Le Japon laisse l’Allemagne derrière lui et opère son tournant nucléaire

Face à la crise énergétique, le Japon change de politique nucléaire, alors que c’était encore impensable il y a quelques années. L’opération vise aussi à atteindre ses objectifs de réduction d’émissions de carbone. La consommation de charbon, entre autres, est repartie à la hausse.

Pourquoi est-ce important ?

L'économie japonaise ne va pas bien. L'inflation est en hausse, le yen est en baisse et les marchés s'effondrent. À cela s'ajoute, comme partout ailleurs, la crise énergétique. De quoi complètement bouleverser la sortie du nucléaire, décidée après la catastrophe de Fukushima, en 2011. Le gouvernement japonais l'avait évoqué, il l'a désormais confirmé : ce sera le retour du nucléaire. Même la population a changé son fusil d'épaule.

Dans l’actu : le gouvernement de Fumio Kishida approuve un plan pour relancer le nucléaire.

  • Avant la catastrophe de Fukushima, le Japon possédait 54 réacteurs nucléaires actifs. Aujourd’hui, seuls 9 de ces réacteurs sont encore en marche.
  • Le Japon ne s’interdit plus rien : prolongation, remplacement et même construction de réacteur nouvelle génération.
  • Le but est d’arriver à un mix énergétique comprenant 20 à 22% de nucléaire d’ici à la fin de la décennie, contre 7% aujourd’hui. Un objectif que les observateurs jugent très ambitieux. Cela représente 27 réacteurs.
  • La plupart des réacteurs japonais ont plus de 30 ans. Ceux qui le peuvent seront prolongés tous les 10 ans. Les plus vieux réacteurs obtiendront une seule prolongation et seront ensuite remplacés par des réacteurs de nouvelle génération, voire même de fusion nucléaire. En tout cas, c’est l’intention : la place est laissée à l’innovation.

Le contexte : le Japon n’a plus vraiment le choix.

  • Avec l’arrêt progressif de son nucléaire, le Japon a augmenté sa consommation de charbon, de gaz naturel et de mazout, ce qui l’a fait sortir de sa trajectoire de neutralité en carbone d’ici 2050.
  • À cela s’ajoute bien sûr la crise énergétique, qui a aussi fait grimper le prix de factures. L’approvisionnement est en danger et les coupures de courant répétées à Tokyo ont marqué les esprits.
  • L’inflation au Japon est au plus haut en 40 ans, même si elle est sans commune mesure avec les taux européens. Le yen a dévissé, obligeant la Banque du Japon à resserrer timidement sa politique monétaire. La BoJ ne peut pas se permettre ce que la Fed et la BCE font. L’économie japonaise n’est pas en surchauffe et fait face à un problème structurel insoluble : le vieillissement de sa population.
  • La catastrophe de Fukushima a marqué les esprits, jusqu’en Europe. C’est à ce moment-là que l’Allemagne s’est complètement décidée à sortir du nucléaire, pour foncer sur le renouvelable, en misant sur le gaz comme énergie de transition. La Belgique a suivi, même si la sortie du nucléaire était ancrée depuis une loi signée en 2003. Face à la crise, notre pays a opéré un timide tournant, ouvrant la voie à une prolongation pour 10 ans des deux réacteurs les plus récents. Le débat a fait rage en Allemagne, mais la sortie a été confirmée à nouveau en septembre dernier.
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