L’avortement déchire ‘le trio’: le CD&V menace de lâcher le MR, le Conseil d’État à la rescousse

Un assouplissement de la loi sur l’avortement, ce monstre du Loch Ness qui ne cesse d’apparaître à la Chambre, surgit à nouveau. Le président du MR, Georges-Louis Bouchez, a soudainement laissé ses députés ‘libres’ de voter, irritant ainsi ses potentiels partenaires de coalition, le cdH, la N-VA, mais surtout le CD&V. Le renvoi du projet de loi devant le Conseil d’État est une solution temporaire, mais la question laissera de toute façon des stigmates au sein du trio.

Dans l’actualité: Un projet de loi sur l’extension et la dépénalisation de l’avortement met (une fois de plus) en danger une potentielle coalition gouvernementale.

Les détails: Le MR rendrait la formation d’une coalition Arizona plus difficile qu’elle ne l’est déjà. Et ce n’est pas une première selon nos interlocuteurs.

  • Pendant plusieurs jours, Bouchez a au moins autant essayé d’éviter une éventuelle coalition que d’en créer une: sans le PS, mais avec la N-VA, le cdH et le sp.a. D’abord, suite à un drôle de soap avec le sp.a, mais les choses se compliquent encore un peu plus quand trois autres partis entre en scène: cdH, N-VA et CD&V en particulier.

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  • La relation avec ce dernier est pour le moins tendue, nous revient-il: Le CD&V et le MR tentent ensemble pourtant de remplir une ‘mission’, mais d’une quelconque loyauté il n’a jamais été question. Sans aucune concertation avec son collègue négociateur, Bouchez a lancé une petite bombe ce matin: ses députés sont ‘libres’ de voter ‘en leur âme et conscience’ l’assouplissement de la loi sur l’avortement, qui figure à l’agenda de la Chambre aujourd’hui. En faisant cela, Bouchez se doutait bien qu’il allait instantanément se mettre à dos le CD&V: depuis des mois maintenant son président, Joachim Coens, clame que quiconque veut un accord avec le CD&V doit s’aligner avec lui sur ce thème.
  • Mais l’Open Vld a également été mis sur la sellette: la semaine dernière encore, le chef de groupe Vincent Van Quickenborne (Open Vld) avait annoncé que le dossier serait reporté à septembre. La sortie du président du MR ce matin est donc une sorte de gifle au visage du parti frère flamand.
  • ‘Si c’est comme ça, il n’y a plus de trio’, menace-t-on au siège de CD&V. ‘Ce n’est pas comme ça que l’on traite avec des partenaires de gouvernement.’ Le CD&V se plaint depuis un certain temps d’un manque de respect: la relation avec le MR s’est grandement détériorée. Mais savoir si cela signe vraiment la fin du trio est une autre affaire: il y a eu des périodes plus émotionnelles durant les négociations.
  • Il semble de plus en plus clair que le MR se démène tant qu’il peut pour faire échouer la coalition Arizona. Ce ne serait pas nouveau: durant ces nombreux mois de négociation, le MR a plus d’une fois pratiqué un double langage. Pourquoi? Parce que ne rien faire, et laisser les choses échouer, signifie continuer à jouir de six portefeuilles ministériels et du poste de Premier ministre.
  • En coulisses, l’Open Vld en particulier et les opposants à la réforme de l’avortement se sont activés pour trouver une solution (temporaire). Elle consiste à renvoyer le dossier devant le Conseil d’État pour avis, et ce pour la 3e fois. Mais il fallait pour cela au moins 50 votes à la Chambre, ce que possèdent ensemble la  N-VA, le Vlaams Belang, le CD&V et le cdH.
  • De cette façon, les partis qui négocient l’Arizona gagnent du temps. Mais c’est un énième coup sous la ceinture de ceux qui essayent de mettre sur pied une coalition.
  • Précisons encore que la réforme entend supprimer complètement l’avortement du code pénal, réduire le délai de réflexion pour les femmes à 48 heures et porter la période d’interruption volontaire de grossesse à 18 semaines. Un compromis édulcoré pourrait convenir aux démocrates-chrétiens, mais le bloc arc-en-ciel à la Chambre, complété par le PVDA/PTB, n’a pas voulu en entendre parler jusqu’à présent.
  • Le dossier ravive les tensions entre le nord et le sud. 61% des députés flamands à la Chambre (Open VLD, N-VA, CD&V et Vlaams Belang) ayant voté pour un report devant le Conseil d’État. Côté francophone, le cdH se sent bien seul.
  • Certains accusent le CD&V de mettre ‘le droit des femmes’ dans la balance contre une formation gouvernementale. D’autres défendent la nuance, la loi comportant des zones d’ombres selon eux. Il s’agit en tout cas d’un dossier qui a enflammé les débats hier dans et hors de l’hémicycle.

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