Hyperledger, le projet de blockchain de la Fondation Linux, rassemble des scientifiques et des programmeurs pour développer un langage numérique pour les données climatiques.
Hyperledger a annoncé l’ambitieux projet lors du Forum économique mondial de Davos, en Suisse. Les initiateurs espèrent construire un système de communication standardisé pour les données climatiques. Il ouvre la voie à une comptabilité que les gouvernements et les entreprises peuvent utiliser.
De quelles données s’agit-il exactement ?
Ces données peuvent concerner les engagements d’émissions de CO2 des entreprises et des États, l’impact calculé des actions climatiques et des nouvelles technologies, ou encore des données sur le commerce des quotas d’émission. Mais on retrouve aussi des données sur le cœur du sujet : l’état de la planète elle-même.
L’écosystème Hyperledger espère que l’enregistrement de toutes ces indicateurs rendra possible un système de comptabilité climatique ouvert. L’Université de Yale, qui a déjà effectué des recherches dans ce domaine, mène le groupe de travail.
Pourquoi une comptabilité climatique est-elle nécessaire ?
‘L’accord de Paris fournit le cadre mondial pour empêcher la Terre de se réchauffer de 1,5 degré au-dessus des niveaux préindustriels. Mais il ne fournit pas de mécanisme clair qui oblige toutes les parties concernées à «parler le même langage» pour suivre et gérer les données et les actions relatives au climat’, motive le groupe de travail.
‘La comptabilité peut être ennuyeuse, mais elle est nécessaire’, explique Koen Vingerhoets, expert en blockchain du cabinet de conseil Deloitte. ‘Vous ne pouvez pas poursuivre une politique climatique mondiale coordonnée si les acteurs ne parlent pas la même langue et n’ont pas de moyen de discuter’.
Le secteur financier est également intéressé. La Banque de France et BlackRock, entre autres, ont plaidé ces derniers jours en faveur de rapports plus clairs sur les questions climatiques.
Qu’est-ce que Hyperledger ?
Hyperledger est un partenariat mondial de quatre ans autour de la technologie blockchain sous la direction de la Linux Foundation, la fondation du système d’exploitation éponyme. Tout comme dans Linux, le principe de ‘l’open source’ s’applique : le logiciel est accessible librement et tout le monde peut apporter des améliorations.
Il s’agit d’un cadre pour de nombreux projets de blockchain. La plupart des applications tournent autour de l’échange de données commerciales, comme les contrats intelligents ou le suivi de la chaîne d’approvisionnement internationale d’une entreprise.
Qui est membre ?
Plus de 275 organisations et entreprises ont depuis rejoint Hyperledger. Il s’agit de sociétés technologiques telles qu’IBM, Microsoft, SAP, Intel ou Huawei, de sociétés industrielles (Airbus et Daimler) ou encore des banques à l’instar de Deutsche Bank et JP Morgan. Les gouvernements et les universités participent également.
Hyperledger a reçu un coup de pouce l’été dernier avec l’entrée de l’un des principaux acteurs des logiciels d’entreprise, Microsoft. ‘En termes d’échelle et de présence mondiale, Hyperledger est bien placé pour surveiller le changement climatique’, explique Vingerhoets.
Pourquoi la blockchain ?
‘La technologie va standardiser et enregistrer le transfert de données, ce qui rend possible l’approche globale du changement climatique. Chaque parti doit rendre compte de la même manière’, a déclaré Vingerhoets. ‘De plus, avec la blockchain, on ne peut modifier l’historique, ce qui rendra plus difficile pour les pays ou les entreprises de modifier les données précédentes.’
Quel sera le résultat final ?
Selon Vingerhoets, impossible à prévoir dans cette phase de démarrage, mais il ne pense pas qu’il y aura un grand super réseau pour la comptabilité climatique. ‘Cela ne me semble pas réaliste. Il est plus probable que le projet aboutisse à une sorte de langage standard qui relie des systèmes de communication distincts.’
La grande question est : qui paiera tout ? La blockchain n’est pas une technologie onéreuse, mais il y aura toujours des coûts associés à ce projet, par exemple dans le domaine de l’intégration et de la normalisation informatique. De plus, un aspect juridique est également inévitable. Et s’il y a un ‘bug’ dans le système ? Qui est alors responsable ?
De nombreuses questions persistent donc. Il est également urgent maintenant que le climat figure en bonne place sur l’agenda politique. Vingerhoets : ‘Internet a également commencé comme système d’échange de documents de recherche dans les universités. Et regardez le chemin accompli.’