Le loyer moyen, tout comme le loyer médian, explose à Manhattan. Les personnes qui voulaient acheter un bien, mais ont annulé leurs projets à cause de l’augmentation des taux d’intérêt, représentent une tension supplémentaire pour la demande. Les prix ne sont pas près de rechuter de sitôt.
New York City, les panneaux luminaires de Times Square et l’imaginaire du rêve américain. Mais dans la grosse pomme, les loyers s’envolent presque aussi haut que ses gratte-ciels emblématiques.
Le loyer moyen dépasse, pour la toute première fois, 5.000 dollars par mois à Manhattan, le « centre-ville ». Pour le mois de juin (là où l’inflation américaine, sur un an affiche, 9,1%), il s’établissait à 5.058 dollars, soit 30% de plus qu’en juin 2021, rapporte CNN Business, citant les chiffres de la société de courtage Douglas Elliman et de la société de consultance de l’immobilier Miller Samuel Real Estate Appraisers and Consultants. À titre de comparaison, un appartement à Paris, ville réputée pour ses prix de l’immobilier élevés, se loue 1.600 euros en moyenne, et 4.200 euros pour une maison. Dans notre capitale, le loyer moyen affiche 1.181 euros.
Les appartements luxueux, perchés dans les hauteurs des immeubles qui comptent des centaines d’étages, avec une vue splendide sur Central Park, peuvent en effet être très chers et viennent perturber la moyenne, mais le loyer médian (une mesure statistique qui a pour but d’éviter l’effet d’un élément extrême dans une série de chiffres) explose également. Lui aussi, pour la première fois dans l’histoire, dépasse un cap : celui de 4.000 dollars. Pour le mois de juin, il affiche 4.050 dollars, soit 25% de plus qu’en juin 2021. Il a en fait battu son record historique cinq fois à la suite durant les cinq mois passés.
Ceux qui annulent leurs plans d’achats
L’inflation, l’offre et la demande (le taux de biens vacants est de moins de 2%, et cela depuis sept mois consécutifs, contre 7% il y a un an), la reprise après la pandémie qui peut attirer plus de travailleurs internationaux, par exemple, tout cela peut avoir un impact haussier sur les prix. Mais un autre élément vient aussi gonfler les chiffres : les personnes qui avaient pour objectif d’acheter un bien immobilier abandonnent leurs plans, et restent (ou plutôt reviennent) sur le marché locatif, et la demande augmente d’un cran.
« Vous avez plus de gens qui pivotent, ils étaient sur le point d’acheter une maison, mais maintenant avec les taux hypothécaires qui montent en flèche, ils se retrouvent sur le marché de la location », explique Jonathan Miller. « Le marché est déjà tendu. Cela le met encore sous pression ». C’est que ces personnes ont un pouvoir d’achat plus important, et doivent souvent héberger toute une famille. Ils sont à la recherche de quelque chose de plus grand, ce qui fait augmenter les moyennes.
Un appartement trois chambres par exemple coûte en moyenne 9.469 dollars par mois (contre 7.394 il y a un an, soit +28%). C’est environ le double d’un appartement une chambre, qui vaut 4.278 dollars (soit 23% de plus que les 3.475 d’il y a un an).
Où s’arrêtera la flambée?
L’effet de chute du marché, au plus fort de la pandémie, semble bel et bien résorbé. Par rapport à juin 2019, les prix moyen et médian ont augmenté de respectivement 19 et 14%. Et cette flambée ne semble pas près de s’arrêter. « L’activité de nouveaux baux à Manhattan ne culmine pas avant la fin de l’été », analyse Miller. « Sauf en cas de récession, nous nous attendons à une augmentation saisonnière de la demande, ce qui accentue la pression à la hausse sur les loyers. »
« Rien n’augmente éternellement, mais à court terme, nous sommes prêts pour de nouveaux gains », continue Miller. Il estime qu’à partir d’un moment, en automne où l’année prochaine, il y aura un plafond, ou cela deviendra trop cher pour les locataires. Mais les prix seraient alors toujours plus susceptibles de se stabiliser que de chuter.
Mais au final, il reste encore des incertitudes qui auront aussi un impact sur le marché. « Dans l’état actuel des choses, je ne suis pas sûr de ce qui fait baisser les loyers. Mais une récession est l’astérisque dans la conversation. La Fed s’attaque à l’économie à coups de batte de baseball et d’autres hausses de taux sont à prévoir. Il y a encore énormément d’incertitude », conclut-il.