Selon le représentant des affaires étrangères de l’Union européenne Josep Borrell, la pandémie a anéanti le modèle de gouvernance mondial. Une pas si mauvaise nouvelle pour l’UE, qui aurait un rôle à jouer dans la reconstruction de l’ordre international.
Les conséquences du Covid-19 ne sont pas seulement sanitaires ou économiques, mais aussi politiques. Et quel impact, selon Josep Borrell. ‘La pandémie de coronavirus a fini par faire sauter le modèle de gouvernance multilatéral, déjà branlant depuis plusieurs années’, affirme-t-il de but en blanc aux journalistes.
En cause: le manque de leadership américain (ce qui ne plaira pas à Trump) et la tension croissante entre Washington et Pékin. Un euphémisme tant la guerre des mots entre les autorités américaines et chinoises ne semble avoir de fin, exacerbée selon Borrell par la crise du coronavirus. Au moins, la fin de la guerre commerciale est confirmée.
Dans ce contexte pour le moins chaotique, l’Europe pourrait faire avancer ses pions. ‘Dans ce nouvel ordre qui devra être construit à partir du désordre mondial, l’Europe pourrait jouer un rôle. De quelle façon? Tout dépend de son unité interne’, indique le haut représentant à la plateforme européenne Euractiv.
Une unité qui a eu bien du mal à se montrer au début de la crise. Les réponses nationales primaient sur la solidarité, de quoi provoquer de vives critiques envers l’Union européenne, notamment de la part d’une Italie délaissée et croulant sous les victimes. Jusqu’à ce que la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen présente ses excuses à l’Italie. Un pivot qui a depuis mené l’Europe à une réponse plus unie pour faire face à la pandémie. Le chef de la diplomatie européenne salue d’ailleurs ce ‘rapprochement et cette coopération’ qui ont lieu aujourd’hui.
Intégration et populisme
Mais l’avancée n’est pas encore suffisante pour le haut-représentant européen. L’Europe ne pourra être forte mondialement si elle ne crée pas une solidarité interne. L’UE doit apprendre la leçon et, à mon avis, poursuivre l’intégration du système de santé qui nécessite une dimension européenne’, affirme-t-il. Si la santé est devenue dans le reste du monde un problème de sécurité, en Europe c’est selon lui une affaire d’intégration.
La montée du nationalisme et du populisme dépendrait en outre uniquement de la réponse européenne à la pandémie, et donc du sentiment de protection que ressentiront les citoyens européens. Dans le cas contraire, il faudrait s’attendre à une remontée des mouvements nationalistes et anti-européens présents avant la crise. Ils trouvent d’ailleurs déjà un terreau fertile dans les nombreuses théories du complot et fake news circulant pendant cette période.
Des prévisions alarmistes… optimistes
Il y a deux jours, la Commission européenne indiquait que l’économie de la zone euro devrait subir cette année un ‘choc historique’ de -7,7% du PIB à cause de la pandémie. Des prévisions alarmistes et encore très incertaines, souligne la Commission. Mais Josep Borrell les qualifie lui d’optimistes face à la récession bien plus grave qui pourrait secouer l’économie européenne.
L’ampleur de la crise économique mondiale dépend effectivement de l’évolution de la pandémie. Si les signes ces derniers jours sont encourageants en Europe, rien n’est moins sûr aux États-Unis, par exemple, où Donald Trump empresse les États à rouvrir aussi rapidement que possible contre les avis des experts. ‘Et si les attitudes protectionnistes venaient à dominer les échanges commerciaux internationaux, l’Europe serait la plus grande perdante’, prévient Borrell.
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