« Pas d’effet Meissner, pas de résistance nulle, ni de supraconductivité » : l’étude qui refroidit sérieusement les espoirs autour du LK-99

Trois chercheurs chinois disent avoir réussi à synthétiser le matériau LK-99 dans une étude publiée sur la plateforme pre-print, Arxiv. Leurs échantillons ne sont pas du tout prometteurs.

Dans l’actu : la publication d’une étude tempère l’enthousiasme autour de la supraconductivité à température ambiante supposée du LK-99.

  • Les 3 chercheurs de l’Université de Pékin et l’Académie des Sciences de Pékin affirment d’abord avoir « réussi à synthétiser » des échantillons similaires au LK-99, mais que ceux-ci n’ont pas pu démontrer la présence d’un effet Meissner, ni de résistance nulle. Cela a conduit les scientifiques à dire que leurs échantillons n’ont pas montré de supraconductivité.
  • Certains petits fragments ont bien montré une semi-lévitation, comme on en a vu beaucoup sur les réseaux sociaux ces derniers jours, mais ce phénomène s’expliquerait par le ferromagnétisme de leurs échantillons.
  • Est-ce à dire que toute l’agitation autour du LK-99 peut être rangée au placard ? Non. Comme pour l’étude originale des chercheurs coréens, il s’agit d’un travail universitaire qui n’a pas été vérifié par des pairs. En outre, les chercheurs chinois parlent de leurs propres échantillons.
  • Certains autres échantillons et répliques ont montré une semi-lévitation ou une lévitation complète, et leurs créateurs n’arrivent pas aux mêmes conclusions que les chercheurs chinois. Un échantillon en particulier a montré de la supraconductivité, mais pas encore à température ambiante.
  • Ce n’est toutefois clairement pas un bon signal, alors que les tentatives se multiplient à travers la planète scientifique pour démontrer que nous sommes devant un tournant énergétique, une révolution. Aucune de ces tentatives n’a pour le moment démontré la supraconductivité du LK-99 à température ambiante, alors que la pureté des échantillons est de plus en plus sophistiquée.
  • L’enthousiasme de la communauté scientifique a pris un sérieux coup, des doutes sont de plus en plus exprimés, même par ceux qui étaient très emballés dès le départ comme Andrew Cote ou Alex Kaplan, deux physiciens qui suivent de très près toutes les avancées autour du LK-99.

Le LK-99, c’est quoi ?

De quoi parle-t-on ? Au moins deux chercheurs coréens (il y a déjà des disputes sur la paternité de la découverte) ont prétendu avoir créé un matériau supraconducteur fonctionnant à température ambiante qu’ils ont appelé LK-99. Leur étude a été diffusée en pre-print, c’est-à-dire qu’elle n’a pas encore été publiée dans une revue scientifique et n’a donc pas été relue par des pairs, mais leur trouvaille reste très prometteuse et soulève un énorme enthousiasme dans la communauté scientifique mondiale. LK-99 est le fruit de 20 ans de recherche au Centre des Nanosciences Quantiques de Séoul.

Qu’est-ce qu’un supraconducteur ? La supraconductivité concerne des matériaux qui n’opposent aucune résistance électrique. Ce qui veut dire qu’il n’y a aucune perte d’énergie. Ces matériaux existent déjà, mais leur supraconductivité s’opère à des températures très basses, proches du zéro absolu (-273,15°C). Aujourd’hui, on en connait des dizaines, avec des températures de supraconductivité différentes. La révolution, ici, c’est que le LK-99 serait un matériau supraconducteur à des températures ambiantes, ce qui permettrait un déploiement facile et surtout rentable. Le LK-99 est basé sur une modification d’une structure de plomb et de l’apatite. Au sein du plomb, les chercheurs ont remplacé une petite part par des ions de cuivre. Cela crée des « puits quantiques supraconducteurs » dans le LK-99. Le but maintenant est de reproduire ce matériau tout en prouvant qu’il possède les propriétés d’un supraconducteur à température ambiante.

À quoi le reconnait-on ? Il faut observer un effet Meissner, un phénomène qui expulse tout champ magnétique d’un supraconducteur, ce qui entraine une sorte de lévitation du matériau par rapport à un aimant. Il y a toutefois un piège. Certains matériaux dits « diamagnétiques » peuvent léviter sans qu’ils soient supraconducteurs, comme l’eau, voire même une grenouille. La différence est qu’il faut un champ magnétique monstrueux pour faire léviter quelques gouttes d’eau. Le supraconducteur peut lui léviter avec un simple aimant.

En quoi serait-ce une véritable révolution ? On considère généralement que le transport d’électricité dans les lignes à haute tension engrange une perte d’énergie de l’ordre 10 à 20%. Avec un matériau qui n’oppose pas de résistance électrique et facilement reproductible, on pourrait faire des économies d’électricité considérables. Or, l’électricité est l’énergie de demain pour décarboner notre planète. D’autres applications dans les ordinateurs quantiques, les batteries, les trains à lévitation magnétique ou encore dans la fusion nucléaire sont possibles et constitueraient une véritable révolution.

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