dans une interview récente que l’arabe était une langue « très importante » qu’il fallait « développer » et à laquelle il fallait « donner du prestige ».

« Un rapport tombé dans l’amalgame aisé entre Islam et Islamisme »

Beaucoup ont critiqué le lien qu’El Karoui semble tracer entre langue arabe et islam fondamentaliste, ou sa proposition d’« islamisation » de la France selon les bords politiques. « Je regrette que ce rapport opportuniste et partial ait pu tomber dans l’amalgame aisé entre Islam et Islamisme, oubliant volontairement la communauté musulmane de France » a commenté Dalil Boubakeur, le recteur de la Grande Mosquée de Paris.

El Karoui se défend : « Il y a une demande pour des cours d’arabe très forte dans la société française, et cette demande n’est satisfaite presque que par les mosquées… et les mosquées en ont fait un élément majeur de leur attrait. »

À l’heure actuelle, on ne recense en France que 0,2%, soit 11 200 élèves qui apprennent l’arabe au collège et au lycée. Selon El Karoui, ce faible pourcentage est dû à plusieurs facteurs, notamment la politique gouvernementale d’assimilation des migrants arabes dans la société française et de lutte contre le communautarisme. De plus, l’arabe est considéré comme moins « prestigieux » que d’autres langues comme le russe ou le chinois, et les coupes budgétaires font que beaucoup d’écoles ont réduit ou éliminé leurs programmes de langue arabe.

L’enseignement de l’arabe plébiscité par les parents musulmans

Pourtant, la demande est là. En 2016, on comptait 5,7 millions de musulmans en France, soit 8,8% de la population, avec une majorité de jeunes entre 15 et 25 ans qui sont aussi le groupe le plus vulnérable face à la radicalisation.

En 2016 toujours, une grande enquête auprès des musulmans de France a montré que 67 % des parents musulmans désirent voir leurs enfants étudier l’arabe classique, et 56 % aimeraient que l’arabe classique soit enseigné à l’école.

L’intégration de la langue arabe dans le cursus scolaire aurait bien sûr d’autres avantages. La France et les pays du monde arabe partagent des liens étroits, et des élèves qui ne sont ni musulmans ni arabes pourraient aussi bénéficier de l’apprentissage de la langue arabe, de sa culture et de son histoire. 

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