Le mois dernier, le Midas des réseaux sociaux, Mark Zuckerberg, a annoncé qu’il rebaptisait son entreprise Facebook en Meta, indiquant qu’il voyait « l’ancien » Internet migrer vers un « nouveau » monde virtuel où son entreprise régnerait également en maîtresse. Pour ceux qui croient encore au monde du passé, ce sera un réveil brutal. Pour d’autres, c’est un nouveau paradis qui s’ouvre. Heureusement, l’humour est toujours l’antidote ultime. Grâce à l’Office du tourisme islandais.
Mark Zuckerberg a décrété la semaine dernière que nous passerions bientôt pas mal de temps dans son métavers, un monde virtuel, comme si le monde réel n’était pas déjà assez complexe.
Vieux gâteau dans un nouvel emballage
Cette idée n’est pas vraiment nouvelle. En 2003, Second Life avait déjà vu le jour: un monde virtuel 1.0 dans lequel on pouvait se promener, acheter des maisons et des vêtements. Bref, mener une seconde vie.
Il y a encore – selon le Ebbe Altberg, le PDG de Linden Lab, l’entreprise qui commercialise ce monde virtuel – près d’un million de membres actifs sur la plateforme. Pas mal, mais pas du tout ce que notre ami de la Silicon Valley a en tête. Et il a déjà le vent dans le dos.
Tout est une question de timing
Avant qu’Apple ne prenne d’assaut le monde de la téléphonie mobile, il existait une entreprise très prospère: Blackberry. Bien que relativement petite, elle fournissait d’excellents services mobiles à sa « communauté ». Seulement, elle est arrivée trop tôt (en 1999) et elle n’a pas pu rivaliser avec le génie marketing de Steve Jobs, qui a inventé son iPhone en 2007. Blackberry est revenu à la case départ. Une preuve qu’un bon timing est essentiel lors du lancement d’un nouveau produit, et encore plus lors du lancement d’une nouvelle catégorie de produits.
Depuis la crise du coronavirus, le monde semble plus que jamais prêt à s’immerger encore plus loin dans le monde numérique. Il est donc possible que l’ère des mondes virtuels soit bien arrivée.
Avec de l’argent et une large clientèle
Il existe également une grande différence entre Linden Lab et l’entreprise de Zuckerberg. Ce dernier regorge d’argent. Meta avait plus de 58 milliards de dollars sur son compte au 30 septembre 2021. Zuckerberg lui-même est, selon Forbes, le huitième homme le plus riche de la planète avec un peu plus de 130 milliards d’actifs.
Comme si cela ne suffisait pas, il dispose d’une installed base incroyablement importante, ce qui est le rêve de tout spécialiste du marketing. L’installed base est le nombre de clients qui utilisent déjà vos services. En novembre 2021, 2.760.000.000 citoyens du monde étaient clients de Meta via des applications telles que Facebook, Instagram et Whatsapp, faisant d’elle, et de loin, la plus grande base de données au monde. Ces internautes utilisent un de ses produits au moins une fois par jour. Ça, c’est de la fidélité.
The Good
Chaque technologie est neutre en valeur. Même les armes, car ces dernières peuvent être utilisées pour une bonne ou pour une mauvaise cause – en effet, nous sommes tous d’accord sur le fait que l’on doive se défendre contre la Biélorussie ? De son côté, la réalité virtuelle peut aider les personnes dépressives, ce qui est une très bonne chose.
Et de nombreux écologistes seront certainement d’accord avec la pensée du prophète Zuckerberg selon laquelle nous devrions tous rester à la maison et passer du temps dans l’Amazonie virtuelle. Pour ne pas émettre de CO2 lors de tous nos voyages en avion vers la vraie forêt amazonienne, qui ne cesse de rétrécir.
The Bad
Cependant, la réalité est que lorsqu’il y a beaucoup d’argent en jeu, les forces du capitalisme brut pointent vite le bout de leur nez. Après tout, le modèle économique est clair. Les entreprises parraineront des mondes virtuels populaires, vous ferez vos achats dans les centres commerciaux en face du Wijnegem ou du Woluwe Shopping Center. Zuckerberg fera tout son possible pour s’assurer que vous passiez le plus de temps possible dans son monde et que vous achetiez autant de ses lunettes que possible.
And the Difficult
Nous passerons encore moins de temps dans le monde réel, bien qu’un temps minimum reste nécessaire, car il faut tout de même manger et boire. Pour toutes les autres activités, nous nous évaderons dans ce monde de rêve, tout comme nous sommes maintenant également perdus sur Internet où nous rêvassons parfois pendant des heures. Après tout, il est difficile pour nous, « homo sapiens », de nous dépouiller de toutes ces pulsions.
Le problème supplémentaire de ce monde virtuel est que l’argent y comptera aussi. Les cryptomonnaies deviendront le moyen de paiement par excellence. Elles vous permettront de vivre des expériences incroyables ou médiocres. Là aussi, ce sera la folie. Dans le même temps, les défis auxquels nous sommes confrontés dans le monde réel continueront toujours de nous hanter. Nous ne nous dirigeons pas vers un monde zen et pur, où vous trouverez tranquillité et paix.
Nous sommes donc condamnés à nous séparer en deux et à gérer au mieux ces deux vies. Comme si la vraie vie n’était pas assez difficile, nous devrons également nous armer dans le monde virtuel contre les publicités intrusives et les offres permanentes des sociétés de divertissement.
Tout peut être résolu
Selon des experts de la réalité virtuelle tels que Mirjam Vosmeer, vous pouvez garder ces lunettes sur votre tête pendant une demi-heure maximum. C’est ce qu’elle explique dans De Volkskrant. Seulement, c’est aussi ce qu’on avait pensé lorsque la télévision, Internet puis le téléphone portable ont fait leur apparition. Au final, tous absorbent déjà environ 80% de notre temps libre.
Il n’y a aucune raison pour que ce problème ne puisse pas être résolu non plus. Cette vidéo du Wall Street Journal montre que que le métavers est susceptible de connaître un succès retentissant, ce qui signifie que la génération qui grandira avec lui ne fera plus la distinction entre le monde réel et le monde virtuel.
L’humour comme antidote
Cependant, le meilleur antidote pour tout relativiser – si vous n’aimez pas cette évolution – est l’humour. La vidéo ci-dessous de l’Office du tourisme islandais a eu son petit effet. Ils ont fait une parodie de la vidéo d’annonce de Meta et il faut dire que c’est réussi. Par la même occasion, ils ont lancé un appel pour donner une autre chance au monde réel. Et rappelons-le, il est très beau.
L’auteur, Xavier Verellen, est gérant de QelviQ, une entreprise de l’Internet of things active dans le secteur du vin (www.qelviq.com)