La devise chinoise connaît une année forte. Selon différents index, elle gagne en valeur. Même si la croissance chinoise est au ralenti, les exportations et les obligations d’Etat donnent du grain à moudre à la monnaie. Une ascension qui n’est pas sans risques pour l’économie chinoise.
La Chine et ses soucis économiques de ces derniers mois, c’est une chanson connue. Retards dans la chaine d’approvisionnement, ralentissement de la croissance, crise du secteur de l’immobilier, Covid et confinements. Mais malgré tout, la devise chinoise, le yuan, se porte bien.
Une montée en flèche de 8% en 2021, calcule le CFETS RMB Index, un index qui compare la devise à 24 autres monnaies. Elle est alors à un poil (0,26%) de son précédent pic, enregistré en novembre 2015.
Le yuan fait également de meilleures performances que le dollar, note CNN, même si la Fed est en train de préparer des hausses des taux d’intérêt. Le yuan gagne aussi du terrain par rapport à son concurrent: il a augmenté de 2,4 et/ou 2,8% contre le dollar, dépendant du point de vue de l’échange, en Chine ou dans le reste du monde. Ce critère (les deux taux) est également à un niveau qui n’avait plus été atteint depuis un moment. Le dollar vaut aujourd’hui 6,34 yuans, le meilleur score depuis mai 2018.
« La meilleure performance de l’année », pour Marc Chandler de Bannockburn Global Forex, une entreprise américaine spécialisée dans le trading. Becky Liu, spécialiste de la Chine pour Standard Chartered, impute cette performance à des exports en masse, et des remboursements juteux sur des obligations de l’Etat chinois. Elle voit cette montée continuer l’année prochaine : jusqu’à 6,30 yuans le dollar. Goldman Sachs prédit la même évolution.
En 2005, le gouvernement chinois avait réévalué sa devise. Depuis, la plus haute valeur du yuan a été à 6,01 pour un dollar, en 2014.
Avantages et désavantages : une balance
D’un côté, si le yuan est fort, les banques centrales vont constituer des réserves, et ainsi promouvoir son utilisation à échelle internationale. Les importations vont aussi devenir moins chères pour la Chine, ce qui peut aider à faire baisser l’inflation, surtout que le Chine achète beaucoup de produits en dollars.
Mais d’un autre côté, un désavantage d’un yuan fort peut également frapper l’économie chinoise. Ce qui rend la question quelque peu épineuse. Plus le yuan est fort par rapport au dollar, plus les exportations vont devenir chères (pour les pays acheteurs), et moins compétitives. Alors que ce sont ces exportations justement qui favorisent la bonne situation du yuan. Une balance semble alors devoir être trouvée.
C’est que les exportations sont vraiment importantes pour l’économie chinoise, qui est déjà touchée par plusieurs autres défauts. Sur le mois de novembre, les envois depuis la Chine ont comptabilisé en total 325,5 milliards de dollars, 22% de plus que le même mois l’année dernière. Sur tous les 11 mois de l’année, elles ont augmenté à plus de trois billions (trois mille milliards), ce qui est déjà plus que l’entièreté de 2020. Une année de pandémie certes, mais où la Chine a fait son possible avec des politiques sanitaires strictes, pour éviter les interruptions connues notamment par des pays tels l’Indonésie ou le Vietnam.
Des obligations d’Etat
A échelle internationale, ces obligations séduisent. Durant les huit derniers mois, la somme totale (détenue par des investisseurs étrangers) n’a fait qu’augmenter, pour atteindre 3,9 billions de yuans (540 milliards d’euros), selon la Banque centrale (Banque populaire de Chine, PBOC). D’ici la fin de l’année, ce chiffre pourrait atteindre les quatre billions.
Le rendement sur ces obligations est de 2,9%, sur dix ans. Le rendement d’une obligation publique américaine sur la même période de temps n’est que de 1,44%.
Vers une stabilisation ?
L’Etat chinois ne laisse pas libre cours à sa monnaie. La PBOC a déjà annoncé que les institutions financières devaient garder davantage de monnaies étrangères en réserve, ce qui est interprété comme une tentative de tempérer la hausse du yuan. Elle a aussi demandé aux entreprises ne pas faire de paris spéculatifs sur la monnaie.
Selon Becky Liu, l’Etat n’interviendra cependant pas directement. On ne le verra pas de sitôt acheter des dollars et vendre des yuans, estime-elle. Une augmentation des taux d’intérêt, par les États-Unis, devrait également freiner la hausse du yuan (sans l’arrêter), car la Chine assouplit ses politiques monétaires. Goldman Sachs estime encore que la hausse continuera, mais de manière « plus graduelle ».