Voitures électriques: gare aux désillusions, elles risquent d’être nombreuses…

Si l’avenir de la mobilité appartient assurément à la voiture électrique, l’engouement extrême des investisseurs pour les nouveaux acteurs de ce marché en pleine croissance pourrait réserver bien des désillusions, prévient le fondateur du gestionnaire d’actifs Research Affiliates, Rob Arnott.

‘Tout comme PalmPilot, autrefois très apprécié des investisseurs, s’est fait dépasser dans la révolution des smartphones, tous les constructeurs ne réussiront pas à l’ère des véhicules électriques’, souligne Rob Arnott auprès de l’agence Bloomberg. L’homme met donc en garde contre ce qui pourrait s’avérer n’être finalement qu’une ‘illusion de grande ampleur’ pour de nombreux investisseurs.

Il faut dire que les prévisions ont de quoi faire tourner bien des têtes. Selon le Boston Consulting Group, les véhicules électriques devraient recouvrir une part de marché de 52% d’ici 2030. Le géant allemand Volkswagen estime que 70% de ses ventes seront électriques d’ici la fin de la décennie en Europe. Et on en passe…

‘Toutes ces entreprises sont valorisées comme si elles allaient sortir grande gagnante’

Des espoirs qui se reflètent dans les valorisations démesurées des nouveaux acteurs de ce marché prometteur. La star des constructeurs de voitures électriques, Tesla, est par exemple cotée 28 fois la valeur de son chiffre d’affaires. Son futur concurrent Nikola, qui n’a pas encore sorti d’usine un seul véhicule, affiche lui un ratio de PSR (capitalisation-chiffre d’affaires) de 22.000 ! Et du côté des acteurs chinois, Xpeng et Li Auto sont côtés respectivement à 47 et 52 fois la valeur de leurs ventes. Chez les constructeurs traditionnels, ce ratio tourne en moyenne autour de 1,1…

‘Quand bien même Tesla arriverait à remplir les espoirs des investisseurs, cela signifierait que ses rivaux auront perdu des parts de marché, ce qui rendra les gains de l’industrie encore plus difficiles à justifier’, explique encore Rob Arnott, qui ajoute que ‘toutes ces entreprises sont valorisées comme si elles allaient sortir grande gagnante de la compétition. Mais chacune ne pourra pas devenir dominante: ce sont des concurrents.’

‘Les disrupteurs sont souvent eux-mêmes disruptés’

Pour étayer ses propos, Rob Arnott cite l’exemple du transport aérien, un environnement également hautement compétitif et doté d’une forte intensité en capital. En effet, de la grande vague des compagnies low cost qui ont déferlé sur le marché au tournant des années 2000, seules quelques-unes sont parvenues à résister à la réaction des acteurs traditionnels, les autres ayant fait faillite.

‘Dans un tel environnement, le bouleversement du marché ne profite pas nécessairement aux disrupteurs, et les disrupteurs sont souvent eux-mêmes disruptés’, note l’analyste de Research Affiliates. Idem dans le secteur de la technologie. Pour quelques Apple ou Google, combien de sociétés n’ont pas effectué la culbute?

‘Nous suspectons qu’à mesure que la concurrence des véhicules électriques s’intensifiera, de nombreuses entreprises feront faillite, comme ce fut le cas lors de précédents booms industriels – qu’il s’agisse d’automobiles, de compagnies aériennes ou de technologies – et qu’avec le temps, la valeur totale de l’industrie retombera à des niveaux plus raisonnables’, conclut Rob Arnott.

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