La fin du roi dollar ? Le prix Nobel Paul Krugman dézingue Elon Musk et relativise l’importance du billet vert : « Son poids pèse à peine 1% dans le PIB américain »

Le roi dollar est-il vraiment menacé ? Paul Krugman ne le croit pas et détruit en pièces « tous les prophètes de malheur » qui ne comprennent pas sa portée.

Pourquoi est-ce important ?

Il est un fait que le roi dollar est attaqué par sa gauche et par sa droite. De manière conjoncturelle d'abord : le dollar va sans doute vivre une année 2023 difficile pour un tas de raisons évoquées ici. De manière structurelle ensuite : le yuan chinois aimerait par exemple se faire une place au soleil dans le commerce international.

Dans l’actu : Paul Krugman décoche de nouvelles flèches dans son habituel article d’opinion écrit pour le New York Times.

  • On connait la chanson et le refrain se multiplie de plus en plus ces derniers temps : la domination du dollar touche à sa fin et est mise en danger par d’autres monnaies. Elon Musk fait partie de ces personnes qui pensent que la domination du dollar est vouée à disparaître, car la monnaie est trop utilisée comme une arme par les Etats-Unis, notamment en ce qui concerne les sanctions à l’égard de la Russie, de la Chine ou de l’Iran pour ne citer qu’eux.
  • Le prix Nobel d’économie Paul Krugman a plusieurs messages à faire passer qui reposent sur deux arguments :
    • D’abord, l’importance du dollar pour l’économie américaine est totalement surévaluée, selon lui. « Ignorez donc tous les prophètes de malheur du dollar. Ou mieux encore, réfléchissez à ce que l’importance qu’ils accordent à une question qui n’en est pas une indique sur leur propre jugement », a-t-il écrit dans une tribune du New York Times. Krugman estime que la domination du dollar sur le commerce mondial et les flux d’investissement ne pèse pas plus « d’un 1% pour le PIB américain ». « Même si l’on croit que la domination du dollar est en danger imminent – ce qui n’est pas le cas – un examen de ce que cette domination implique réellement montre clairement que l’importance du contrôle de la monnaie de réserve mondiale est largement surestimée », poursuit-il.
    • Ensuite, l’économiste ne pense pas que les quelques escarmouches des pays du Brics, pour généraliser, mettent concrètement en danger le dollar : « Le fait est qu’il est peu probable qu’en tirant sur un ou deux fils de cette toile, celle-ci s’effiloche. Même si certains gouvernements expriment le souhait que les paiements soient effectués dans d’autres monnaies, il n’est pas du tout certain qu’ils puissent y parvenir, étant donné qu’il s’agit principalement de décisions prises par le secteur privé. Et même s’ils parviennent à imposer une dédollarisation partielle, tous les autres avantages du dollar en tant que monnaie bancaire et d’emprunt subsisteront », pense-t-il.

Pour Paul Krugman, l’alarmisme des « catastrophistes du dollar » en dit plus sur eux que sur le dollar. « Elon Musk fait partie de ceux qui avertissent que l’armement du dollar détruira son statut de monnaie de réserve, parce qu’il en a bien sûr l’envie ». Un dollar fort n’est pas vraiment bon pour ses affaires, qui s’étalent dans toutes les régions du monde.

L’essentiel : le statut du roi dollar est toujours ce qu’il était.

  • Certes, la part du financement du commerce en renminbi sur la plateforme Swift est passée de 2% en février 2022 à 4,5% en février 2023.
  • Mais le dollar américain reste largement en tête, avec 84,3%. Il n’a subi que 2% de perte depuis l’année dernière (86,8% en février 2022).
  • Selon les données du FMI, le yuan n’est représenté que dans 2,8% des réserves monétaires mondiales. Loin derrière le dollar (59,8%), l’euro (19,7%), le yen (5,3%) et la livre sterling (4,6%).
  • La Russie s’est tournée vers le yuan ? C’est surtout parce qu’elle n’a pas d’autres choix.
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