Comment la fiscalité actuelle sur les comptes d’épargne permet aux épargnants belges d’échapper (sans le savoir) aux impôts

Ceux qui possèdent plusieurs livrets d’épargne commettent parfois (sans le savoir) une fraude fiscale. Dans notre pays, vous bénéficiez d’une exonération fiscale sur les 980 premiers euros d’intérêts. Le problème, c’est que les banques l’appliquent chacune individuellement. « Et c’est ainsi que de nombreux épargnants bénéficient de l’exonération à plusieurs reprises de manière totalement injuste », écrit Anton Van Zantbeek, avocat chez Rivus et professeur invité à la Fiscale Hogeschool, dans une chronique sur Trends.be.

Pourquoi est-ce important ?

Le compte d'épargne continue à se porter extrêmement bien dans notre pays. Au total, pas moins de 300 milliards d'euros reposent sur les comptes d'épargne. Comme la fraude fiscale est parfois commise (sans le savoir) via l'exonération fiscale, le fisc perd donc des recettes. Une réforme pourrait apporter un soulagement.

Dans l’actualité : L’épargne dans notre pays est protégée par le système de garantie des dépôts jusqu’à 100 000 euros par personne et par institution financière. Cette protection s’applique en cas de faillite de la banque. Cela pousse de nombreux Belges à posséder plusieurs comptes d’épargne pour protéger au mieux leur capital.

  • Van Zantbeek, avocat chez Rivus et professeur invité à la Fiscale Hogeschool, prévient dans une chronique sur Trends.be que, de ce fait, les épargnants commettent parfois (sans le savoir) une fraude fiscale.
  • Tout est lié au traitement fiscal avantageux des comptes d’épargne réglementés. Sur les 980 premiers euros, vous ne devez pas payer de précompte mobilier. Dès que vous possédez plus d’argent, vous devez au fisc un impôt de 15 % sur tout ce qui dépasse ce montant plafond. « Les banques appliquent chacune séparément cette exonération fiscale. Elles ne se parlent pas entre elles, ce qui facilite la fraude fiscale des épargnants », explique l’avocat.
  • En principe, les épargnants doivent ensuite déclarer eux-mêmes le précompte mobilier dû à l’impôt des personnes physiques. « Mais cela ne se passe guère dans la pratique. Chaque année, il n’y aurait que quelques milliers d’épargnants qui procèdent spontanément à cette rectification », relève Me Van Zantbeek.

Responsabilité des pouvoirs publics

Propositions : L’avocat pointe un doigt accusateur en direction du gouvernement. « Malgré les critiques de l’OCDE et de la Commission européenne, les condamnations des tribunaux, les nombreuses recommandations académiques… personne n’ose s’attaquer à la fiscalité du compte d’épargne », se fait-il l’écho.

  • Dans sa chronique, il plaide en faveur d’un ajustement de l’exonération fiscale. Selon lui, elle devrait se situer au-dessus de la déclaration de revenus.
  • En outre, il préconise d’étendre l’exonération à tous les revenus mobiliers, comme les obligations et les dividendes.

Réforme fiscale

Projet : Le ministre des Finances Vincent Van Peteghem (CD&V) a déjà fait un petit pas l’année dernière pour adapter l’exonération fiscale. Dans le projet de réforme fiscale que le ministre a communiqué en juillet, on peut lire qu’il veut exonérer d’impôts les premiers 6 000 euros de revenus du capital (par an). Dès que votre capital rapportera plus d’argent, vous devrez payer un précompte mobilier sur tous les revenus dépassant ce montant plafond, y compris les revenus de l’épargne. Soit dit en passant, M. Van Peteghem souhaite réduire cet impôt de 30 à 25 %.

  • « En défiscalisant un montant de revenus provenant de l’épargne, des placements et de l’investissement, nous veillons à ce que le petit épargnant ou le petit investisseur ne soit pas affecté et à ce que chacun puisse se constituer un patrimoine », a-t-il lancé en juillet.
  • La question est de savoir s’il y aura effectivement un tel ajustement. Van Peteghem a demandé l’avis de la Banque nationale et de l’organisme de surveillance financière FSMA sur une modification de l’exonération fiscale à l’automne 2022.
  • Le ministre a informé le Parlement fin novembre – à la demande du président du groupe parlementaire fédéral Peter De Roover (N-VA) – qu’il avait reçu ces avis. « Ceux-ci sont pleinement examinés par mes services, mais j’envisage effectivement toutes les options pour me conformer au dictum de la Cour de justice européenne et aussi aux objections de la Commission européenne », avait-il alors déclaré.
  • Il ajoutait que cette démarche devait prendre en compte l’impact sur la stabilité financière de notre système bancaire, mais aussi la transparence du compte d’épargne vis-à-vis de l’épargnant. « Un équilibre doit être trouvé entre ces différents objectifs », concluait-il.

BL

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