Surprise sur le marché du gaz : le niveau des réserves européennes augmente (!) et le prix est en chute

Températures douces, vent : la consommation de gaz est en baisse, à tel point que le niveau de remplissage des réserves européennes est en hausse, un fait rare pour cette période de l’année. Le prix du gaz est en chute, et atteint le niveau d’avant l’invasion de l’Ukraine, une première.

Pourquoi est-ce important ?

Le problème européen du gaz, tout au long de l'année, a fait peur : en aurons-nous assez cet hiver ? Au final, les réserves se sont remplies plus et plus rapidement que les autres années. Maintenant le défi est de ne pas les vider trop vite, et surtout de les remplir à nouveau.

Dans l’actu : le prix du mégawattheure en chute.

  • Le prix du MWh de gaz, le TTF (prix de référence du marché européen), est redescendu à son niveau d’avant l’invasion de l’Ukraine, ce mercredi. Il est passé sous la barre des 80 euros le MWh pendant plusieurs heures mercredi matin, jusque 76,25, avant de remonter un peu.
    • Cela fait huit jours de suite que le prix est en baisse. Mais il reste quatre fois plus élevé que début 2021, par exemple.

Les détails : une météo favorable.

  • C’est que depuis près de deux semaines, le temps est doux. La demande pour le gaz est moins forte, ce qui fait chuter le prix.
    • Un contraste avec les deux semaines précédentes, où le prix avait commencé à remonter (jusque 150 euros) à cause de températures quasi constamment négatives.
    • Bonne nouvelle du côté de la météo : lors des deux semaines à venir les températures resteront positives, avec des maxima prévus entre 5 et 10 degrés et un pic à 15 degrés le week-end du nouvel an, du moins pour la Belgique, selon les données de l’IRM. Il y a donc de fortes chances que les prix continuent à chuter.
  • Mais ce n’est pas que la météo qui fait baisser les prix. Il y a eu beaucoup de vent sur le continent également, ce qui fait tourner les éoliennes et réduit la demande de gaz grâce à la production d’électricité.

L’essentiel : Les réserves de gaz se re-remplissent.

  • Comme il fait moins froid, la population et les entreprises allument moins leur chauffage, cela est évident. Une consommation et un prix en baisse, c’est une bonne nouvelle pour les factures d’énergie.
  • Mais c’est aussi une bonne nouvelle pour les réserves de gaz. D’un côté, elles se vident moins rapidement que lors des deux semaines de froid indiquées plus haut (de 90 à 83% entre le 5 et le 18 décembre). Et d’un autre côté, les pays européens peuvent même en profiter pour les renflouer (tout en profitant des prix moins élevés). De sorte que le niveau augmente légèrement.
    • Les réserves européennes sont remplies à 83%, selon les données de l’inventaire agrégé, l’AGSI (situation au 26 décembre). Depuis la semaine dernière, ce chiffre est légèrement en hausse. Sur le site, on peut voir que de nombreux pays sont dans le vert, c’est-à-dire que le niveau augmente. Une tendance qui pourrait continuer dans les jours à venir, avec les températures annoncées.
    • La situation dépend des pays : certains économisent plus que d’autres. La Belgique est par exemple passée d’un taux de remplissage de 79 à 84%. L’Allemagne, plus grande consommatrice de gaz du continent et complètement coupée de la source russe, a aussi vu ses réserves augmenter. Une bonne nouvelle après ces fameuses deux semaines de froid, où les Allemands ont consommé plus que la moyenne de 2018 à 2021 (+14% au 18 décembre), selon les compilations de données du journal Die Zeit. Une première depuis l’invasion de l’Ukraine.
  • Remarque : le fait que les réserves de gaz augmentent à cette période de l’année est rare, si pas du jamais vu. C’est en tout cas ce que clame Javier Blas, expert en énergie pour Bloomberg, sur Twitter, en parlant de tendance « contraire à la saison ».
    • Les autres années, les pays se contentaient de remplir les réserves au printemps ou en été. Mais cette option n’est pas encore entièrement certaine pour 2023.

A l’avenir : les inconnues.

  • Malgré ces « bonnes nouvelles », le maître mot répété par les experts et les autorités publiques est : économiser.
  • Car il reste des inconnues : l’évolution des prix et la situation d’approvisionnement l’an prochain. Avec la relance de la Chine et le retour de son appétit en GNL, la fin des livraisons de gaz russe (ou pas), la sécurité de l’approvisionnement si le prix devait atteindre le plafond imposé par l’UE, etc., les observateurs restent perplexes.
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