Pour les 49 millions d’Américains qui ont déjà voté, ce débat était peine perdue, mais le dernier face-à-face prévu entre le président Trump (74 ans) et Joe Biden (77 ans) s’est tenu jeudi soir à l’université de Belmont à Nashville, dans le Tennessee.
Durant les 24 heures qui ont précédé le débat, deux sujets ont dominé l’actualité américaine. Tout d’abord, l’attention s’est portée sur l’ingérence russe et iranienne dans les élections. En outre, un ancien associé du fils de Joe Biden (Hunter Biden) a également attiré l’attention des médias. Tony Bobulinski a confirmé l’authenticité d’un courrier récemment dévoilé au New York Post, qui mentionnait un accord chinois dont un profit de 10% aurait été dégagé en faveur du ‘grand patron’. D’après l’équipe Trump, il s’agirait de Joe Biden. Mais cette histoire avait été ignorée et décrédibilisée par la plupart des gros médias américains.
Alors que Trump avait relancé sa campagne à la dernière minute en 2016 en fustigeant Hillary Clinton, il semblerait qu’il ait tenté d’adopter la même tactique avec Biden. Mais en 2020, la situation est loin d’être idéale. L’Amérique est à l’arrêt et une seconde vague se déclare, alors que 13 millions d’Américains sont déjà au chômage.
Lors du premier débat, Trump avait interrompu Biden 71 fois, Biden, lui avait coupé Trump 22 fois. Choquée, l’Amérique avait réclamé un débat ‘plus mature et civilisé’. Hier soir, la modératrice et journaliste de la NBC, Kristin Welker, a fait un travail remarquable et a gardé les deux candidats sous contrôle.
Covid 19
La discussion au sujet du Coronavirus n’était qu’une ‘répétition’ du précédent débat, au cours duquel chacun a évoqué ses propres chiffres, avec un Trump sur la défensive, qui n’a pas montré la moindre empathie pour toutes les familles touchées par le Covid. Seule différence avec le débat de Salt Lake City : ses réactions étaient plus civilisées que jamais, mais on savait que c’était juste une question de temps.
L’affaire Hunter Biden
Trump était impatient d’évoquer l’affaire Hunter Biden, mais il a dû attendre 20 minutes. Il a aussi accusé Biden d’avoir reçu 3,5 millions de dollars de la femme du maire de Moscou. Biden a formellement nié avoir jamais reçu de l’argent d’une quelconque puissance étrangère et a relancé Trump sur sa déclaration d’impôts. Ce à quoi Trump a répondu – comme il y a quatre ans – qu’il publierait sa déclaration d’impôts ‘une fois l’audit terminé’.
L’Obamacare
Le système de santé américain a également été abordé. Début novembre, la Cour Suprême pourrait tabler sur une décision au sujet de l’Obamacare, et des millions de personnes risquent de perdre leur assurance maladie. Rien de nouveau ici non plus. Alors que Trump n’a jamais réussi à formuler un plan clair au cours des quatre dernières années, Biden dit vouloir combiner à cela une sorte d’assurance publique, ce qui laisserait aux citoyens la liberté de rester chez leur assureur privé si ce dernier leur convient.
Le deuxième programme de relance
Ici aussi, rien de vraiment nouveau. Trump a accusé Nancy Pelosi de bloquer l’accord, Biden a rejeté la faute sur les républicains. Le vice-président a également plaidé pour un salaire minimum de 15 dollars de l’heure. Trump, lui, est contre et souhaite qu’une règle soit établie par État plutôt qu’à échelle nationale.
Immigration et minorités
Lorsqu’on lui demande comment il compte s’y prendre pour réunir des familles, alors que 545 enfants ont été séparés de leurs parents à la frontière, Trump répond que ces enfants ont été amenés dans le pays par des gangs et des criminels et qu’ils sont bien pris en charge dans des institutions spéciales. Biden, lui, a répondu que cette affaire était inimaginable et que cela donnait une image très négative des États-Unis.
Le sujet des minorités a également été abordé. Trump a répété que ‘personne dans l’histoire n’a fait plus pour la communauté noire et hispanique’ que lui. Il a aussi souligné à plusieurs reprises que Biden avait établi de nombreux plans pour aider les minorités, mais que rien n’avait été fait de façon concrète sous l’investiture d’Obama. Le président a ajouté que sous son règne, l’Amérique est pour la première fois de son histoire indépendante sur le plan énergétique.
Biden souhaite que les États-Unis jouent un rôle de premier plan sur le climat et promet des millions ‘d’emplois verts’. Il affirme que ses projets sont soutenus par Wall Street.
Conclusion
Biden n’a pas toujours été cohérent dans ses discussions, ce qui laisse certaines questions sans réponse. Trump, lui, a toujours du mal à faire preuve d’une quelconque empathie envers les minorités, les victimes de Covid, les enfants divorcés, etc. Et, selon les fact-checkers, les candidats n’ont pas été des plus honnêtes l’un envers l’autre, mais on fait une prestation bien meilleure qu’il y a 3 semaines.
Bref, un débat civilisé dont la modératrice Kristin Welker et le peuple américain – après la débâcle d’il y a 3 semaines – sont les gagnants de la soirée. Aucun des deux candidats n’a en effet le talent oratoire de Barack Obama, mais ce n’est pas nouveau.
Certains électeurs changeront-ils d’avis ? Les chances sont minces : les partisans de Trump seront d’autant plus confortés dans leurs convictions, alors que Biden n’a jamais rien dit qui puisse le discréditer en tant que futur président. Fox News a évoqué ‘un tirage au sort’. Le présentateur Anthony Kapel dit Van Jones (CNN) a dit exactement la même chose. Attendez-vous donc à voir de nombreux extraits de vidéos dans les jours à venir, dans lesquels tentera chacun de défendre son propre camp.