La Chine veut détrôner le système GPS américain avec son sérieux concurrent Beidou

Que le système GPS tremble devant son nouveau concurrent. La Chine a finalisé mardi son système de navigation Beidou grâce au lancement d’un ultime satellite. Celui-ci lui permettra de couvrir le monde entier et de s’affranchir des Américains.

Prévu la semaine dernière, l’événement avait été reporté au tout dernier moment en raison d’un ‘problème technique’ non précisé.

Il s’agit du 30e et ultime satellite de la troisième génération Beidou (Beidou-3). Il a été lancé dans l’espace à 9h43 précises depuis le centre de lancement de Xichang, dans le sud-ouest de la Chine, par une fusée Longue-Marche 3, a indiqué la télévision publique CCTV.

Déjà en service commercial à l’étranger depuis 2012, la technologie chinoise était d’abord limitée à l’Asie-Pacifique. Avec la finalisation de cette constellation, l’ensemble de la planète est désormais couvert. Une avancée titanesque.

Le lancement de mardi est un ‘grand événement’ qui ‘permet de rendre la Chine indépendante des systèmes américain et européen’, confirme Jonathan McDowell, astronome au Centre Harvard-Smithsonian pour l’astrophysique, aux États-Unis.

Avancée militaire

Beidou, qui tire son nom de la constellation de la ‘Grande Ourse’ en mandarin, concurrence d’autres systèmes de navigation par satellite au niveau mondial: GPS (propriété du gouvernement américain et opéré par l’armée de l’air), Galileo (Union européenne) et Glonass (Russie).

Ces technologies peuvent en outre être utilisées de façon stratégique par les armées de leurs pays respectifs afin d’effectuer de la géolocalisation ou du guidage de missiles de très haute précision.

‘La finalisation de Beidou-3 est un évènement majeur pour la population chinoise, mais aussi sans nul doute pour son armée’, affirme Carter Palmer, spécialiste des questions spatiales au cabinet américain Forecast International.

Sa constellation terminée, la Chine peut également se mettre à l’abri d’une éventuelle coupure de GPS décidée par les États-Unis en cas d’hypothétique conflit entre les deux puissances. Et on connait les relations pour le moins tendues entre les deux pays, que la pandémie de coronavirus est encore venue exacerber.

Multiples utilités

Depuis le lancement du programme dans les années 1990, plus de 100.000 scientifiques, ingénieurs et techniciens ont participé à la conception du système de navigation. Le tout premier satellite Beidou avait été lancé en 2000.

Ses services sont aujourd’hui employés en Chine dans les taxis, les bus, les voitures particulières et bien sûr dans les smartphones. Plusieurs dizaines de pays comme le Pakistan, la Thaïlande, le Laos ou encore Brunei utilisent par ailleurs déjà officiellement le système, selon les médias d’État chinois.

‘La plupart des smartphones sous Android fonctionnent avec un positionnement multimode qui reçoit simultanément les signaux GPS, Beidou, Glonass et Galileo, afin d’améliorer la précision du positionnement’, souligne également Chen Lan, analyste pour le site GoTaikonauts.com, spécialisé dans le programme spatial chinois.

‘Il existe par ailleurs un grand nombre d’utilisateurs industriels, notamment des navires et des flottes logistiques en Chine’, qui utilisent également son ‘système de messagerie’, non présent chez ses concurrents, pour ‘les urgences et le sauvetage’, indique-t-il.

Notons ici l’importance de l’enjeu financier: le secteur de la navigation par satellite devrait peser cette année en Chine 400 milliards de yuans (50 milliards d’euros), selon un haut responsable cité par un média officiel.

Meilleur que le système américain?

Reste à voir si le système chinois est de poids pour grignoter des parts de marché de son rival américain. ‘De façon générale, Beidou a une meilleure précision que le GPS’, affirme Carter Palmer. ‘Mais sa fiabilité reste à démontrer.’

La marge d’erreur du système de navigation au niveau mondial est de 10 mètres en version civile, selon les données officielles communiquées mardi. Une très bonne précision qui lui permet tout de même d’espérer gagner des parts de marché face au GPS.

‘Je ne pense pas que Beidou va supplanter entièrement le GPS’, nuance néanmoins Palmer. ‘J’imagine plutôt une situation où l’utilisateur emploiera plusieurs systèmes, dont Beidou, pour avoir des données de navigation par satellite plus précises.’

Selon Jonathan McDowell, le système américain devrait ainsi conserver sa domination ‘lors des dix voire vingt années à venir’.

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