Pour se protéger des missiles nucléaires, l’US Air Force parie sur les champs de force et les armes à énergie

Les militaires américains imaginent déjà l’arsenal des années 2060. Et face aux risques de nouvelle prolifération nucléaire, les armes à « énergie dirigée » sont vues comme une piste intéressante pour intercepter des projectiles, y compris des missiles nucléaires.

Alors que la Chine multiplie les chantiers de silos nucléaires ces dernières semaines et que la Russie dit expérimenter tout un arsenal d’armes miracles et généralement atomiques, les traités de non-prolifération semblent de bien peu de valeur. Les forces militaires américaines réfléchissent activement à des parades efficaces face à ces menaces, et les laboratoires de recherche de l’US Air Force se penchent très sérieusement sur le potentiel des champs d’énergie dirigée.

Les premiers canons lasers

Le rapport Directed Energy Futures 2060 évoque longuement les usages possibles d’une technologie basée sur la « Directed Energy » (DE), soit un arsenal de nouvelles armes qui projettent de l’énergie dans une direction voulue sans avoir besoin d’un projectile. Un concept qui ne relève plus de la science-fiction : des armes électromagnétiques théoriquement « non létales » sont envisagées pour la répression des manifestations, et de plus en plus d’armées déploient des engins utilisant la technologie laser. Celle-ci est capable de détruire à distance des engins explosifs avec une grande précision, y compris en vol : drones, projectiles, et même missiles. De véritables canons-antiaériens lasers sont même testés depuis quelques années.

De là à arrêter des missiles nucléaires, dont les dernières générations se déplacent à des vitesses supersoniques ? Pas pour tout de suite. Mais le rapport de l’US Air Force a pour but d’envisager les applications possibles des DE d’ici à 2060: « Décrire le champ des futurs possibles pour les énergies dirigées et explorer les caractéristiques et les implications de chaque scénario envisagé du point de vue de la puissance nationale et militaire » ainsi que de « Déterminer les capacités minimales essentielles et les actions requises pour mettre au point une stratégie DE qui rencontre les besoins de l’armée. »

De là à déployer au-dessus d’une région un véritable bouclier fait d’énergie, comme autour des vaisseaux spatiaux de nombre d’univers de SF ? À supposer que ça soit possible, ça serait sans doute trop gourmand à maintenir en place. Mais des batteries d’émetteurs d’ondes capables de cibler une zone en danger de bombardement pour éliminer les missiles plus rapidement et plus sûrement qu’avec des volées de projectiles solides ? Pourquoi pas.

Goldeneye, une réalité ?

Cette étude prospective à moyen terme prévoit une amélioration croissante des faisceaux d’énergie électromagnétique dans des buts défensifs : plus intenses, plus rapides, plus précis, ceux-ci devraient pouvoir neutraliser des menaces de plus en plus grosses en les consumant par surchauffe, ou en grillant leur électronique interne pour les rendre inopérants. L’appareil pourrait être transporté à bord d’un avion ou bien intégré à un satellite militaire ; on n’est pas loin d’une militarisation assumée de l’espace qui dépasserait le cadre de la détection et de l’observation, comme dans le film Goldeneye, un James Bond cuvée 1995 où un satellite armé est utilisé précisément pour cet usage.

Une quarantaine d’années, c’est à la fois peu et beaucoup dans le domaine militaire. Beaucoup, car les nouvelles technologies évoluent vite et rendent obsolètes des générations entières d’équipement. Et peu, car il faut compter une génération de soldats pour concevoir et mettre au point de nouvelles armes pour ensuite seulement les produire, corriger leurs inévitables défauts, puis les mettre en service. Penser dès 2021 les besoins de l’année 2060 n’a donc rien d’incohérent. Quant à la situation géopolitique des 40 prochaines années, bien malin qui saurait la prédire.

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