L’Europe en est encore capable : quand la technologie européenne s’impose dans le cœur économique des États-Unis

Quatre sociétés énergétiques européennes ont remporté les enchères pour le tout premier parc éolien sur la côte ouest des États-Unis. Il s’agit d’un parc flottant, qui aura une capacité finale de 4,6 GW. Un pied de nez au dossier nucléaire polonais.

Pourquoi est-ce important ?

Juste après avoir perdu des appels d'offres pour construire des réacteurs et des centrales nucléaires sur le continent européen au profit de sociétés américaines, les sociétés européennes gagnent les enchères pour construire un immense parc éolien aux États-Unis. En matière d'énergies renouvelables, l'Europe a un coup d'avance. Et c'est prometteur pour la suite.

Dans l’actu : La première vente aux enchères de droits pour construire un parc éolien au large de la Californie et de la côte ouest des États-Unis, ce mardi et mercredi.

  • Cinq zones d’un total de 373,267 acres (ou 151,056 hectares, une acre valant 0,41 hectare) ont été mises aux enchères. Les licences sont parties pour un total de 757,1 millions de dollars, rapporte Reuters.
  • Ces cinq zones ont été remportées majoritairement par des entreprises européennes, qui travaillent déjà sur l’éolien aux États-Unis. Il s’agit d’Equinor (Norvège, qui exploite déjà le plus grand parc éolien flottant du monde), Copenhagen Infrastructure Partners (Danemark), RWE (Allemagne) Ocean Winds (une co-entreprise entre le Français Engie et le Portugais EDP Renewables), puis l’Américain Invenergy LLC.
  • Pour 2.028 dollars l’acre, ce parc est moins cher que d’autres permis mis aux enchères plus tôt cette année. Certaines de ces entreprises avaient par exemple payé la licence pour construire un parc sur la Côte Est près de 9.000 dollars l’acre.
  • Une des raisons de ce prix plus bas est la part de risque que les entreprises doivent prendre : il s’agit d’un parc éolien flottant, une technologie relativement nouvelle, qui correspond le mieux aux eaux profondes californiennes. L’éolien flottant compte actuellement 100 MW de capacité, dans le monde ; rien du tout par rapport aux 50 GW d’éoliennes offshore sur pied fixe (dont au moins 2 GW en Belgique). Pour 2035, le gouvernement américain veut disposer de 15 GW d’éolien flottant, soit la moitié de la capacité totale de l’éolien offshore prévue pour cette année-là.
    • Le parc éolien en question devrait avoir une capacité totale de 4,6 GW, soit l’équivalent de quatre centrales nucléaires.

Le contexte : les Européens pour l’énergie américaine, et vice-versa.

  • Un effet de calendrier presque ironique. À l’heure où l’expertise européenne rafle la mise aux États-Unis, pour l’énergie éolienne, ce sont les Américains qui gagnent les enchères en Europe, pour les centrales nucléaires.
  • Début novembre, le Français EDF s’est fait damer le pion par l’Américano-Canadien Westinghouse, en Pologne. Il pourra y construire les premiers réacteurs nucléaires du pays, pour 20 milliards de dollars. Le Sud-coréen KHNP a obtenu les droits pour une étude pour une deuxième centrale.
    • Cela malgré le vœu d’Emmanuel Macron d’établir une « autonomie stratégique européenne ».
  • Une semaine plus tard, la Roumanie a obtenu des financements américains via l’Export-Import Bank (EXIM), une agence de crédit, pour construire deux nouveaux réacteurs, pour un montant de trois milliards de dollars. Le géant américain Aecom serait la piste privilégiée pour la construction.
  • C’est maintenant au tour de la République Tchèque. Prague a mis une enveloppe de six milliards d’euros sur la table, le plus gros investissement de son histoire, pour construire un nouveau réacteur. Les candidatures sont encore ouvertes jusqu’en 2024. EDF s’est proposée, tout comme Westinghouse et KHNP. Reste à voir si un éventuel tournant protectionniste de l’Europe jouera dans la balance
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