Les tentatives pour mettre fin à la suprématie du dollar comme valeur de réserve se multiplient sur le plan international et font la une de l’actualité. Beaucoup de bruit pour rien ?
Ces grands noms de la finance ne croient absolument pas en la fin du roi dollar

Pourquoi est-ce important ?
Le dollar est la valeur de réserve par excellence des banques centrales. Car le dollar est aussi la monnaie des échanges internationaux. À chaque baisse du billet vert, c'est la même rengaine : est-ce que les jours de la domination du dollar sont comptés ?Le contexte : les tentatives de s’affranchir du dollar se multiplient.
- Ces tentatives émanent des pays du Brics, et principalement de la Chine et de la Russie. La Chine essaye logiquement de mettre en avant son yuan. La Russie, elle, n’a pas trop le choix.
- Un nombre de pays croissant en a tout simplement marre des sanctions des États-Unis qui utilisent la domination du billet vert pour les mettre en place.
Les critiques : les États-Unis jouent-ils avec le feu ?
- Les critiques se multiplient aux États-Unis contre « l’armement » du dollar. À commencer par Elon Musk, qui s’est fendu d’un tweet alarmiste : « Si vous armez une monnaie trop de fois, les autres pays arrêteront de l’utiliser ».
- Avant lui, Ray Dalio, le fondateur du plus grand fonds spéculatif au monde, estimait que la domination du dollar s’estompait. En détenant des dollars, les banques centrales contractent en fait des dettes, résume l’expert de Wall Street. La raison pour laquelle les nations étaient auparavant disposées à s’exposer à une telle dette est de pouvoir commercer à l’échelle internationale, étant donné l’utilisation généralisée du dollar dans les transactions mondiales. Avec l’augmentation de la fluctuation du dollar, le nombre de sanctions qui s’élargissent et l’utilisation du yuan, par exemple, cet intérêt pour le dollar a diminué.
- À un rythme inégalé, l’année dernière, selon une note d’Eurizon SLJ Asset Management : un rythme annuel 10 fois plus important par rapport aux deux dernières décennies. Le billet vert représentait environ deux tiers du total des réserves mondiales en 2003, pour 55 % en 2021, et 47 % l’année dernière.
La réponse : Paul Krugman et Warren Buffett n’y croient pas.
- Le prix Nobel d’économie Paul Krugman ne voit pas la domination du dollar s’écrouler et a récemment argumenté son point de vue dans une chronique écrite pour le New York Times.
- « Ignorez donc tous les prophètes de malheur du dollar. Ou mieux encore, réfléchissez à ce que l’importance qu’ils accordent à une question qui n’en est pas une indique sur leur propre jugement », a taclé l’économiste.
- Krugman estime d’abord que la domination du dollar sur le commerce mondial et les flux d’investissement ne pèse pas plus « d’un 1% pour le PIB américain. »
- Ensuite, l’économiste ne pense pas que les quelques escarmouches des pays du Brics, pour généraliser, mettent concrètement en danger le dollar : « Le fait est qu’il est peu probable qu’en tirant sur un ou deux fils de cette toile, celle-ci s’effiloche. Même si certains gouvernements expriment le souhait que les paiements soient effectués dans d’autres monnaies, il n’est pas du tout certain qu’ils puissent y parvenir, étant donné qu’il s’agit principalement de décisions prises par le secteur privé. Et même s’ils parviennent à imposer une dédollarisation partielle, tous les autres avantages du dollar en tant que monnaie bancaire et d’emprunt subsisteront », pense-t-il.
- Warren Buffett, qui est souvent décrit comme les plus grands investisseurs de tous les temps, ne voit pas non plus le dollar s’effondrer, il l’a récemment expliqué lors de sa conférence aux investisseurs, un grand show annuel, qualifié de « Woodstock du capitalisme » : « Je ne vois pas d’option pour qu’une autre monnaie devienne la monnaie de réserve », a sobrement indiqué l’investisseur milliardaire.
- Des récentes notes de la Bank of America et Goldman Sachs arrivaient à la même conclusion : « Dans une certaine mesure, ces questions se posent chaque fois que le dollar se déprécie un peu (…) Le statut de monnaie de réserve a beaucoup d’inertie. Jusqu’à présent, et probablement pour longtemps encore, les tentatives de dédollarisation restent contenues et limitées. »
Les chiffres : la domination du dollar est toujours là.
- Selon les chiffres officiels du FMI, le billet vert représente encore 60% des réserves de change mondiales, le yuan ne pèse que 2,7%, contre 19,7% pour l’euro, 5,3% pour le yen et 4,6% pour la livre sterling.
- La part du dollar dans les échanges commerciaux est de 88% contre seulement 4,5% pour le yuan.