Le fondateur de MolenGeek rejoint le CA de Proximus: une nomination largement saluée qui soulève aussi quelques questions

Un autodidacte de Molenbeek qui rejoint le conseil d’administration de Proximus. La nomination d’Ibrahim Ouassari, co-fondateur de l’école MolenGeek, approuvée cette semaine, n’a reçu que des commentaires positifs. Mais est-il suffisamment indépendant pour remplir correctement son rôle d’administrateur ?

Un choix non conventionnel. Il est entré sous les feux des projecteurs internationaux lorsque le CEO de Google, Sundar Pichai, – excusez du peu – est venu lui rendre visite au sein de ASBL MolenGeek, une école de codage qu’il a co-fondé à Molenbeek en 2015 avec Julie Foulon. L’organisation à but non lucratif propose des cours aux personnes défavorisées de divers horizons. L’entrepreneur autodidacte de 42 ans au parcours scolaire chaotique – ‘La dernière fois que j’ai obtenu mon diplôme à l’école, c’était en deuxième année du secondaire’, dit-il dans Het Laatste Nieuws – a été nommé mercredi pour 4 ans membre du conseil d’administration du groupe Proximus, dont l’État belge est le principal actionnaire, sur recommandation du MR.

Sa nomination ‘s’inscrit dans la volonté du MR d’introduire de nouvelles compétences et de la créativité dans les structures publiques’, a déclaré le président du parti Georges-Louis Bouchez. ‘Le choix concrétise aussi le rajeunissement, la féminisation et la diversification de nos équipes.’ Une volonté concrétisée également par la nomination de Géraldine Demaret (34 ans) comme présidente de la Loterie nationale. Elle qui est actuellement cheffe de cabinet adjointe du ministre des Indépendants David Clarinval (MR). On pourrait aussi ajouter ‘la famille’: puisqu’elle n’est autre que la sœur de la petite amie de Georges-Louis Bouchez. Bref.

Une récupération politique du sympathique projet de MolenGeek, répondent les détracteurs, mais Ouassari lui-même fait l’éloge de ‘l’audace’ du président du MR de proposer quelqu’un comme lui.

Cette nomination a également conduit à des compliments cordiaux mutuels entre l’intéressé et le PDG de Proximus, Guillaume Boutin. De bonnes relations entre le conseil d’administration et la direction ne sont bien entendu pas interdites, mais les règles de gouvernance d’entreprise dans une grande société cotée exigent une certaine distance. Après tout, une tâche importante du conseil d’administration est de superviser la gestion quotidienne et, si nécessaire, de réprimander son PDG.

Proximus, Parrain de MolenGeek

Cependant, les liens entre MolenGeek et la direction de Proximus sont étroits, car le groupe télécom est un sponsor de l’association depuis fin 2019. Proximus met à disposition toutes sortes de matériels télécoms, y compris des capteurs pour l’IoT (Internet of Things), et organise également des formations et des stages pour les étudiants de MolenGeek.

Ouassari, qui a postulé pour un emploi chez Proximus dans un passé lointain, sans succès, aspire à une coopération encore plus étroite. ‘Je souhaite enseigner à Proximus quelque chose, à partir de ma propre expertise en matière de technologie numérique, de start-up et d’inclusion. Ce serait formidable pour moi, pour Proximus et en fait pour toute la Belgique si je pouvais y intégrer nos opérations’, a déclaré Ouassari à Bruzz.

Ouassari devient administrateur d’une entreprise qui parraine sa propre organisation à but non lucratif. Les conflits d’intérêts peuvent être évités s’il quitte la salle, dans le cas où le conseil d’administration envisagerait des décisions stratégiques liées à des projets inclusifs tels que MolenGeek. Mais le CA se priverait de son expertise en matière d’inclusion et de parcours alternatifs, alors qu’il a précisément été choisi pour cela.

Plusieurs commentateurs saluent les qualités de Ouassari, qui s’y connaît au moins en télécoms, et certainement plus que les administrateurs nommés purement sur une base politique comme De Clerck (CD&V) et Karel De Gucht (Open Vld). C’est également une bonne chose qu’un conseil d’administration d’une grande société cotée en bourse s’efforce de recruter dans la diversité, afin de mieux refléter la société et les clients. Mais le mieux reste encore d’éviter toute sorte de conflits d’intérêt.

Un siège au conseil d’administration de Proximus implique toujours une indemnité annuelle totale comprise entre 77.000 EUR à 110.000 EUR. Un administrateur perçoit un jeton de présence annuel fixe de 25.000 euros, un jeton de présence de 5.000 euros par réunion (dix par an) et des jetons de présence supplémentaires de 2.500 euros par réunion d’un comité consultatif.

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