« Percée majeure » dans une expérience de fusion nucléaire : plus d’énergie a été produite que consommée

Des scientifiques du laboratoire américain « Lawrence Livermore » auraient mené la toute première expérience de fusion nucléaire ayant produit un gain net d’énergie. Le département américain de l’énergie fera une déclaration à ce sujet mardi.

Pourquoi est-ce important ?

On tente depuis longtemps de découvrir la formule de la fusion nucléaire, le même processus qui se produit au sein du soleil et qui permettrait de disposer d'une source illimitée d'énergie propre.

L’actualité : des chercheurs américains ont réussi à produire 2,5 mégajoules d’énergie dans une expérience de fusion nucléaire, soit 120 % des 2,1 mégajoules utilisés durant le processus. Les journaux britanniques Financial Times et The Independent font état d’une « percée majeure » ; ils se basent sur trois sources différentes parmi des initiés du projet.

  • L’essai a consisté à tirer une bulle de plasma d’hydrogène avec le laser le plus puissant du monde pour déclencher la réaction de fusion nucléaire.
  • Cet essai réussi s’est déroulé dans un dispositif de recherche appelé « National Ignition Facility » (NIF), qui se trouve dans le laboratoire « Lawrence Livermore », financé par le gouvernement américain, en Californie.

Fission contre fusion

Contexte : L’énergie nucléaire « ordinaire » repose sur un processus appelé fission, dans lequel un élément chimique lourd est divisé pour produire des éléments plus légers. La fusion fonctionne en combinant deux éléments légers pour obtenir un élément plus lourd.

  • Les chercheurs travaillent sur la fusion nucléaire, souvent qualifiée d’éternelle promesse d’approvisionnement en énergie, depuis les années 1950. Faire de la fusion nucléaire une source d’énergie commercialement viable s’est avéré extrêmement difficile.
  • D’ailleurs, le problème n’est pas de déclencher les réactions, mais d’obtenir plus d’énergie du processus de fusion qu’on n’en utilise.

« Plus chaud que le centre du soleil »

  • Le NIF avait déjà réalisé ce processus en utilisant le plus grand laser du monde pour chauffer et comprimer de l’hydrogène dans une capsule.
  • Plus précisément, les 192 faisceaux de ce laser ont été dirigés vers une capsule d’environ un demi-centimètre (la taille d’un grain de poivre) contenant du deutérium et du tritium, deux formes différentes de l’élément hydrogène.
  • Cela comprime le combustible « jusqu’à 100 fois la densité du plomb, et le chauffe à 100 millions de degrés Celsius, soit plus chaud que le centre du soleil », écrit la BBC.
  • En chauffant la cible de cette manière, on crée un gaz chargé électriquement appelé plasma. Dans le plasma, les particules électroniques sont extraites des atomes, après quoi les noyaux atomiques restent. Ceux-ci peuvent fusionner ensemble, générant de l’énergie.
  • Lorsque les réactions de fusion deviennent la source dominante de chaleur dans le plasma, au lieu de l’énergie laser nécessaire pour lancer le processus, cette chaleur fournit l’énergie pour une fusion encore plus importante.
  • Mais même lorsque le plasma est brûlé, de l’énergie est toujours perdue dans le processus. Il s’agit de l’un des derniers obstacles à franchir avant d’atteindre l’objectif plus large d’une production énergétique autonome.

Incertitude

  • Cette dernière expérience réussie a-t-elle donc levé cet obstacle ? Cela reste à voir.
  • Pour : « Les données de diagnostic initiales indiquent une (…) expérience réussie dans le NIF. Cependant, le rendement exact est encore en cours de détermination et nous ne pouvons pas confirmer pour l’instant qu’il est supérieur au seuil (d’énergie, ndlr) », indique le laboratoire dans un commentaire.
  • « Cette analyse est en cours, donc publier les informations (…) avant que ce processus ne soit terminé serait inexact. »

Enthousiasme

Et maintenant ? La communauté scientifique est déjà très excitée par le fait qu’un gain net d’énergie se serait produit dans une expérience de fusion nucléaire.

  • « Ce résultat expérimental va donner un coup de fouet aux efforts visant à alimenter un jour la planète en énergie par la fusion nucléaire – à un moment où nous n’avons jamais eu autant besoin d’une source abondante d’énergie sans carbone ! », a par exemple écrit Arthur Turrell, directeur adjoint du bureau des statistiques du Royaume-Uni, sur Twitter dimanche.
  • La secrétaire d’État américaine à l’énergie, Jennifer Granholm, et la secrétaire d’État adjointe américaine à la sécurité nucléaire, Jill Hruby, feront une annonce anticipée demain au laboratoire national, ajoute The Independent.
    • Ce record constitue également une incitation majeure pour le réacteur thermonucléaire expérimental international (ITER) de 20 milliards d’euros, actuellement en cours de construction dans le sud de la France. Les Russes ont d’ailleurs expédié un autre des six aimants géants nécessaires au projet. 
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